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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
C'est l'histoire d'une américaine qui voulut écrire l'Afrique et son pays d'origine, le Nigéria. L'histoire d'une femme qui souhaitait parler d'un ailleurs avec ses beautés et ses horreurs, ses travers et ses mérites. Son nom : Nnedi Okorafor. Pour parler de son Afrique, celle que l'on enseigne pas aux occidentaux, celle du juju et des mascarades, Nnedi écrit Qui a peur de la mort ? (traduit chez Panini puis réédité par ActuSF) en 2010. Couronné par le World Fantasy Award l'année suivante puis par le prestigieux prix Hugo pour sa novella Binti en 2016, l'écrivaine connaît un succès croissant qui pousse la chaîne HBO à acquérir les droits télévisuels de son magnifique Qui a peur de la mort ?. Pourtant, Nnedi Okorafor n'est pas seulement une auteure de romans. Elle est également une brillante nouvelliste malheureusement délaissée en France…jusqu'à aujourd'hui ! Comme elles l'avaient fait pour Un Étranger en Olondre, le sublime roman de Sofia Samatar, les éditions de l'Instant se sont fendues d'une traduction du recueil de nouvelles de l'américaine intitulé Kabu Kabu. Dix-neuf nouvelles et deux essais plus tard, replongeons quelques instants dans une Afrique magique au-delà du temps.

Après un court essai drôle mais oubliable sur le Nègre Magique, Nnedi Okorafor nous propulse sur un autre continent, entre légendes et mythes. Kabu Kabu, tant la nouvelle du même nom que le recueil dans son entier, offre au lecteur une porte d'entrée vers un univers dépaysant convoquant les créatures fantastiques de l'Afrique Noire. Que ce soit au cours d'un voyage en taxi (Kabu Kabu) ou lors d'une promenade en forêt (L'homme au long juju), l'américaine raconte un folklore étonnant qui effraie parfois mais enchante à coup sûr. Au cours de ces dix-neuf nouvelles, Nnedi Okorafor revient dans son magnifique univers de Qui a peur de la mort ? aux confins de la fantasy et de la science-fiction. La tâche noire renvoie d'ailleurs à la tradition des nurus et leur haine du peuple okoke par l'intermédiaire de l'histoire de deux frères, Uche et Ifeanyi, et d'un amour interdit. Dans le monde de Nnedi, l'amour et l'amitié entrent en conflit avec les traditions et les superstitions mais aussi, tout simplement, avec la bêtise ordinaire des hommes. Bien souvent, le plus effrayant n'est pas le fait du surnaturel mais bien de la banale cruauté de l'être humain.

La haine de l'autre, la question de la différence, la violence. Voici trois des monstres qui traversent Kabu Kabu et tentent de rompre sa poésie. Nnedi recycle le mythe du super-héros, du “méta-humain” revu et corrigé à la sauce africaine, pour parler de tolérance et de féminisme. La figure mythique de la coureuse de vents arpente la sublime mais cruel Tumaki, une histoire de génocide où deux êtres différents s'aiment dans une société au bord de la haine. Sous couvert d'un fantastique délicat, l'américaine brosse des portraits féminins et féministes où les hommes engraissent les femmes et les excisent pour les empêcher de voler (Comment Inyang obtint ses ailes). Une image claire, magnifique et puissante. A l'envie d'émancipation de ses héroïnes, Nnedi oppose la tradition et la misogynie mais aussi le poids des occidentaux qui s'approprient les dernières grandeurs d'un pays déjà affaibli par la guerre et la pauvreté. Tout n'est pas affaire de dieux et d'esprits dans Kabu Kabu.

