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Il y a parfois des rencontres littéraires exceptionnelles. Bonheur fantôme d'Anne Percin est assurément l'une d'elles..
Pierre, 28 ans, a choisi de venir se perdre dans la Sarthe, il a trouvé une maison en bordure de la départementale qui relie La Flèche au Mans. Il y est seul mais il l'a choisi. Il vivote mais peu lui importe. Entre les animaux qu'il récupère , son activité de brocanteur, la boutique, les marchés et brocantes et Paulette sa voisine , il ne voit pas les journées passer mais les nuits par contre tout lui revient en pleine poire.
Parce que Pierre est un écorché vif . La solitude il fait avec mais la tristesse et la mélancolie ça lui colle à la peau.
Alors il a fui croyant échapper à ses fantômes mais ils sont toujours là , les disparus, les absents, l'amour de R...
Il hurle , mais personne ne l'entend:
"Contrairement à Rosa, je n'ai rien à mettre entre moi et le
monde. Alors, pour ne pas me le prendre en pleine figure, j'ai voulu effacer en moi ce qui faisait une tache.
le trou noir de la mort d'Éric : ne plus en parler. Comment j'ai vécu huit ans avec l'espoir de mourir comme lui, dans un accident : à ne pas raconter. Les tentatives de suicide de ma mère, les miennes, sa dépression chronique, mon anorexie :tabou. Jusqu'à l'amour dévorant, délirant, que je cache même à celui qui en est l'objet, pour ne pas l'effrayer… Tout cela est classé confidentiel. Secret défense.
(...) Je suis seulement quelqu'un qui s'écoute, comme dirait Paulette. " p 134.

Mais Pierre serait il Pierre sans la magie d'Anne Percin? J'en doute. Anne Percin trouve les mots, l'enchainement des situations, brosse le portrait de Rosa Bonheur, cette artiste du XIXè qui a su imposer son mode de vie et affronter imperturbable le scandale . Anne Percin sait s'un rayon de soleil illuminer une journée, sait redonner vie à celui qui allait vers le néant et insuffler à Pierre l'énergie nécessaire pour s'affirmer et Vivre .. Chapeau bas Madame
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Un grand texte merveilleusement bien écrit.
C'est une belle littérature : j'adore le style très fluide, la narration fleuve qui s'écoule et dont on suit le court avec plaisir. Ce personnage masculin est très bien brossé, il est dépeint dans ce qu'il a de plus complexe et l'on oscille entre son désenchantement et quelque chose de lumineux qui n'est pas de l'espoir mais qui pourrait bien en être.
Le propos est intelligent, fin, subtil et optimiste in fine. C'est un texte qui fait grand bien !
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Vous pouvez lire « bonheur fantôme » après « point de côté » ou mieux avant si vous voulez respecter la chronologie...
La façon dont l'auteur parvient à incarner Pierre, ses états d'âme, ses hésitations et ses aspirations est tout bonnement hallucinante.
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Je me doutais que ce serait assez contemplatif. Je me suis donc préparée à cela avant de me lancer pour ne pas avoir la sensation de passer à côté. Je vous invite d'ailleurs à lire l'extrait que j'ai laissé en fin d'article pour vous faire une idée du style et du ton de ce roman qui plaira ou agacera.

Nous faisons la connaissance de Pierre, notre narrateur, alors qu'il vit dans la Sarthe, coin plutôt perdu, lui, qui vivait précédemment à Paris. Il tente de raconter son parcours (sa fuite plutôt) tout en évoquant ces autres dont il aime tant décortiquer la vie. Notamment celle de Rosa Bonheur, dont il tente d'écrire la biographie. Brocanteur à ses heures, sa vie est rythmée par une ambiance rurale plutôt lente.

Je ne vais pas vous conter de long en large ce qui s'y passe. C'est assez détaillé et pas glamour par moment : je pense notamment au dépeçage du lapin. Mais quiconque aime les détails et s'agace de ne pas en trouver assez saura satisfaire ses attentes.

L'ensemble est parfois poétique, parfois philosophique puisque Pierre prend du recul sur sa vie : il n'est pas parfait, n'a pas d'explications sur tout mais cela donne un récit « tranches de vie » duquel transparaissent les émotions avec une certaine rudesse et justesse.

J'ai eu d'énormes difficultés à lire ce roman. Les quarante premières pages ne m'ont fait ni chaud ni froid mais vers la centième page, j'ai commencé à me sentir bien et à apprécier ce que Pierre avait à partager.

