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sur 275 notes
L'intrigue se déroule dans les années 70. L'inspecteur principal Schneider vient d'être muté dans une petite ville de l'est de la France, au sein du “Bunker” dirigé par “Dieu”. Alors qu'il prend ses quartiers en tant que chef du Groupe criminel, un homme vient signaler la disparition de sa fille Betty, quinze ans. Devant la certitude de ce père qui pense que sa fille est morte, Schneider décide de prendre l'affaire en main.
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Contrairement à tous ces livres policiers qui suivent toujours le même schéma, Hugues Pagan nous emmène plus loin dans son récit. L'enquête principale de ce roman n'en est pas forcément le coeur. Elle est une partie d'un tout, d'une histoire qui évoque plusieurs sujets, donnant à cette oeuvre une dimension plus sociétale, digne d'un roman noir. Un réalisme renforcé par le contexte historique de l'époque, avec la peur encore très présente du communisme et la guerre d'Algérie qui a laissé des séquelles irréversibles.
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J'ai beaucoup apprécié le personnage de Schneider, un type plutôt taiseux, à l'attitude très neutre, presque froide, qui attise la curiosité. Quelques pages suffisent pourtant à détecter la carapace, la sensibilité sous le masque de fer. Un flic comme je les aime, au passé chargé, aux convictions fortes, doté d'un sens moral à l'épreuve des balles. Un flic en qui on aimerait croire, ne serait-ce que pour redorer un peu l'image de la police, qui en aurait bien besoin parfois. J'ai apprécié sons sens de la justice, sa façon d'interroger les témoins, de voir les opprimés et les invisibles, d'accompagner les douleurs, sans paroles superflues ni hypocrisie. Chez lui, pas de réactions enflammées, mais un culte du détachement. “Poker face”, comme diraient les autres. Bien entendu, il y a quelquefois des signes annonciateurs de montée en pression, comme les doigts qui remuent doucement, la “crispation des omoplates, le léger tassement des épaules”, mais généralement étouffés dans l'oeuf grâce à des équipiers prévoyants.
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Un roman qui raconte aussi les coulisses de la police, les rivalités, les hiérarchies corrompues, les comportements déplacés mais aussi les braves gens, investis corps et âme dans leur mission. D'ailleurs, certains s'intéressent à ceux d'en bas, de la prostituée au sdf, allant même jusqu'à s'inquiéter si l'un d'eux vient à manquer à l'appel. Pour eux, ces laissés-pour-compte ont un (sur)nom, un visage, une personnalité. Forcément, cette humanité nous touche de plein fouet, on s'émeut de leur sort, ce ne sont pas de lointaines figures abstraites mais bien des protagonistes à part entière. le titre du roman prend alors tout son sens.
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Par ailleurs, j'ai été touchée par cette façon d'aborder “l'après”. Ici, l'histoire ne s'arrête pas à la résolution de l'enquête, il y a tout le reste, jusqu'à la victime qui reste en tête, la peine et la tristesse de la famille qui laissent leur empreinte. J'imagine que les enquêteurs ne peuvent pas toujours passer à autre chose si facilement. Il arrive que la photo reste épinglée sur le tableau d'affichage un peu plus longtemps, histoire de ne pas oublier.
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Et puis il y a le décor et l'ambiance. “Un commissariat-bunker qui ressemble à un tribunal de commerce délabré où échouent toutes les faillites de la société”, une atmosphère sombre, la fumée des cigarettes, les silences, la mélancolie, un piano qui joue un air de blues. Un roman dans un pur style polar noir, qui m'a définitivement conquise. Je m'attendais presque à entendre une voix-off, à l'instar de ces films de détectives des années 60.
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Avec le carré des indigents, nous ne sommes pas dans un rythme haletant, dans une enquête sous tension menée tambour battant, pourtant, j'ai été captivée jusqu'à la dernière minute. Je n'avais aucune envie de terminer ma lecture. Je voulais rester dans cette ambiance, continuer à suivre ces flics dans le quotidien de leur profession, m'immerger encore dans les pensées de Schneider.
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J'ai frôlé le coup de coeur pour ce polar noir et profond, qui m'a totalement séduite. Cette incursion dans le style d'Hugues Pagan a été une réussite, aussi j'ai désormais l'envie irrépressible de partir à l'assaut de toute sa bibliographie.
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Mon avis sur la version audio :
Dans la version Audiolib, le comédien Cyril Romoli donne le ton. Alors que j'étais déjà tombée sous le charme de sa voix dans “Entre fauves” de Colin Neil, il m'a de nouveau subjuguée par son interprétation. Il excelle particulièrement dans le rôle de Schneider, révélant tout le charisme et la sincérité de ce personnage complexe. Son timbre se prête parfaitement à l'ambiance de ce polar noir. J'ai également été très sensible aux interludes musicaux entre les différents chapitres. Une version audio vraiment très réussie !
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Roman lu dans le cadre du Prix Audiolib 2023.
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Ma chronique complète est sur le blog.
Caroline - le murmure des âmes livres
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Le carré des indigents, l'espace que les cimetières peuvent mettre à disposition des défunts dont les corps n'ont pas été réclamés par la famille, ça ne devrait pas exister.