Outre le fantastique et la fantasy, l'auteure explore l'horreur et le réel transformant tantôt des toilettes en lieu maléfique et inquiétant dans La maison des difformités, tantôt un simple tapis en objet magique aux pouvoirs insoupçonnés (Le Tapis). Auteure polymorphe, l'américaine n'a pourtant pas son pareil lorsqu'elle plonge dans l'histoire de son pays d'origine, que ce soit à travers la guerre du Biafra et ses horreurs (Biafra) ou en lui imaginant un futur dramatique entre exploitation pétrolière, néo-colonialisme et oppression économique dans Popular Machine, Icône ou encore L'artiste araignée. La constante pourtant, c'est l'humanité et la douceur qui affleurent sous les thématiques douloureuses hantant les textes de Nnedi. Derrière les privations d'une société misogyne, on trouve le courage de femmes magnifiques et courageuses dont le portrait illumine une Afrique méconnue. Les héroïnes de Nnedi Okorafor résistent, luttent et s'affirment, pour un chemin (La guerre des babouins) ou pour un palmier (Le bandit des palmiers), devenant bien davantage que ceux qui les oppriment, ouvrant la voie à leurs soeurs, à leurs filles et à leurs mères. Enfin, Kabu Kabu raconte Nnedi Okorafor elle-même, à travers la sublime Zula, de la cour de récré de quatrième ou l'autobiographique La fille qui court. du racisme ordinaire chez des enfants empêtrés dans les préjugés raciaux de leurs parents. Non, finalement, ce n'est jamais le surnaturel qui terrifie le plus durant cette lecture mais bien notre monde moderne venant conclure ce recueil à la fois magique et poignant.

Grâce à Kabu Kabu, les éditions de l'Instant nous offrent un voyage vers un continent fascinant sous la plume intelligente et militante de Nnedi Okorafor. Sous prétexte de fantastique ou d'horreur, elle nous parle de femmes tiraillées entre leurs origines et leur envie de liberté, entre leur envie d'aimer et d'exister. A travers ces dix-neuf nouvelles, l'auteur américaine marrie modernité et traditions pour une autre vision de l'Afrique. Une vision plus belle, plus juste et surtout plus humaine.
Lien : https://justaword.fr/kabu-ka..
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Ce recueil de nouvelles de Nnedi Okorafor est issu d'un financement participatif via Ulule et comprend 20 nouvelles et un avant-propos signé Whoopi Goldberg. Toutefois le livre est disponible chez Les éditions de l'instant ici. Les textes présents dans ce recueil touchent à différents genres et sont très variés. le recueil est paru en 2013 aux États-Unis, et en France en mai 2018 avec la traduction de Patrick Dechesne. C'est le premier recueil de nouvelles de Nnedi Okorafor.

L'Afrique est au coeur de ce recueil qui est lié aux autres écrits de l'autrice. Néanmoins, il se lit très bien même si on ne connait pas du tout l'univers de Nnedi Okorafor, et en constitue même une très bonne porte d'entrée. Certains textes du recueil se font aussi référence entre eux. La tache noire raconte par exemple l'histoire de la naissance du premier Ewu (dont on parle dans Qui a peur de la Mort ?) au travers de l'histoire de deux frères et d'un amour interdit.

Nnedi Okorafor apporte une touche de surnaturel au contexte culturel et politique bien réel du Nigeria. le thème des différences sociales et des richesses du pays sont eu coeur de Popular mechanic qui évoque l'or noir qui rapporte de l'argent uniquement aux autorités, la touche de surnaturel est apportée par le fait que le personnage principal en lutte pour le contrôle du pétrole a un bras cybernétique. Dans L'artiste araignée, on retrouve les pipelines et le côté cybernétique en toile de fond avec des robots en forme d'araignées pour surveiller les puits de pétrole. Cette nouvelle aborde beaucoup de thématiques, est très émouvante et magnifiquement écrite, une des plus touchantes de l'ouvrage.

Les femmes et leurs places dans la société sont aussi au centre du recueil. Des femmes prises entre leurs origines et leurs aspirations, avec le poids de traditions ancestrales ne jouant pas en leurs faveurs. Comment Inyang obtint ses ailes montre comment dans les traditions, les hommes engraissent les femmes et les excisent, une jeune fille arrive à échapper à un mariage forcé et à voler de ses propres ailes, au propre comme au figuré. Dans Les vents de l'harmattan, Asuko vit un mariage tragique avec Okon qui n'accepte pas le pouvoir de sa femme. À nouveau un texte très émouvant et un destin tragique. Dans Kabu Kabu, on retrouve aussi ce thème avec l'histoire d'une jeune femme d'origine africaine vivant aux États-Unis qui va prendre sans le vouloir un Kabu Kabu, c'est à dire un taxi clandestin qui vous emmène là où vous devez aller. le surnaturel apparait peu à peu et l'autrice nous offre un magnifique voyage dans cet étrange taxi où l'on croise des créatures fantastiques de l'Afrique Noire.

