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Citations sur Oeuvres Poétiques (166)

Poèmes (1899-1996)
INSTANTANÉS


 coquillage abandonné sur la plage de la mémoire,
coquillage qui parle tout seul, coupe d'écume de pierre,
alcôve de l'océan, cri pétrifié ;

 lente rotation de contrées, incendies nomades, subite
paralysie d'un désert de verre, perfides transparences,
immensités qui brûlent et s'éteignent le temps de fermer
les yeux ;

 Le sang bat parmi de hautes herbes de menthe et des
collines de sel, la cavalerie des ombres campe sur les rives
de la lune, roulement de tambours sur le banc de sable
sous une planète faite d'ossements ;

p.612
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VERS LE COMMENCEMENT

VENT CARDINAL


Le présent est perpétuel
Les montagnes sont d'os et de neige
elles sont là depuis l'origine
Le vent vient de naître
                     sans âge
comme la lumière comme la poussière
                                    Moulin de bruits
le bazar tourne fleur solaire
                          timbres moteurs radios
le trot terreux des ânes opaques
chants et plaintes s'enlacent
aux barbes des marchands
haute lueur à coups de marteau sculptée
Dans les blancs du silence
                         éclatent
les cris des enfants
                  Des princes en guenilles
sur le bord du fleuve tourmenté
prient urinent méditent…

p.307
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Arbre au-dedans

FEUX DE JOIE
À un jongleur.
Ils firent du feu en frottant deux bouts de bois sec l'un contre l'autre.
CERVANTES (Persilès).


Comme le temps joue avec nous
au bord du gouffre,
au fil de la nuit
il frotte deux, quatre, six
                       syllabes !
et les laisse s'envoler,
de ce côté qui n'est ni çà ni là.
Soleils, lunes, planètes
tournent, brillent, chantent,
                           disparaissent
comme ce monde dans son double.
                                 Ils reviendront
cette nuit ou une autre,
                       musique
endormie dans la conque marine de la mémoire.

p.535
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Versant est
IMMORTELLE INCARNATE


Frissonnent les jardins enlacés
les arbres joignent leurs fronts
chuchotent
         Le jour
brûle encore en mes yeux
Heure par heure je le vis glisser
large et heureux comme un fleuve
ombre et lumière enlacées ses rives
et ce jaune remous
une seule intensité monotone
le soleil figé en son centre
                     Gravitations
oscillation de matière impalpable
blanches démolitions
assemblées de l'écume nomade
grandes montagnes de là-haut
à la lumière suspendues
gloire immobile qu'émiette
un battement de paupières…

p.272
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Mise au net



Extrait 18

Pyramides d’os, pourrissoirs de mots :
nos maîtres sont bavards et féroces.
J’ai dressé avec les mots et leurs ombres
une maison mobile de reflets,
tour ambulante, édifice de vent.
Le temps et ses substitutions :
les années et les morts et les syllabes,
contes différents du même compte.
Spirale des échos, le poème
est air qui se sculpte et se dissipe,
allégorie fugace des noms
véritables. Parfois, la page respire :
les essaims de signes, les républiques
errantes de sons et de sens,
en une rotation magnétique s’enlacent et se dispersent
sur le papier.


/Traduit de l’espagnol par Roger Caillois
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Mise au net



Extrait 6

La femme fut portique
de l’au-delà du perçu et du pensé :
là, au-dedans, vertes sont les marées,
le sang est vert, vert le feu,
entre les herbes noires, brûlent des étoiles vertes :
c’est la musique verte des élytres
dans la nuit originelle du figuier ;
– là, au-dedans, les extrémités des doigts sont des yeux,
le toucher voit, les regards palpent,
les yeux entendent les odeurs ;
– là, le dedans est le dehors,
c’est partout et c’est nulle part,
les choses sont les mêmes et sont autres,
dans la geôle d’un icosaèdre,
il y a un insecte tisseur de musique,
et un autre qui démaille
les syllogismes que tisse l’araignée
suspendue aux fils de la lune ;
– là, au-dedans, l’espace
est une main ouverte et un front
qui ne pense pas des idées, mais des formes
qui respirent, cheminent, parlent, changent,
et qui silencieusement s’évaporent ;
– là, au-dedans, pays d’échos entretissés,
se précipite la lumière, lente cascade,
entre les lèvres des crevasses,
la lumière est eau, l’eau temps diaphane
où les yeux lavent leurs images ;
– là, au-dedans, les câbles du désir
miment des éternités d’une seconde
que l’électricité mentale
allume, éteint, allume,
résurrections flamboyantes
de l’alphabet calciné ;
– il n’y pas d’école là-bas, au-dedans,
c’est toujours le même jour, la même nuit toujours,
le temps n’est pas encore inventé,
le soleil n’a pas vieilli,
cette neige est identique à l’herbe,
toujours et jamais sont la même chose,
il n’a jamais plu et il ne cesse de pleuvoir,
tout est en train d’être et n’a jamais été,
peuple sans nom des sensations,
noms qui cherchent un corps,
transparences impies,
cages de clarté où s’annulent
l’identité entre ses ressemblances,
la différence dans les contradictions.
Le figuier, ses mensonges et sa sagesse,
prodiges de la terre
– dignes de foi, exacts, redondants, –
et la conversation avec les spectres.
Apprentissages avec le figuier :
parler avec vivants et morts.
Parler aussi avec soi-même.


/Traduit de l’espagnol par Roger Caillois
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ENTRE S’EN ALLER ET RESTER

Entre s’en aller et rester hésite le jour,

amoureux de sa transparence.

Le soir circulaire est déjà une baie :

dans son calme va-et-vient se berce le monde.

Tout est visible et tout est élusif,

tout est proche et tout est intouchable.

Les papiers, le livre, le verre, le crayon

reposent à l’ombre de leurs noms.

Battement du sang qui dans ma tempe répète

la même syllabe têtue de sang.

La lumière fait du mur indifférent

un théâtre spectral de reflets.

Dans le centre d’un oeil je me découvre ;

il ne me regarde pas, je me regarde dans son regard.

L’instant se dissipe. Sans bouger

je reste et je m’en vais : je suis une pause.
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Le Feu de chaque jour/Configurations

TROWBRIDGE STREET


2

Je suis dans une chambre désertée du langage
Toi dans une autre chambre identique
Ou tous les deux
dans une rue que ton regard a dépeuplée
Le monde se défait imperceptiblement
                                     Mémoire
démantelée sous nos pas
Je m'arrête au milieu de cette ligne
non écrite

p.445
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Arbre au-dedans

VENT, EAU, PIERRE
                  À Roger Caillois.


L'eau perce la pierre,
le vent disperse l'eau,
la pierre arrête le vent.
Eau, vent, pierre.

Le vent sculpte la pierre,
la pierre est coupe de l'eau,
l'eau s'échappe et elle est vent.
Pierre, eau, vent.

Le vent dans ses tours chante,
l'eau en marchant murmure,
la pierre immobile se tait.
Vent, eau, pierre.

On est un autre et personne :
entre leurs noms vides
passent et s'évanouissent
eau, pierre, vent.

p.520
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Arbre au-dedans/AU VOL
CALME


Lune, sablier :
la nuit se vide,
l'heure s'illumine.

p.513
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