La vie ne peut être vécue dans une fièvre permanente. Même l’angoisse retombe.
Il y a ceux bienheureux - qui peuvent vivre leur vie sans éprouver le moindre besoin d’y ajouter quoique que ce soit - un effort créatif quelconque ; et il y a ceux - maudits ? - pour qui l’activité de leur cerveau et de leur imagination est primordiale. Pour ceux-là, le monde peut-être infiniment riche, gratifiant et séduisant - mais il n’est pas primordial. Le monde peut-être interprété comme un présent, que l’on ne mérite qu’à condition d’avoir créé quelque chose qui le dépasse
Il y a une heure, une minute - vous vous en souviendrez toujours - où vous savez d'instinct, à des détails on ne peut plus anodins, que quelque chose cloche.
Vous ne savez pas - ne pouvez pas savoir - que c'est le premier d'une série d’évènements, de "clochement", qui aboutiront à la destruction absolue de la vie que vous avez connue. Car, après tout, il pourrait très bien ne pas être le premier d'une série, mais juste un évènement isolé qui n'entraînera pas la destruction de votre vie, mais seulement des changements, une reconstruction. C'est ce que vous souhaitez penser, ce que vous souhaitez désespérément penser.
(p22)
Je me rappelle lui avoir lu l'un des aphorismes de Nietzsche, que je choisirais comme épigraphe : "Ce qui se fait par amour se fait toujours par-delà le bien et le mal."
Agoraphobie-peur des grands espaces. Claustrophobie-peur des espaces clos.
Quelle catastrophe ce serait si les deux se conjuguaient ! Car l'agoraphobie apporterait au moins un peu de réconfort.
A la façon des animaux blessés ou mourants qui se terrent pour être seuls, l'homme affligé aspire à la solitude, que ce soit pour en mourir ou pour en guérir.
Elle était très amnésique, une sorte de version plus imprécise et moins animée d'elle-même, à la façon d'une estampe qui pâlit et perd de ses nuances à force d'impressions.
Nous sommes résolus à garder en vie ceux que nous aimons, nous désirons ardemment les protéger, leur épargner toute souffrance. Être mortel, c'est savoir que c'est impossible ; il nous faut pourtant essayer.
Comme l'araignée si judicieusement qualifiée de veuve noire, la veuve (humaine) est quelqu'un qu'il vaut mieux éviter.
Nous avions passé de nombreuses soirées en compagnie de nos amis et collègues de Détroit et, de toutes ces soirées il ne reste que quelques lambeaux de souvenirs. De toutes les soirées que Ray et moi avons passées ensemble, des repas que nous préparions, des courses que nous faisions ensemble-dans Livernois avenue et au centre commercial Northland- ; de nos innombrables promenades main dans la main dans notre quartier et dans le parc Palmer tout proche….je garde si peu de souvenirs.
C’est terrifiant… tout ce qui se perd de nos vies. (Page 154)
La peur angoissante de perdre le contrôle, perdre sa place, perdre sa vie.