Les créatures du folklore africain se retrouvent ainsi dans plusieurs textes, formant un univers à part et une ambiance très travaillée. Dans le tapis, une maison de famille abandonnée au Nigeria est remplie de créatures étranges. Un être surnaturel attaque une femme dans Sur la route. On trouve des babouins très agressifs dans La guerre des babouins, un texte qui traite la peur de manière très réussie. La maison des difformités fonctionne sur le même principe et flirte avec l'horreur pour un texte très réussi et faisant référence à Stephen King.

Nnedi Okorafor créé des personnages forts, originaux et à la fois crédibles mais surtout profondément humains. Ils sont confrontés aux horreurs de la guerre dans Biafra, à leurs désirs et à l'amour. Dans Séparés, un jeune couple est confronté à l'arrivée d'un enfant et aux changements que cela va occasionner dans leur couple. Tumaki raconte une histoire d'amour sous fond de religion et de méta humain et parle ainsi de la différence qui peut engendrer la haine.

Kabu Kabu est donc un recueil d'une très grande richesse qui place l'humain au centre de ses nouvelles. Les thématiques sont très variées, tout comme les genres et les personnages. le surnaturel peut servir chez Nnedi Okorafor à parler des problèmes des femmes prises entre leurs désirs et les traditions mais aussi à montrer la diversité et la beauté du continent africain. Il faut aussi souligner la traduction de Patrick Dechesne qui retranscrit la fluidité et la beauté de l'écriture de Nnedi Okorafor.
Lien : https://aupaysdescavetrolls...
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J'aime beaucoup Nnedi Okorafor ! Alors j'étais bien contente de recevoir l'un de ses ouvrages grâce aux éditions ActuSf. Je trouve son oeuvre très singulière dans le paysage science-fictionnel : elle s'inspire d'une Afrique magique, en particulier de la culture nigériane, pour créer des univers uniques. Dans Kabu Kabu, l'autrice partage plusieurs nouvelles représentatives de son style à travers des histoires courtes mais denses et cohérentes.

Nnedi Okorafor choisit de placer toutes ses nouvelles en Afrique ou en lien avec le pays d'origine de sa famille. Il en ressort donc cet univers singulier qui réutilise les éléments culturels qui font les spécificités de son écriture. Nous sommes dans un monde où le mythe se mélange à la réalité, avec des caractéristiques et des problématiques historiques, traditionnelles et culturelles issues directement du Nigéria : conflit du Biafra, excision, huttes d'engraissement, pétrole, racisme… Ces courtes histoires nous immergent dans un monde différent du nôtre.

J'ai beaucoup apprécié comment la diversité des nouvelles nous donne accès à une grande richesse. Les thématiques traitées sont extraordinairement variées : liberté, guerre, conflits, légendes, croyances, émancipation féminine, américanisation… C'est comme une fenêtre ouverte sur un autre mode de vie.

J'ai beaucoup apprécié les nouvelles traitant des coureuses des vents, qui faisaient un parallèle avec les femmes souhaitant vivre leur vie dans des sociétés très patriarcales. Ces femmes sont nées avec la capacité unique de voler, comme si elles échappaient aux lois terrestres de la manière la plus littérale possible. Et cette capacité de fuite fait d'elles des êtres discriminées par leur communauté.

L'une des grandes faiblesses des recueils des nouvelles est pour moi de tomber sur des inégalités au niveau de la qualité ou d'avoir affaire à quelque chose de répétitif. Ici, Nnedi Okorafor est à l'aise dans de nombreux genres différents, ce qui permet de donner une idée de toute l'étendue de son talent. Elle est aussi bien capable de donner naissance à de courtes fables philosophiques, des histoires horrifiques teintées de fantastique, d'histoires modernes ou humoristiques… Tout comme d'aborder de la science-fiction, comme elle a l'habitude de le faire.

