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Avant-propos
J'ai enfin sorti de ma pile à lire le Songe d'Adam ! Je l'ai lu le mois dernier, mais j'ai dû faire passer l'écriture de chroniques pour services de presse avant, aussi j'espère en avoir gardé suffisamment d'essence pour lui rendre à son tour un retour. Globalement, ce fut une excellente lecture, je déplore quelques clichés à l'horreur dirons-nous, et certains éléments pas suffisamment exploités à mon goût. Toutefois, il s'agit du premier roman de l'auteur, depuis, deux autres sont parus, toujours aux Éditions de l'Homme Sans Nom (HSN), et je compte bien me les procurer !
Remarque : l'auteur semble avoir changé de pseudonyme, je possède l'édition mentionnant John Ethan Py, mais les versions plus récentes portent le nom de Sebastien Péguin, je garderai donc ce dernier dans cette chronique.
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Mon retour
Un mélange de fantastique, d'horreur et de thriller
Il se passe d'étranges phénomènes à Gottenberg, Allemagne. Des chasseurs tués par un animal impossible, des lettres du poète Novalis volées à la bibliothèque, une route en forêt qui n'existe sur aucune carte, un cerf mutilé mais vivant qui rôde… Dans ce panel, la plus étrange demeure dans doute la Forêt-Noire elle-même, elle qui parait vivante comme un animal…
Alors qu'Hugo et sa fille Morgane viennent s'installer dans un chalet de la forêt pour plusieurs mois, le temps que le premier finalise sa thèse à propos de Dionysos, à renfort des ouvrages de la bibliothèque de Gottenberg, ils sont très loin d'imaginer les découvertes et les horreurs qu'ils feront.
La thèse d'Hugo va faire montre d'infinitésimales ramifications qui l'emmèneront toujours plus avant dans la mythologie germanique. de Dionysos à la comptine d'un cauchemar de Morgane, tout se relie. En effet, Dionysos, le dieu « verdoyant », est un dieu ressuscité, et le vers poétique conduit à la légende de Johannes et de l'arbre des morts, un arbre divin qui ressuscite les morts.
Telles sont les lignes conductrices du premier roman de Sebastien Péguin, un mélange de fantastique, d'horreur et de thriller. Amené ainsi, cela semble « simple », mais en réalité, l'auteur démontre d'une érudition plaisante à travers les échanges entre divers personnages. Les mystères de ce puzzle se révèlent un à un. À l'image des protagonistes, nous avançons progressivement, vers le coeur de la Forêt, et à chaque pas, la réalité se dilate, l'horreur surgit.
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Hugo, thèse envahissante et fantôme
Les deux protagonistes principaux sont Hugo et Morgane. Toutefois, leur relation s'effiloche à mesure que le temps passe. Car le père est plus accaparé par sa thèse, il est très peu présent pour sa fille. Même lorsqu'il croit être là pour elle lorsqu'elle lui demande d'enquêter sur la bribe d'une comptine tout droit échappée d'un effroyable cauchemar, cela va au contraire l'en éloigner davantage car il va déboucher sur un nouvel axe pour son travail de recherches.
En ville, Hugo côtoie assidument la bibliothèque. Autrefois église, cette incroyable bâtisse a été rénovée de telle sorte qu'elle a pour surnom le « chêne », en effet, elle a des airs d'arbres ; ce qui est loin d'être sans profonde signification.
Hugo s'entoure d'Annah, documentaliste, de Rémi, un pasteur, mais aussi d'Abigail pour avancer dans ses recherches qui ne cessent de s'étoffer à chaque conversation. Il se lie d'amitié avec Rémi, tous deux partagent un sombre passé, celui du décès de leur épouse. Hugo ne parle jamais de Mélanie à Morgane, et, phénomène étrange, les traits de la mère se superposent régulièrement à ceux de sa fille qui lui ressemble tant. Plus inquiétant encore, le fantôme de son épouse accompagne toujours Hugo, ils dialoguent régulièrement, au point qu'il la conjure en se récitant la descente d'Orphée dans le royaume d'Hadès pour retrouver Eurydice.
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Morgane, frénésie et catharsis créatrice
Vous vous en doutez, pendant ce temps, la jeune Morgane, quinze ans, reste toute seule au chalet. Elle fait école à la maison. En arrivant ici, elle pensait s'y plaire, faire moults dessins et croquis pour monter un dossier afin d'intégrer une école d'arts, mais elle va au fur et à mesure des jours être prise dans le tourbillon d'une catharsis créatrice. En effet, Morgane va très vite redouter la forêt, elle la perçoit comme un animal prédateur. Son effroyable cauchemar ? Une créature à la tête de bouc anthropomorphe qui s'est introduite dans sa chambre la nuit, et qui l'a violée… Cauchemar, vraiment ? Alors d'où sortiraient les marques de strangulation autour de son cou et les autres ecchymoses sur son corps ?
