Amélie Nothomb fait partie pour moi de cette clique d'auteurs dont le succès tient à tout autre chose qu'à la qualité de leurs oeuvres: sans ses chapeaux et son maquillage, aurait-on jamais entendu parler d'elle? J'ai mes doutes. Mais bref, voici donc le livre que l'écrivaine (ou plutôt son éditeur) a choisi de publier cette année parmi les quatre ouvrages qu'elle déclare écrire annuellement (ici déjà un lecteur exigeant tousse d'incrédulité: quatre livres par an??).
Il n'y a en fait pas grand chose à en dire: ses fans seront comme toujours transis de son écriture "pétillante comme du champagne" et s'émerveilleront des références littéraires ou philosophiques dont le texte n'est pas avare. Les autres seront souvent hermétiques à une prose légère, creuse et parfois horripilante (je suis de cette deuxième catégorie, tout à fait hermétique) et trouveront lesdites références singulièrement gratuites, voire pédantes, trahissant souvent le souci de "faire genre". On me demandera alors, avec un tel parti pris, pourquoi lire ce livre? Il se trouve que je connais très bien le Japon et les relations interculturelles, et que ce livre traînait chez une connaissance, donc j'ai été curieux, mais tout ceci est comme je l'attendais, un choc des cultures façon Plus Belle la Vie qui plaira à ceux pour qui le Japon évoque le mont Fuji, les sushis et les Mangas, mais qui ne connaissent pas du tout le pays. Ceux-là peuvent être dépaysés, oui... Les autres se retrouveront face aux poncifs habituels de la relation entre deux cultures mâtinés d'une romance à l'eau de rose aussi prévisible que l'horoscope de Madame Teissier, abreuvée de grandes phrases sur l'amour et de citations sur la vie, la mort, le monde, etc, typique de ce genre de romans que j'aurais envie de qualifier de sociétaux. le tout est bien évidemment noyé de divers clichés sur un pays pourtant bien plus complexe qu'il n'y paraît à ceux qui ne voient que Tokyo et d'affirmations douteuses glanées on ne sait où (il m'a par exemple suffi de demander à trois Japonais autour de moi si comme le dit l'auteur "La tradition affirme que tout Japonais doit avoir gravi le mont Fuji au moins une fois dans sa vie, faute de quoi il ne mérite pas la précieuse nationalité" pour les entendre rire et me dire: "Mais qui t'a raconté ça? Jamais entendu ça nul part?"). Seule la partie sur Hiroshima, assez juste, parvient à dépasser quelque peu la vision que l'auteur a du Japon pour représenter le vrai Japon.
Sinon, comme souvent, on reste surtout dans l'anecdote qui amuse sur les objets ou les usages (oh, les films coquins sont censurés, mais c'est géniaaaaal cette découverte culturelle!) et dans la parenthèse culinaire, sans recul, sans se rendre compte que ce genre de petites choses sans intérêt est en fait un véhicule à cliché d'autant que l'auteur, à son corps défendant je suppose, est souvent dans le jugement, suggérant à tout bout de champ par son ironie même que la façon dont on fait les choses ici est meilleure. On aurait aimé un peu plus de recul, de contextualisation, de profondeur historique pour amener le lecteur à comprendre que la vérité est relative et que peut-être ce qui nous semble idiot est en fait tout à fait logique. Bref, du dépaysement à bon compte pour Occidental sûr de son droit.
Mais bon, "le Nothomb" est par tradition une lecture facile, légère, distrayante, on ne va pas lui demander de devenir profond ou philosophique, même si c'est paradoxalement apparemment le but recherché...