La plupart des histoires sont regroupés autour d'un thème, ce qui renforce leur diversité en créant une forme de cohérence globale. Cette cohérence, c'est l'amour de l'autrice pour sa culture, amour qu'elle aura déjà profondément affirmé dans Binti. L'autrice s'illustre dans des genres différents grâce à une forme d'authenticité qui transparaît dans ses textes. Mais attention, cela ne signifie que ses écrits soient dénués de critiques. Nnedi Okorafor ne fait pas dans la concession et ne ménage pas ses lecteurs en les exposant aussi à des côtés plus sombres, comme la domination masculine ou la violence des sociétés.

L'authenticité de Nnedi Okorafor lui permet de construire des personnages d'une grande justesse et très attachants. Kabu Kabu donne la parole à des femmes crédibles, souvent amoureuses de leur liberté et d'une grande force. Il y a un vrai talent dans cette capacité à brosser rapidement des portraits de femme allant de l'avocate New Yorkaise très occupée, la gamine de la cour de récré qui tient tête aux remarques racistes à la femme musicienne qui joue de la musique pour un zombie. Expatriées de retour au pays, femmes aux pouvoirs extraordinaires, elles ont tout leur voix propre.

Les textes mettent toujours en avant les qualités des personnages principaux. Qu'elles soient irrévérencieuses, qu'elles aiment de manière inconsidérées, qu'elles soient courageuses, qu'ils soient rêveurs, aventuriers… Les personnages et leurs péripéties font que je n'a finalement trouvé aucun texte inférieur ou inutile, chacun d'entre eux étaient comme une perle entrant parfaitement dans un écrin spécialement conçu pour les mettre en valeur.

Convaincant, immersif et remarquable, Kabu Kabu est un recueil qui confirme Nnedi Okorafor comme une autrice à l'identité forte. Chaque texte brille par une forme d'authenticité et de cohérence globale, ouvrant une porte sur la culture et les traditions du Nigéria. Les personnages sont forts, mémorables, et servent parfaitement ces courtes histoires aux univers et tons aussi variés qu'enrichissants.
Lien : https://lageekosophe.com/
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Doit-on encore présenter Nnedi Okorafor ? Kabu Kabu est son premier recueil de nouvelles, initialement paru en 2013. Grâce à Les éditions de l'instant, ce volume est à présent disponible en français avec une très belle couverture de Katarzyna Widmanska.
Pour ceux qui ont lu Qui a peur de la Mort ?, sachez que votre serviteur n'avait jamais lu les textes de Nnedi Okorafor avant de démarrer la lecture de Kabu Kabu. Et pour être tout à fait honnête, j'ai aussi fait une petite danse de la victoire après la lecture de le Nègre Magique qui ouvre ce recueil, entre deux « oh la vache » et un « pim, dans ta face, trope ». Terriblement jouissif de se faire remettre les pendules à l'heure avec intelligence et humour.
Kabu Kabu est à la fois pertinent sur le fond et sur la forme. Au niveau de la plume de l'auteur, je ne peux que saluer la traduction fluide de Patrick Dechesne qui a su rendre en français, le rythme et la concision de l'auteur. Quant au fond, il foisonne. J'ai apprécié que certaines nouvelles se fassent écho entre elles, les récits relatifs à Arro-Yo, tout en étant liées aux autres ouvrages de l'auteur et au monde extérieur. C'est à la fois beaucoup, mais c'est géré avec panache par Nnedi Okorafor.
Nnedi Okorafor ancre ainsi fortement son récit dans la réalité culturelle et politique du Nigeria, mais un monde différent où des araignées surveillent les pipelines et où un homme au bras mécanique défie les autorités pour que cet or noir ne file plus entre les doigts des populations qui en ont désespérément besoin. Puis il y a la guerre avec Biafra et Icône. Kabu Kabu met aussi en exergue la place des femmes, entre aspirations personnelles et poids des traditions dans des sociétés patriarcales comme dans Comment Inyang obtint ses ailes et Les vents de l'Harmattan. Nnedi Okorafor présente aussi au lecteur des créatures et des êtres propres au folklore nigérian et une mythologie à la croisée de l'ancestral et de l'anticipation. Mondes fictionnels – tant SF que fantasy –discussions sur la sexualité, le genre, la politique, l'héritage culturel et les sentiments d'appartenance, tout s'entremêle pour former un tout cohérent qui emmène le lecteur dans un monde différent tout en le faisant réfléchir sur les travers de sa propre société.
Pour les lecteurs familiers de Nnedi Okorafor, Kabu Kabu est fortement lié aux autres récits de Nnedi Okorafor. Ainsi, la nouvelle La tâche noire évoque les Ewu de Qui a peur de la Mort ? alors que Les vents de l'Harmattan est liée à Zahrah the Windseeker. Pour les lecteurs qui, comme moi, découvrent l'auteur, Kabu Kabu est une merveilleuse introduction aux univers et à la plume de l'auteur. Pour autant, si l'on se place du point de vue d'un recueil de nouvelles, il faut néanmoins avouer que le poids de ces univers étendus se ressent dans certaines nouvelles, ce qui fait que le recueil pourrait manquer, pour certains, de la force de recueils où les nouvelles tiendraient debout seules.
Kabu Kabu est un recueil de nouvelles puissant et riche, foisonnant et nourrissant, tant sur le fond que sur la forme. C'est une porte ouverte vers des univers autres, géographiquement et culturellement bien sûr, mais également au niveau des thématiques, des partis pris et des personnages. Nnedi Okorafor s'engage humainement et littérairement. Un Kabu Kabu est un taxi clandestin qui vous emmène là où vous devez aller, d'une façon ou d'une autre, alors même si deux enjambées ne forment pas un chemin, laissez-vous aller à faire ce premier pas et embarquez dans votre Kabu Kabu !