Il y parle d'amour, de famille, de solitude, de liens entre individus, de mort, d'oubli. Je ne sais pas bien ce qui ressort du lot, si ce n'est cet amour imparfait qu'il partage avec R. et qui est vibrant d'énergie positive comme négative, de quelque chose poussant aux questionnements existentiels, tout comme la mort prématurée de son jumeau qui a forgé sa manière d'aborder la vie.
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Les personnages poursuivent seuls leur chemin. C'est leur histoire à eux. Douloureuse, puissante et magnifique à la fois. A fleur de peau. Faut-il passer par là ? Ecorchés de la vie et si vivants. Les carapaces éclatent, les corps exultent et... l'on pourrait ajouter un poème de Prévert, "Presque" car dans cette histoire, il est aussi question de Rosa Bonheur, de l'affirmation et la quête de soi, et d'amour. Beau, fort, brut.
Et merveilleusement écrit.
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Un roman sur l'amour gay (pas gai), le narrateur a quitté son amant, ils s'aiment toujours, mais le narrateur est assez torturé et s'exile à la campagne comme brocanteur, sa sexualité ne pose pas problème pour les personnes qu'il côtoie." le sésame des campagnes, « Tant que ça ne dérange pas » (p. 35), n'est qu'un reflet de la pudeur"
Une introspection torturée en 240 pages, mêlées de considérations littéraires, picturales et scripturales.
C'est bien écrit, assez facile à lire lorsqu'on est dans le mode adéquat et qu'on ne craint pas la neurasthénie …
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Pierre, jeune homme de 28 ans, veut changer de vie et décide de tout plaquer. Il quitte Paris pour aller s'installer dans une petite ville isolée dans la Sarthe, loin de tout, de sa famille, ses amis. Par petites bribes d'informations distillées tout au long du récit, Pierre nous raconte les raisons de son départ, cette décision radicale mais qui a muri en lui. On comprend alors peu à peu pourquoi cet homme blessé, meurtri, amoureux, solitaire a voulu partir.
Rapidement, j'ai eu l'impression de connaître Pierre. C'était comme un frère dont on comprend les blessures, son besoin de solitude... Ses mots et ses émotions nous parlent, nous ressemblent un peu. C'est un mélange à la fois de douceur et de tristesse mais aussi de sourires, de rage, de souffrance. Un entrelacs d'émotions qu'on a vécu au moins une fois. Pierre laisse tout derrière lui, quitte à se faire mal, à s'amputer peut-être. Pierre est notre âme solitaire, loin du tumulte du monde, loin du bruit. Loin de son amour aussi pour R., cet homme plus âgé que lui, celui qui le porte, le fait fondre. Pierre, c'est aussi celui qu'on aimerait être sans jamais en avoir vraiment le courage, ce courage de tout faire valser, de changer de vie, d'écouter cette petite voix qui nous dit ‘'ça suffit de vivre en apnée. Il est temps de vivre selon nos convictions, nos aspirations profondes et nos rêves''.
La Fourche, lieu-dit où il s'installe pour devenir brocanteur, est un nom bien trouvé pour raconter le nouveau chemin que Pierre décide de prendre, une nouvelle vie qu'on décide de vivre et qu'on assume parce qu'on l'a choisie. La peintre Rosa Bonheur dont il veut écrire la biographie est comme l'emblème de ces désirs et de cette vie assumée, loin du dictat social. Une vie sûrement plus dépouillée, plus difficile financièrement, à manquer souvent d'argent pour s'acheter même l'usuel. Alors c'est la débrouille qui prime, le troc et l'entraide entre voisins. Socialement, c'est juste un café chez la voisine, quelques moments passés dans le bar du coin ou à la crêperie de Jean-Michel pour arrondir ses fins de mois. C'est apprendre à vivre avec le strict nécessaire, sans le superflu, sans l'inutile. C'est comprendre ce qui est vraiment important. C'est retrouver son corps, par la brocante tout d'abord (les meubles à transporter, les réveils dans la nuit, dans le froid), par l'alimentation moindre, par le travail dans le jardin, les balades dans les champs avec ses chiens.
En termes d'allégorie, ce n'est plus la grande route professionnelle qu'on pourrait fantasmer à Paris. Non, ce petit chemin que Pierre prend, loin de la vie parisienne, c'est un bout de nature, entouré d'animaux (à devoir parfois refaire les gestes des anciens qu'on n'avait plus besoin de faire : la préparation du lapin offert par la voisine, moment drôle et épique !). C'est aussi la liberté, la part sauvage qui est en nous, le plaisir des petits riens, retrouver ses sens. Laisser parler son coeur, l'écouter et peut-être même le laisser pleurer mais pour le laisser à nouveau battre, crier, hurler, vibrer. Et aimer. Trouver un nouveau souffle, de nouvelles envies. Partir pour enfin vivre. Partir pour apprivoiser ses fantômes. Les vivants et les morts. Partir pour renaître. Et goûter à l'essentiel. Un plaisir qui ressemble pas mal à celui que j'ai eu en me plongeant littéralement dans ce roman, comme dans un petit cocon, protecteur et régénérant.
Je ne connaissais pas Anne Percin avant de lire ce roman. Et je remercie cette amie Babelio qui -pour un contexte particulier- m'a conseillée un autre roman de cette auteure (‘'Les singuliers'' que je n'ai malheureusement pas trouvé à ma Médiathèque). Par ce petit billet, comme un passage de témoin, j'espère transmettre à mon tour peut-être l'envie de découvrir cette auteure à la plume tendre et délicate. Un plaisir simple, tranquille, sans fioritures. Un petit moment qui fait du bien.