Pour l'inspecteur principal Claude Schneider comme pour Harry Bosch, tout le monde compte ou personne ne compte.

C'est lui qui paye (en secret) les obsèques d'une dénommée Gloria, morte dans l'indifférence générale. «Personne ne connaissait Gloria, elle avait disparu de longue date de la mémoire des hommes pour entrer dans la triste cohorte de ceux qui ont cessé de compter une fois pour toutes, très au –dessous de la couverture radar » (…) « Schneider (…) se sentait furieux et démuni. Les pauvres n'ont pas droit à de longues oraisons funèbres. Ils n'ont même droit à rien. »

C'est lui qui lance à une jeune femme qui le provoque : «Soyez sympa : oubliez le flic »


Nous sommes dans les années 70, dans une petite ville française. Il n'y a pas si longtemps, Schneider était en Algérie. C'est son quotidien, noir, de jour comme de nuit, que nous conte Hugues Pagan, avec élégance. le sien et celui de ceux qu'il croise. Des personnages secondaires qui ne le sont pas parce que personne ne l'est. Ou parce que nous le sommes tous, cabossés, chacun à notre façon.

Son enquête principale porte sur le triste sort d'une jeune fille, Betty, partie à la bibliothèque et jamais revenue chez son père qui s'occupait d'elle, tout seul. Son corps est retrouvé, elle est morte, sauvagement agressée.

D'autres drames jalonnent la route de Schneider, toujours hanté par la disparition d'une jeune femme, en Algérie. Amertume et tendresse particulière pour elle. de l'intérêt pour chacun. Un homme dans la rue. « Personne n'avait prétendu que la vie de clochard fût un tapis de rose». Un flic ripoux. Une prostituée qui réclame son dû.


Passionné d'arts martiaux (qu'il enseigne) et de piano (qu'il joue sans réussir à désarmer le malheur), Schneider a le blues communicatif, c'est un solitaire à l'écoute de tous sauf de sa hiérarchie. Désenchanté et attachant.


« Puis la pluie se remit à tomber, éparse d'abord, puis monotone et silencieuse, intarissable et sourde comme un chagrin d'enfant ».

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En 1973 dans une ville qui n'est pas nommée, Betty jeune fille de 15 ans à l'air de chaton ébouriffé" disparaît. Schneider inspecteur de la criminelle mène l'enquête persuadé que la jeune fille est déjà morte.
Ce pourrait être un polar de plus mais Hugues Pagan en fait un petit bijou de roman noir.

Il nous plonge "avec l'application d'un entomologiste neurasthénique" (M. Embareck, dans la préface) dans cette ville à l'atmosphère désenchantée peuplée de notables peu sympathiques et de petites gens aux vies banales.
Schneider, son inspecteur, ancien para pendant la guerre d'Algérie, beau gosse élégant au regard gris, bousculé par la vie, désabusé, plutôt taiseux, intègre veut rendre justice aux plus humbles même si cela doit prendre du temps. Il se moque des rappels à l'ordre autoritaires de sa hiérarchie. Il va son chemin escorté d'une equipe de policiers disparates qu'il sait mobiliser pour mener à bien l'enquête.
Par son écriture minutieuse, parfois poétique, ses dialogues percutants Hugues Pagan nous place en immersion dans la noirceur de cette enquête. Nous sommes au plus près. Nous partageons les doutes, les avancées, les temps morts, les reculs, les espoirs et les surprises. Nous nous retrouvons "aux Abattoirs" pour un débrief autour d'un café, d'un ou deux pastis ou d'un plat du jour. Nous pénètrons dans le bunker pour écouter les ordres et subir les sermons de la hiérarchie. Nous partageons avec émotion l'empathie de Schneider pour le père de Betty ancien cheminot si digne dans sa colère et sa douleur.
La scène du repas d'anniversaire de la jeune morte est magnifique, des personnages forts, solidaires, d'une épaisseur touchante, émouvants dans leur douceur, leur bienveillance les uns envers les autres. Quel contraste avec la fin du récit qui nous replonge avec horreur dans la laideur du monde.