9.0/10
Lien : http://www.elbakin.net/fanta..
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C'est une oeuvre dense réunissant dix-neuf nouvelles qui, par le prisme de l'Imaginaire, explore les nombreux visages de l'Afrique.

Américaine, d'origine Nigériane, Nnedi Okorafor rend hommage à la terre de ses ancêtres et à sa propre histoire à travers la multitude de récits qui viennent nourrir ce recueil.

Il démarre sur les chapeaux de roue en nous embarquant dans un Kabu Kabu, autrement dit un taxi clandestin qui conduit Ngozi dans un étrange périple. Alors que la jeune femme espère juste attraper son vol pour arriver à temps au mariage de sa soeur au Nigéria, elle ne se doute pas des étranges rencontres qui l'attendent. Un voyage au coeur des légendes africaines qui ne sera pas exempt de turbulences. Avec cette première nouvelle, on réalise combien Nnedi Okorafor se plaît à explorer les coutumes et les croyances de ce continent qui s'avèrent propices à tricoter des récits baignés de touches fantastiques.

La magie imprègne autant ses histoires que la culture africaine. Elle aime par exemple doter ses héros et ses héroïnes de capacités hors-normes. Revient, d'ailleurs, souvent celle de voler comme dans "Comment Inyang obtint ses ailes" dans laquelle la jeune Inyang se découvre un destin de coureuse de vent qui lui vaut l'opprobre de son village et finit par l'obliger à fuir. Un don partagé par d'autres personnages comme Asuquo dans "Les vents de l'harmattan" qui vole en secret avec l'espoir caché au fond de son coeur de trouver son chi, son âme-soeur.

Mais Nnedi Okorafor n'oublie pas de nous parler également des grandes blessures de l'Afrique. C'est le cas avec "Biafra" qui, comme ce titre l'indique, va évoquer cette terrible guerre civile qui a ravagé le Nigéria. Ainsi, on survole le pays en compagnie de Arro-yo. Elle retrouve avec effroi et impuissance sa terre natale détruite par une guerre de territoire : inévitable lorsqu'on s'octroie le droit de voler la terre de ses voisins. Une indépendance qui se gagne au prix du sang de milliers d'innocents. Quant à la nouvelle "Popular Mechanic", elle met l'accent sur la surexploitation des terres et des peuples, ainsi que sur le pillage des richesses pour le profit des plus riches, au détriment des locaux.