Son père l'enjoint de consulter un médecin, un psychologue, mais elle s'y refuse. Hugo a vu les meurtrissures sur le corps de sa fille, pourtant, pour l'aider, il sa faire des recherches sur la comptine que récite Morgane, souvenir de son cauchemar.
L'ambiguïté de Morgane s'accentue suite à cet évènement traumatisant. Non loin du chalet, elle va faire d'une clairière de sable désaffectée son terrain de jeu. Elle va libérer son côté sauvage tout comme sa frénésie créatrice. Elle invente des runes, développant un langage, trouve un arbre totem, déniche une arcade végétale qui semble donner sur une autre partie de la forêt. Dans ses carnets, son écriture devient quasiment automatique, elle trace ses mots, tels des sortilèges et autres incantations, dans des tourbillons labyrinthiques. Elle va jusqu'à hisser un contour de porte aux effroyables gardiens auréolés de symboles végétaux, pour la protéger. Car le bouc n'est pas le seul monstre, il y a le cerf, le cerf anthropomorphe lui-aussi mutilé, qu'ils ont failli renverser, son père et elle, lorsqu'ils sont arrivés au chalet, sur une portion de cette route qui n'existe sur aucune carte.
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L'arbre qui cache la forêt
La Forêt est très mystérieuse, mais empreinte de sombre magie, d'entités malfaisantes et malsaines. Tout autour du chalet de Hugo et Morgane, elle semble les narguer. Il arrivera même un moment où Morgane ne sortira plus, sa peur de la forêt trop débordante pour pouvoir la contenir ; elle cherche à l'exorciser. Les autres individus en contact de la forêt sont celui leur loue le chalet et ses deux fils, des jumeaux. Pourtant, ils semblent en savoir plus qu'ils ne veulent le laisser paraître, et le premier fouille l'avancée des recherches de Hugo lorsqu'il est absent et que Morgane joue dans la clairière.
Qu'est-ce qui est réel ou non ? le fantastique distillé nous détourne sans cesse d'un choix entre réalité et paranoïa. Si le cauchemar de Morgane lui a laissé des marques sur le corps, son père n'a pas senti l'horrible odeur de bouc qui régnait dans sa chambre. Les chemins abandonnés sont peut-être des sentiers mystifiés. le mythe de l'arbre des morts n'est sans doute que cela, un mythe. Mais alors pourquoi de nombreuses traces historiques y sont rattachées ? Et pourquoi Novalis a-t-il participé à cacher une partie des incantations permettant d'accéder à l'Arbre ?
La vérité, c'est qu'Hugo ne croyait pas en l'existence formelle de l'Arbre. Pourtant, tout concorde en sa réalité. Et cela va bien au-delà de tout ce qu'il pensait. En effet, lui qui ne croit plus en Dieu suite au décès de son épouse Mélanie, il va se rendre compte que sa thèse le mène justement sur le chemin de la théologie. Dionysos, le dieu ressuscité, le mythe originel germanique autour du logos (le Verbe), la figure de l'arbre enracinée dans l'identité germanique (« germe »), l'arbre du savoir (la bibliothèque surnommée le « chêne ») qui renvoie littéralement à l'expression « L'arbre qui cache la forêt », mais aussi à l'arbre du Jardin d'Éden, ou encore à Yggdrasil, l'arbre d'Odin (mythologie nordique).
Hugo et Rémi sont-ils sur le point de vivre une expérience divine ?
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Promenons-nous dans les bois… pendant que les loups sont là
Hugo et Morgane sont un duo dysfonctionnel. Ils vivent ensemble mais ne se comprennent pas, ils avancent chacun sur une ramification qui les conduit irrémédiablement sur la même piste. La mort de Mélanie creuse un gouffre entre eux deux, un gouffre qui s'agrandit par les absences répétées d'Hugo, la solitude qu'éprouve de plus en plus Morgane, témoin de l'abominable nature cachée de la forêt.
La monstruosité, l'horreur du récit, prend les traits d'une natur horror, à travers la forêt elle-même, mais aussi par le biais de ces sombres entités anthropomorphes, des erreurs de la nature. La nature et ses entités malveillantes sont des prédatrices. Protègent-elles l'Arbre ? Si Morgane arrive un minimum à s'en préserver grâce à ses incantations artistiques, pourquoi n'attaquent-elles pas Hugo ?
Alors qu'Hugo et Rémi se rapprochent de l'Arbre, des suicides (?) effroyables ont lieu. Les convictions de Hugo sont ébranlées ; sera-t-il prêt à aller jusqu'au bout de ses investigations ? C'est lui qui arpente les chemins cachés de la forêt, qui touche au plus près de son souffle antédiluvien, comme s'il était mis à l'épreuve. Tandis que Morgane est une proie de la Forêt cachée.