C'est beau et c'est bouleversant.
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Je ne suis pas un grand lecteur de romans policiers, je ne sais pas vraiment pourquoi, mais il aurait été dommage que je passe à côté de celui-ci. On est ici dans le polar réaliste : pas de grands effets, d'intrigues alambiquées ou de sectes plus ou moins sataniques, simplement le quotidien morne et désolant d'une ville moyenne de province à la fin des années Pompidou, le genre d'endroit où on est presque certain de tomber sur des connaissances en allant au restaurant. Ce qui distingue Hugues Pagan, outre le fait qu'il sache de quoi il parle, puisque c'est un ancien de la maison, c'est son écriture : de façon assez surprenante, il parvient à mettre une véritable élégance dans sa plume, tout en relatant des faits qui vont du navrant au sordide, et dont on a une sorte de certitude amère qu'ils sont plus qu'inspirés de souvenirs bien réels. Ce carré des indigents se double d'une fine description d'un autre carré, celui des relations entre police, justice, presse et politique, où l'on est toujours proche de la ligne rouge par la force des choses humaines. Proches de la ligne rouge, sans trop bien savoir de quel côté, parfois.

Pour conclure, je me suis régalé, mais c'est un livre qu'il vaut mieux lire de bonne humeur, ce n'est pas lui qui vous mettra le sourire aux lèvres.
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Attention « coup de coeur »
Dès les premières lignes, j'ai été happée dans ce roman !
Une impression de « déjà vu » dans le bon sens du terme : comme si cette histoire me racontait mon quotidien, mon enfance… comme si ce livre me disait « bienvenue chez toi ! »
Tout dans ce roman m'évoque mon enfance : les personnages, leurs dialogues, leur langage, le ton gouailleur, l'atmosphère… avec une intrigue à la Exbrayat, des expressions à la Audiard et une ambiance des films policiers des années 60, …
Tiens, l'impression de voir et d'entendre Lino Ventura une scène sur deux 😊
Mais bon, je ressors de mes pantoufles où ce roman m'a plongée pour vous en dire quelques mots.
1973 : Un flic brisé par sa participation à la guerre d'Algérie, une petite ville de province où il choisit d'aller s'enterrer, …
Pas de grandes explications, pas d'envolées lyriques, pas de phrases péremptoires (pas de phrases du tout d'ailleurs !), Schneider est un taiseux : « Beaucoup trop de mots » ; il fait son job, point barre, plutôt bien d'après ce que l'on dit, sans négligence ni emphase.
Une fillette disparait et son père est vite convaincu qu'elle est morte, assassinée…
Pas de débauche d'hémoglobine ni de meurtres en rafale… mais un seul meurtre qui emporte tout un pan de vie pour quelques personnes
Pas de violence exacerbée, pas de surenchère dans l'horreur… mais la violence d'un quotidien pour de nombreux citoyens anonymes : les « petites gens » comme on dit ☹
Je découvre ce livre au moment où les meurtres sordides d'une fillette et d'une jeune femme « anonymes » secouent la France… et il résonne encore plus justement en moi
Une ambiance lourde, page après page, qui remue le lecteur au plus profond par ce qu'elle a de réel ! Pas de surfait, pas d'emphase, pas d'excès.
Un univers de flics avec des bons et des mauvais côtés, jour après jour, enquête après enquête.
Pendant toute ma lecture, j'ai redouté que la « magie » où m'a plongée votre monde ne disparaisse, comme un soufflet qui retombe… et pas du tout !
Bravo M. Hugues Pagan : avec ce livre, vous avez ouvert une résonnance dans mon coeur dont je n'avais pas conscience et gagné votre ticket pour mon île déserte !
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Schneider est flic. Il est le héros récurrent des romans de Hughes Pagan. A moins qu'il ne soit Pagan, lui-même ancien inspecteur.

