J'avais dans ma maison trois chaises : une pour la solitude, deux pour l'amitié, trois pour la société.
C’est une croyance du bouddhisme. L’un des états de l’homme dans Roue de la vie. Plus on mange, plus on a faim. Cette vie est considérée comme la pire de toutes. On essaie de remplir un trou qui ne cesse de se creuser. Le remplir avec de la nourriture, ou de l’argent ou du pouvoir. Avec l’admiration des autres. Ou autre chose.
Tout le monde dans le bistro savait qui étaient les trois principaux suspects. Tout le monde, sauf les trois principaux suspects.
Après un diner de potage aux concombres et fines herbes, crevettes grillées, salade de fenouil et tarte aux pêches, Gamache et les Brunel s'installèrent dans le séjour bien éclairé de l'appartement situé au premier. Les murs étaient couverts de bibliothèques. Des objets trouvés étaient posés çà et là comme éléments décoratifs : des morceaux de vieilles poteries, des tasses ébréchées. C'était une pièce agréable, où il faisait bon lire, bavarder, réfléchir, rire.
-- Mais, monsieur, je suis un violoneux, pas un violoniste.
-- Quelle est la différence?
Morin hésita.
-- Il n'y en a pas vraiment. En tous cas, pas dans les instruments. Mais le son, lui, est différent. Mon père disait toujours qu'un violoniste fait chanter le violon tandis que le violoneux le fait danser.
Le bistro avait été son bébé, sa création. Il y avait mis tout ce que son monde contenait de bon : ses plus belles antiquités, ses meilleures recettes, de grands vins.
Mais il était impossible de se cacher de sa conscience.
Pas dans de nouvelles maisons ou de nouvelles autos. Pas dans les voyages. Ni dans la méditation ou l’activité frénétique. Pas dans les enfants ni dans les bonnes œuvres. Ni sur la pointe des pieds ni à genoux. Pas dans une brillante carrière. Ni dans une petite cabane.
Quoiqu’on fasse, notre conscience nous trouve. Le passé refait toujours surface.
Dans le travail d’enquête, c’était la partie qu’il aimait le plus, et aussi celle qui l’effrayait le plus. Pas le suspect coincé prêt à tuer. Mais la possibilité de tourner à gauche quand il devrait tourner à droite. D’écarter un indice, d’abandonner une piste prometteuse, ou alors, pressé de conclure une affaire de négliger une piste.
Non, il devait avancer prudemment maintenant. Comme tout explorateur, il savait que le danger n’était pas de tomber d’une falaise, mais de se perdre complètement. De se laisser embrouiller, désorienter par trop d’informations.
En fin de compte, la solution d’une affaire de meurtre était toujours extrêmement simple. Elle était toujours là, évidente. Cachée parmi les indices, les mensonges et les fausses impressions des enquêteurs. p.375
Quoiqu’on fasse, notre conscience nous trouve. Le passé refait toujours surface.
détruire une amitié possible. (...) C'était comme passer un clou rouillé sur quelque chose de beau. Et de rare.