La cathédrale végétale, les chemins perdus, l'arcade végétale, l'ancienne carrière de sable qui semble saigner à cause de sa couleur, le dieu « verdoyant », le dieu ressuscité, Jésus ressuscité, Yggdrasil, l'arbre de la connaissance interdit à Adam et Ève, les créations de Dieu, les divinités qui ne peuvent apparaître sous leur réelle forme aux yeux des mortels sous peine de les rendre aveugles ou de les tuer… La terre et le divin sont dissociés, comme Hugo et Morgane. le lien de Mélanie sera-t-il assez fort pour ne pas qu'ils se perdent l'un l'autre ?
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Ce qui m'a fait grincer
Je me suis assez reconnue dans la frénésie créatrice de Morgane : à une époque je gribouillais des notes dans un carnet dont certains mots faisaient écho ou étaient le point de départ de croquis dans un cahier de dessin. Morgane est attachante au début, puis les évènements la détachent du cadre donné ; elle devient un genre d'enchanteresse, à déclamer ses poèmes dans la clairière abandonnée. La Forêt et ses entités sont dures envers elle, elle est leur proie.
Dans cet aspect, je déplore le cliché de la vierge (Morgane a 15 ans), qui est sexuée (le sang des règles, le regard gêné de son père qui constate que son corps change). Elle n'est entourée que d'hommes, même si elle rentra visite avec Hugo à Abigail. le bouc anthropomorphe la viole dans son supposé cauchemar, à une autre rencontre, il a une érection. Tout est malsain : c'est un mélange de pédophilie, de prédateur sexuel qui est un animal anthropomorphe... J'ai trouvé inutile d'en arriver là, c'est comme si ces entités (il y aussi le cerf) cherchaient autre chose que leur rôle apparent de gardiens de l'Arbre, et donc que cela n'apportait tout bonnement rien à l'intrigue. du gore pour du gore en somme, pour un cliché de l'horreur à tendance misogyne , qui prend les femmes pour des objets, qui se répète.
Alors oui, Morgane démontre d'une certaine force, suffisamment pour amorcer une catharsis. Mais cela n'est pas mis suffisamment en avant si l'auteur souhaitait arguer là-dessus. D'autant plus que Morgane n'est pas cru lorsqu'elle parle de son viol, soi-disant cauchemar, à son père, alors qu'il a VU les marques et ecchymoses sur son corps dénudé.
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En bref : Avec le Songe d'Adam, Sebastien Péguin signe son premier roman, un mélange de fantastique, d'horreur, de thriller sous fond d'un antédiluvien mythe germanique. L'auteur fait montre d'une écriture rigoureuse et soignée, à mon sens perfectible, en même temps qu'une érudition plaisante : c'est une profondeur bienvenue !
Références historiques (tel le poète Novalis) et mythologiques (germaniques, scandinaves, chrétiennes) ponctuent le récit, amenant pièce après pièce de ce vaste puzzle. Ce qui offre une ramification très intéressante à la fois au récit comme à l'évolution de l'intrigue et des personnages.
Le roman apporte de nombreuses réflexions théologiques (Dionysos/Jésus, Yggdrasil, l'Arbre de la connaissance d'Adam et Ève), mais aussi sur la création et la catharsis qu'elle peut produire, la recherche de la connaissance/de la Vérité. Tout en traitant également du deuil, de la cruauté, de la solitude, de l'érudition.
Si l'Arbre des morts existe, n'est-t-il pas pure folie que de vouloir le trouver et, pire, chercher la preuve de son pouvoir de résurrection ?
Vous ne verrez plus jamais la forêt ni les mythes de la même manière !
Lien : http://maude-elyther.over-bl..
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Ce roman me laisse sur 2 impressions complètement différentes!

J'ai adoré la plume! Elle est vraiment agréable, soignée, dynamique et très fluide. Les enquêtes et les recherches du personnage principal, Hugo, sont passionnantes ! Tout au long du récit, on est plongé dans les légendes allemandes, la mythologie et la religion. C'était super intéressant ! Et cette ambiance sombre et secrète de la Forêt Noire est angoissante à souhait!

Mais d'un autre côté, même en sachant que je me lançais dans une lecture fantastique et horrifique, j'ai été saisie et dégoûtée par des scènes très gore, beaucoup trop détaillées et trop imagées à mon goût ! Pour l'une d'elles, j'ai été forcée d'arrêter ma lecture tellement j'avais des haut-le-coeur ! J'aurais préféré être prévenue... Un petit mot en première page aurait été le bienvenu!

En conclusion, si vous aimez les histoires sanglantes et horrifiques très bien écrites, ce livre est fait pour vous. Mais si vous êtes un peu sensible, il vaut mieux vous abstenir!
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