Je suis atteint de jérôme-boschisme, appelé aussi paranoïa cathartique.
Nous sommes de la race de ceux qui veulent le meilleur et refusent le reste: nous avons sans doute peu de chances d’obtenir ce que nous désirons mais cela ne change rien à notre désir. Nous aspirons au sublime et tant pis pour ceux qui nous trouvent débiles.
[...] Je t'aime au point de n'être plus que toi. Tu disais que j'étais ton frère : tu n'avais pas tort, car ta beauté et ma laideur sont consanguines, car ta grâce est soeur de ma disgrâce.
Nous sommes jumeaux, mon amour. Nous nous ressemblons comme le bien ressemble au mal, comme l'ange ressemble à la bête. Si mon corps s'unissait au tien, nous ne pourrions plus jamais nous dessouder.
[...] Il faut un minimum de vide en soi pour parvenir à déménager les idées et à trouver leur bon emplacement.
Elle pleurait toujours. Ses larmes étaient silencieuses : il fallait être un homme-oreille pour les entendre au bout du fil. Ainsi sanglote la neige qui fond.
En ce moment, tu es l'héroïnomane qui a décidé d'arrêter de se piquer. Les premiers jours sont atroces, tu souffres comme une damnée. Si tu tiens bon, tu en sortiras, sinon libérée, au moins fortifiée contre la drogue. Si tu craques, tu auras vécu l'enfer pour rien.
Ma métaphore n'est pas gratuite : ce type est un stupéfiant. La première fois, il t'a procuré un plaisir fulgurant, qui n'a cessé de s'amenuiser depuis, jusqu'à disparaître. Tu crois l'aimer quand tu éprouves pour lui de la dépendance. C'est un sentiment misérable, à l'image de celui qui te l'inspire.
L’esprit humain souffre d’une carence intellectuelle fondamentale : pour qu’il comprenne la valeur d’une chose, il faut le priver de cette chose.
A seize ans, l’acné s’abattit sur mes omoplates comme une confirmation théologique : j’étais le rebut de la création.
Il n’y a pas de sadisme chez les braves matérialistes, il n’y en a que chez les ultra-spiritualistes de mon espèce.
Vers vingt heures, je la raccompagnais chez elle. J'aurais voulu rester avec elle plus longtemps mais je ne voulais pas avoir l'air de chercher à la séduire.
-Sais-tu qu'avant toi personnene m'appelait Epiphane?
-Comment t'appelait-on?
-Quasimodo.
-Pourquoi? Tu es bossu, tu es carillonneur?
-Non je suis laid.
Elle eut un rire sincère qui m'enchanta.Elle ne chercha pas à nier sottement :"Non, tu n'es pas laid"-cela m'eût fait grimper au plafond.
Puis elle dit :
-J'aime ton nom.Il te ressemble.
-Aussi laid?
-Non. Il est bizarre.
-Je suis bizarre? En quoi le suis-je?
Elle mit un temps avant de répondre:
-Tu ne dis jamais de choses blessantes ni d'idioties.
-Et c'est bizarre, ça?
-C'est très bizarre.