Schneider est de retour dans sa région de jeunesse, marqué profondément par la guerre d'Algérie, il est confronté à la disparition d'une jeune fille. Il fait face, avec la haute considération qu'il a pour son travail plus que pour sa fonction, en taiseux mélancolique, handicapé des sentiments, obligé de prendre des trucs pour tenir…

Les indigents.. les laissés pour compte, ceux qu'on ne regarde pas, ceux qu'on chasse de la ville, du regard des dominants… C'est pour eux que Schneider cherche la vérité, il se fout du reste, est craint de sa hiérarchie et avec les femmes, il se contente de laisser passer le train…a défaut d'oublier celle qu'il a perdu.

Hugues Pagan nous noie dans une noirceur lyrique. A la façon des chroniques du 87ème district de Ed McBain, il nous conte le quotidien du Groupe Criminel d'une ville non nommée de l'Est de la France. Il porte un regard triste et désabusé sur ceux qui tirent les ficelles. le style est marqué, aussi mélancolique son héros, entêtant et imagé, un ton qui accroche, ne vous lâche plus jusqu'à une fin douloureuse.

Au final, lire le dernier Pagan est l'assurance de démarrer l'année avec un des meilleurs romans noirs des 11 autres mois à venir. Carrément.
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Waouh quelle claque ce polar bien sombre offert par ma fille.
Un flic comme je les aime, Schneider, revenu dans sa ville natale après la guerre d'Algérie.
Sa première affaire, la disparition d'une fille de 15 ans, Betty, qui n'est pas rentrée chez elle.
Hoffmann, le père, est persuadé que Betty est morte....
Schneider va enquêter.
Ne pas avoir peur des plus de 400 pages. C'est bien écrit, c'est du lourd. J'ai adoré. Je vais livre d'autres livres de Hugues Pagan !
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Mon premier Pagan, et j'ai apprécié cette lecture: au cours des années 70, à la fin des années Pompidou, on retrouve des personnages profonds, et des histoires (il y en a plusieurs enchevêtrées, comme ce doit être le cas dans tout commissariat) intéressantes, la principale qui fait office de "fil rouge" et est le squelette du livre étant sur la mort d'une jeune fille. On s'intéresse aux différents personnages, policiers, hiérarchie, journalistes et autres qui tous ont un rôle dans l'histoire. le "héros", Schneider, est un flic sorti de la guerre d'Algérie, un peu caricatural peut-être dans ses attitudes et sa façon d'être seul bémol pour moi ici.
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Un flic dans la ville

Voilà le genre de polar que j'aimerais lire plus souvent. Un personnage charismatique, une plume qui rend hommage aux grandes heures du polar et une ambiance digne des meilleurs films noirs.

Écartons d'emblée les attentes par rapport à l'enquête. Celle-ci est rondement menée, détaillée et intéressante mais ne recèle aucune réelle surprise. le coeur du roman est ailleurs

Et ce coeur s'appelle Schneider. Ce flic taciturne et intransigeant hante le roman de son regard pénétrant et de ses phrases lapidaires. Habité par sa mission de justice, il ne laisse personne se mettre en travers de son chemin, ni les criminels ni ses supérieurs. Une immense réussite.

Au-delà d'une simple enquête, le récit est surtout celui d'une équipe d'enquêteurs. L'auteur nous plonge dans leur quotidien de flics des années 70, les personnages secondaires sont tout aussi charismatiques que Schneider. Une tranche de vie d'une époque révolue.

Enfin la plume d'Hugues Pagan a trempé dans l'encrier le plus noir afin de retranscrire le plus fidèlement possible les années 70, son argot et la mentalité des protagonistes. le tout avec une classe folle et un sens du dialogue savoureux.

Un polar que tous les amoureux de vieux films noirs devraient apprécier.


Lien : https://culturevsnews.com/
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Hugues Pagan est très très fort !
Si l'on s'en tient à l'analyse de l'intrigue policière proprement dite, à savoir la recherche des coupables responsables de la disparition de la jeune Betty, rien d'exceptionnel.
L'intrigue est certes bien menée mais sans énorme surprise sur le fond.

Et pourtant ce roman vous happe et ne vous laisse aucun répit. Impossible de le lâcher !
Cela tient pour grande partie à la personnalité hors du commun de l'inspecteur Schneider, enquêteur et personnage principal au caractère bien trempé.

Un roman dans lequel les personnages, principaux mais aussi secondaires, sont travaillés minutieusement.
Un roman riche qui, outre l'enquête policière, ne néglige pas un aspect plus personnel de la vie privée de chacun et parvient à toucher le lecteur émotionnellement.

Un auteur que je découvre et que j'ajoute sans hésitation à ma "liste" des auteurs à relire.
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