Si
le Bourgeois Gentilhomme évoque pour beaucoup la fameuse pièce de
Molière, elle fut pourtant à l'origine et lors de sa première interprétation en 1670 une comédie-ballet. Elle comportait ainsi entre diverses scènes des intermèdes musicaux (tous composés par le célèbre
Jean-Baptiste Lully), chantés ou dansés dans lesquels figure la remarquable Marche pour la cérémonie des Turcs.
«
Le Bourgeois Gentilhomme faite à Chambort pour le divertissement du Roy» a une origine assez singulière : un incident diplomatique.
En novembre 1669,
Louis XIV reçoit à la Cour la visite d'un ambassadeur du sultan de l'Empire ottoman Mehmed VI. La réception fut somptueuse mais toutefois pas du goût de l'émissaire du sultan qui fit remarquer que le faste déployé ici était bien peu en comparaison de ce qui pouvait se voir dans la Cour de Mehmed VI. le Roi-Soleil pris mal la chose et c'est ainsi que
Molière se trouva en charge d'imaginer une riposte théâtrale à l'affront subi.
Monsieur Jourdain (notre Bourgeois gentilhomme) décide de mettre une partie de sa fortune pour figurer parmi les «gens de qualité». Pour y parvenir tout à fait, il va engager les services de maîtres de musique, de danse, d'armes, de philosophie, et pour l'apparence, ceux d'un maître tailleur. Pourquoi cette fortuite aspiration ? Monsieur Jourdain a fait la connaissance d'un certain Dorante. Celui-ci a ses entrées à la Cour et il ne néglige pas son nouvel ami en lui promettant les honneurs ainsi que les faveurs d'une marquise, la belle Dorimène, qu'il ne cesse de courtiser lui-même. Pour l'entretien de tout ceci, Dorante soutire d'énormes sommes d'argent à notre apprenti gentilhomme. Madame Jourdain s'aperçoit de la supercherie. En vain, son époux ne veut rien entendre.
Lucile, leur jeune fille, partage une passion amoureuse avec Cléonte. Sentant le moment venu, celui-ci vient solliciter la main de sa fille à Monsieur Jourdain. Mais là aussi, le maître de maison se montre inflexible. Hors de question d'offrir sa fille Lucile à un jeune homme de basse condition.
Fin de l'affaire ? Pas vraiment. C'est ici que Cléonte avec l'aide de son fidèle serviteur Covielle imaginent un stratagème pour déjouer les plans du récalcitrant monsieur Jourdain. Entre alors en scène un curieux personnage : le fils du Grand Turc...
Le Bourgeois Gentilhomme est, dans le genre de la comédie-ballet (ou de la comédie tout court), un pur régal. Dans cette pièce,
Molière manie magistralement tous les ressorts de la cocasserie (inoubliable Monsieur Jourdain), de l'impertinence et de la subtilité pour dénoncer les travers et la vanité d'une classe parvenue, où le paraître et la réputation se font non sans de nombreuses arrière-pensées.
Et notre ambassadeur turc ?
Molière ne l'épargnera pas lui non plus. Et ce pour le plus grand «divertissement du Roy».
Aujourd'hui encore,
Molière et son Bourgeois Gentilhomme nous offre une possibilité incomparable : celle de rire de nous-mêmes. Alors, surtout, ne boudons pas notre plaisir !