Le hasard veut parfois que l’on se retrouve à jouer en public la comédie, la tragédie ou la mélodie de sa propre vie.
La seule solution, c'était d'attendre que ça passe, se replier sur elle-même, faire comme si elle était ailleurs. C'était comme plonger sous une grande vague quand la mer est particulièrement agitée. On respirait un bon coup et on descendait aussi loin que possible sous le mur déchaîné d'eau blanche. Quand on était au fond, il vous poussait , vous bousculait comme s'il voulait vous tuer. Mais ça finissait toujours par passer. Et quand on remontait à la surface, suffocant à moitié, la vague clapotait si paisiblement, parfois, qu'on avait du mal à croire qu'elle ait existé.
Ce n'était rien. Leur couple marchait bien. Ils s'aimaient tellement.
Elle avait le sentiment d’être déplacée comme une pièce d’échec à chaque nouvelle étape de sa vie.
Cat regarda Gemma verser automatiquement la même quantité de vin dans chaque verre. Elle faisait pareil. C'était l'héritage d'une enfance passée à partager des gâteaux et des barres chocolatées avec deux sœurs à l'œil de lynx.
Les crises de panique étaient réservées à d’autres, plus fragiles qu’elle. Des gens qui avaient besoin qu’on s’occupe d’eux. Bon, pour parler franchement – des gens un peu débiles. Pas à elle.
Cat et Dan habitaient à Rozelle dans un appartement des années vingt qui avait été rénové, avec de hauts plafonds à moulures et un parquet ciré. Ils avaient vue sur un ruban de baie, de longs haubans d' Anzac Bridge et d' innombrables eucalyptus. Les matins d'été, ils prenaient le petit déjeuner devant un public de perruches aux couleurs vives qui s'affairaient en frétillant sur leur rambarde.
Un jour , (...), Cat lit dans un magazine un article qui parlait d'une étude sur des vraies jumelles qui avaient été séparées à la naissance. Quand elles se retrouvèrent, des années plus tard, elles découvrirent des similarités étonnantes dans leurs vies. Bien qu'elles aient été éduquées différemment, elles avaient fini par avoir des métiers, des passe-temps, des habitudes, des animaux, des voitures et des vêtements semblables, allant jusqu'à donner le même prénom à leurs enfants ! Selon l'auteur, cela prouvait que, tout comme la couleur des cheveux, la personnalité était décidée à la conception. Le destin de chacun était probablement gravé de façon indélébile dans ses gênes.
« Je déteste Noël ! » explosa Kara [ado], puis elle tourna les talons en direction de sa chambre.
- Moi aussi », dit Lyn.
Michael [père de Kara et mari de Lyn] la regarda.
« Enfin ce n'est pas tout à fait vrai. » Lyn alla prendre sa douche. « C'est juste que je m'en méfie. »
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C'était toujours comme ça. Elles ne s'excusaient jamais. Elles se contentaient de jeter leurs armes encore chargées, prêtes pour la fois suivante.
Le moment qu’elle préférait, c’était au crépuscule, quand les gens commençaient à allumer les lumières, sans avoir encore tiré les rideaux. On plongeait directement dans les petits cubes lumineux de leur vie. Ça la fascinait. Tous les petits détails de leur existence. Les plantes en pot sur le rebord de leurs fenêtres. Leurs meubles. Leurs photos. On entendait leur musique, leur télévision, leur radio. On sentait leurs odeurs de cuisine.