Un petit roman bien troussé de ce diaaaaable de Paasilinna le Finlandais.
Un ptit roman bien troussé, petit oui, engouffré en deux-trois jours. J'ai lu tant de pavés à l'écriture tassée, que là on est au bord de la nouvelle.
A priori, c'est du cocasse, avec l'humour finlandais (finnois ?) du cher Arto. Sur le même schéma que "Tueur de dames" film anglais de Mackendrick (1955), revu récemment, une suave dame âgée est aux prises avec une bande de vauriens, et tente d'y survivre avec toute son innocence et sa malice.
A priori.
Au fil des pages, j'ai quand même esquissé une grimace, un peu. La description des trois abrutis totaux au centre du roman, qui détruisent tout ce qu'ils savent, est un cauchemar intégral. Il a la plume burlesque pour les décrire, mais ça sonne trop juste pour qu'on puisse garder de la distance. Avec ces cinglés imbibés, tout y passe : hommes et surtout femmes, animaux domestiqués ou à l'état sauvage, le "principe Attila" sur le végétal, et les biens matériels, ils bousillent, salissent, dévorent tout… y compris eux-mêmes, tellement ils sont cons. Heureusement, Paasilinna ne pousse pas sa férocité jusqu'à y sacrifier des enfants, ouf on reste entre adultes pour se faire du mal.
Ajoutons à ça leur discours victimaire pour se donner bonne conscience, tout est atrocement bien vu. Il est fort Arto, pour décrire la crasse qui remplit ces cerveaux, tellement fort que j'ai trouvé que ça racontait un peu trop notre époque. Les cerveaux puants s'exprimant sur les réseaux sociaux - complotistes, trolls, indignés de tout, dont on pourrait rire, si seulement…. La victimisation comme aiguisage de sabre - désigner des coupables à punir comme cause de tous nos malheurs sans jamais d'autocritique, dont on pourrait rire, si seulement... Et la violence à tous les niveaux - tuer un peuple pour réécrire l'histoire, tuer des gens au nom d'un dieu, tuer pour une cigarette refusée - la violence pour tout régler d'un claquement de doigt, ce qui compte c'est MON plaisir immédiat, c'est MA vengeance. Dont on pourrait rire, comme le fait Paasilinna, si seulement…
Il leur met dans la gueule, Arto. Comme dans
le Potager des malfaiteurs ayant échappé à la pendaison, d'ailleurs. Je ne sais pas où ni comment il a rencontré ces destructeurs à la bêtise insondable, pour les décrire si bien, mais quand il en tient un, dans ses pages, il sort la machine à baffes, et on jubile de ses tours de passe-passe, mais…
ce ne sont que des romans. Autant on peut croiser des Ritta, des Anastase, des Lydia dans la vraie vie, ces personnages secondaires que Paasilinna conte avec bonheur, en gardant la dent dure malgré une certaine tendresse pour les damnés de la terre - qui eux/elles, ne se plaignent pas, tiens,
autant on manque un peu de Supermen-women. Dans la vraie vie.
Un ptit roman paasilinnien donc, délicatement poudré, et secoué de férocité.
NB : j'ai enfin compris que pour la langue parlée en Finlande, on disait le finnois, tandis que les habitants de Finlande sont des Finlandais. Pourquoi cette différence, bizarre.