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Citations sur Autres rivages (39)

Mais c'est que toute poésie est, en un sens, une poésie de situation : essayer d'exprimer sa situation vis-à-vis de l'univers qu'embrasse la conscience est, de toute éternité, un besoin.
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Tu te souviens des découvertes que nous fîmes (que font, paraît-il, tous les parents) : la forme parfaite des minuscules ongles de sa main que tu m'as montrée en silence, étalée sur ta paume, telle une étoile de mer échouée ; le grain de la peau de ses membres et de ses joues sur lequel on attirait l'attention d'une voix lointaine, comme si la douceur du contact pouvait être rendue seulement par la douceur de la distance ; ce je-ne-sais-quoi de flottant, d'oblique, de fuyant dans le noir bleuté de l'iris qui semblait retenir encore les ombres qu'il avait absorbées d'anciennes forêts fabuleuses où il y avait plus d'oiseaux que de tigres et plus de fruits que d'épines, et où, dans quelque profondeur tachetée de soleil, naquit l'esprit de l'homme ; et, surtout, la première incursion d'un petit enfant dans la dimension suivante, la connexion nouvellement établie entre l'oeil et l'objet accessible, que les professionnels de la biométrie ou du business des labyrinthes à rats prétendent pouvoir expliquer.
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S'attacher à suivre des dessins thématiques de ce genre (il parle d'allumettes) à travers sa propre existence, tel doit être, à mon avis, l'objet d'une autobiographie.
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J’ai aidé à la compilation d’une grammaire russe pour les étrangers dans laquelle le premier exercice commençait par ces mots : Madam, ya doktor, vot banan (Madame, je suis le docteur, voici une banane).
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Au cours des grandes promenades languissantes dont s'accompagna la fabrication de mon premier poème, je tombais un jour sur le maître d'école du village, socialiste ardent, homme de bien, profondément dévoué à mon père (je salue à nouveau cette image), toujours porteur d'un bouquet serré de fleurs des champs, toujours souriant, toujours en sueur. Tout en parlant poliment avec lui du brusque voyage de mon père en ville, j'enregistrai simultanément et avec une égale netteté non seulement ces fleurs en train de flétrir, sa cravate flottant et les points noirs sur les volutes charnues de ces narines, mais aussi la morne petite voix d'un coucou venant de loin, et l'éclair d'un Petit Nacré se posant sur la route et le souvenir de l'impression que m'avait fait des gravures (d'insectes nuisibles aux cultures agrandis et d'écrivains russes barbus) dans les classes bien aérées de l'école du village que j'avais visitée une ou deux fois. Et -pour continuer une énumération qui rend mal la simplicité éthérée de tout ce processus- le déclic d'un souvenir absolument sans aucun rapport (celui d'un pédomètre que j'avais perdu) fut déclenché dans une cellule voisine du cerveau, et la saveur du brin d'herbe que j'étais en train de mâchonner se mêla à la note émise par le coucou et l'envol de la Bolorie, et tout le temps que cela dura, je fus sereinement, magnifiquement conscient d'être conscient d'un si grand nombre de choses variées.
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Mais c'est que toute poésie est, en un sens, une poésie de situation : essayer d'exprimer sa situation vis-à-vis de l'univers qu'embrasse la conscience est, de tout éternité, un besoin. Les bras de la conscience se tendent et tâtonnent, et plus ils sont longs, mieux cela vaut. Ce sont des tentacules, non des ailes, les membres naturels d'Apollon. Vivian Bloodmark, un ami philosophe que j'eus par la suite, disait souvent que, tandis qu'un homme de science voit tout ce qui arrive à un point donné de l'espace, le poète sent tout ce qui arrive en un point donné du temps. Perdu dans ses pensées, celui-ci tapote son genou de son crayon semblable à une baguette de magicien et, au même instant, une auto (plaque d'immatriculation de New York) passe sur la route, un enfant claque la contre-porte d'une véranda voisine, un vieillard bâille dans un verger embrumé du Turkestan, un grain de sable gris cendre esr roulé par le vent jusque sur Vénus, un certain docteur Jacques hirsch, à Grenoble, chausse ses lunettes pour lire, et des trillions d'autres choses sans importance de ce genre se produisent -toutes ses circonstances formant un organisme instantané et transparent dont le poète (assis sur une chaise de jardin, à Ithaca, N.-Y.) est le noyau.
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Mais la plus constante source d'enchantement, durant ces lectures, c'était, de chaque côté de la véranda, le motif arlequin des verrières multicolores insérées dans un châssis peint à la chaux. Le jardin, vu à travers ces verres magiques, devenait étrangement silencieux et distant. Si l'on regardait à travers le verre bleu, le sable se transformait en cendres, cependant que les arbres noirs comme de l'encre baignaient dans un ciel tropical. Le jaune créait un monde d'ambre macérant dans une infusion concentrée de soleil. Le rouge faisait s'égoutter du feuillage des rubis foncés sur un sentier couleur corail. Le vert renforçait le vert de la verdure. Et quand, après tant de somptuosité, on se tournait vers un petit carreau de verre ordinaire, insipide, avec son moustique solitaire ou sa tipule boiteuse, c'était comme boire une gorgée d'eau sans avoir soif, et l'on voyait un prosaïque banc blanc sous des arbres familiers. Mais, de toutes les fenêtres, c'est ce carreau-là à travers lequel, des années plus tard, mon aride nostalgie brûlait de pouvoir plonger le regard.
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Il se représente «le paradis comme un lieu où un voisin n'ayant pas sommeil lirait un livre interminable à la lumière d'une bougie éternelle» (p. 110)
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La musique, j’ai le regret de le dire, me fait purement et simplement l’effet d’une succession arbitraire de sons plus ou moins agaçants.
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