Finalement, l'autrice s'épanouit dans tous les genres et imagine aussi bien des textes mâtinés de fantastique que de science-fiction. Ainsi, dans "L'artiste araignée", il est question de zombies surveillant les pipelines de pétrole mais qui s'avèrent être en réalité des robots développés par l'intelligence artificielle, capables de rentrer en communication avec l'humain tout en développant une vraie sensibilité artistique.

Avec ce livre, Nnedi Okorafor démontre avec force toutes ses qualités de conteuse. On se glisse dans la peau de chacune de ses héroïnes et de chacun de ses héros avec une grande fluidité. Elle signe des textes qui dégagent une grande sensibilité et réussit à nous tirer bien des larmes... Fantasy à la Carte.

Lien : https://fantasyalacarte.blog..
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Kabu Kabu est un recueil de nouvelles de Nnedi Okorafor, l'autrice du remarqué Qui a peur de la mort.
Si toutes les nouvelles ne sont pas liées, ni exactement du même niveau, c'est l'occasion de plonger à chaque fois dans un univers vibrant, fait de rencontres avec des personnages souvent marquants et portés par une plume très largement au-dessus de la moyenne du genre.
En soi, c'est réjouissant de voir qu'un tel ouvrage puisse être découvert en français, alors que l'offre en littérature SFF demeure bien souvent encore trop semblable d'un éditeur à l'autre.
C'est un ouvrage qui mériterait en tous cas d'être nettement plus visible !
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Adepte régulier des recueils de nouvelles, j'ai retrouvé avec bonheur le goût du conte de Nnedi Okorafor à travers cette visite d'une Afrique aux mille visages.
Je ne connais pas l'édition originale, mais cette réédition chez ActuSF est tout à fait au niveau, en particulier sur le plan de la traduction, qui sait s'effacer derrière la plume de l'auteure.
On passe d'un récit à l'autre avec bonheur, et souvent une certaine gravité. Comment imaginer le contraire après tout ? Il s'agit aussi pour nous d'ouvrir les yeux.
Encore une réussite.
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Le commentaire de Martine :
Une belle collection de nouvelles, des petites histoires fantastiques très intéressantes. Nnedi Okorafor a le talent pour rendre les petits récits fantastiques, très captivants et intrigants. Elle sait bien nous composer des textes avec de la magie, de la sorcellerie, des faits étranges et de l'horreur.
La majorité des nouvelles se déroule au Nigeria, elle a puisé certaines réalités propres à son coin de pays. Mes nouvelles préférées sont : Kabu Kabu, Les vents de l'harmattan, Sur la route, L'artiste araignée, Séparés, et La guerre des babouins. La plupart sont des histoires fantastiques et de science-fiction se déroulant dans des époques historiques différentes.
Nnedi Okorafor met tout son talent et son coeur dans ce recueil, même de son expérience personnelle avec un avocat nommé Ngozi, de Chicago, de filles américaines en visite au Nigeria. Suite à cette bonne lecture, le récit Les vents de l'harmattan me donne le goût de lire sa saga Zahrah the Windseeker.
Lien : http://lesmilleetunlivreslm...
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Kabu Kabu est un recueil de nouvelles qui s'inscrivent dans l'afrofuturisme, parce qu'elles interrogent la situation de personnages noirs, aux Etats-Unis comme au Nigéria, à travers la mise en scène d'univers merveilleux, science-fictifs ou fantastiques.
Les nouvelles de ce recueil permettent également à Nnedi Okorafor de différencier les manières de vivre des personnes noires vivant en Afrique de celle qu'adoptent les afro-américains, en confrontant des nigérians « américanisés » à la culture et à la politique nigérianes.
Chronique complète et détaillée sur le blog.
Lien : https://leschroniquesduchron..
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