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Après la lecture de son bouleversant roman" le premier été ", j'avais envie de poursuivre ma découverte d'Anne Percin, connue surtout pour ses oeuvres de littérature jeunesse. Et je me suis tournée vers ce livre, suite au ressenti très inspiré de Latina, merci à elle!

J'ai tout de suite aimé le narrateur, Pierre, sensible, écorché, perdu ,mais plein de ressources cachées, qui ne demandent qu'à s'exprimer. A vingt huit ans, il n'arrive pas à se détacher de ses fantômes, dont je ne parlerai pas, car ce serait déflorer l'histoire. Il l'explique très bien lui-même:" Quand j'aurai dégagé ma route des ombres qui s'y étalent, j'y verrai mieux."

Alors, il quitte Paris et , non sans chagrin,son amour,R, un photographe, pour venir s'isoler dans un coin perdu de la Sarthe, où il exerce le métier de brocanteur.

La solitude, mais aussi les rencontres, l'affection envers les animaux qu'il recueille, le manque cruel de R , vont finalement peut-être l'aider à se trouver, à accepter les ombres qui le cernent et l'empêchent de vivre vraiment.

La dernière partie surtout m'a fort émue, l'auteure a vraiment l'art d'exprimer avec des mots simples et justes, poétiques, la détresse de son personnage, en qui on se reconnaît d'une manière ou d'une autre.

Quel plaisir, cette lecture, quel bonheur, et il n'était pas fantôme, celui-là !

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Pierre a le coeur percé. Pierre a peur. Pierre a mal. Mal au coeur, mal à son enfance, mal à l'autre.
Que je l'aime, ce Pierre inventé par Anne Percin ! A 28 ans, il quitte Paris et surtout R....
Il devient brocanteur à la campagne, dans la Sarthe. Sa maison aux quatre vents suinte d'humidité, il ne mange pas grand-chose, mais il a deux chiens, plein de chats, et en tête une peintre dont il veut écrire la biographie : Rosa Bonheur, cette artiste « d'une modestie effarante, dont le monde, c'est la bête ».
Pierre a plein d'amour en lui. Pour ses parents, pour son frère mort il y longtemps, pour R...
Pierre adore chanter, surtout des vieilles chansons. Surtout Mouloudji. Sa nostalgie, sa tendresse.
Pierre est pudique. Bâillonné par des gestes retenus. Par des mots non dits. Par des sentiments qui l'étouffent.

Comment expliquer cet élan qui me pousse vers ce Pierre, sinon grâce à l'écriture si humaine, si poétique d'Anne Percin... de roman en roman, elle m'emmène de plus en plus loin dans la profondeur, dans la recherche de soi à travers les personnages qu'elle invente. D'une manière si simple, si directe, elle décrit la vie et ses souffrances, la vie et ses petits riens qui la font étinceler, la vie et ses joies exaltantes.

Pendant ma lecture, s'est imposée à moi l'image de Pierre Niney, cet acteur si sensible, à l'aspect fragile et pourtant si déterminé. Ceux qui le connaissent comprendront. Eh bien ce Pierre d'Anne Percin lui ressemble étrangement.

Sans hésiter, je recommande ce bout d'humanité à tous ceux qui aiment s'arrêter un moment pour regarder. Soi-même, son chat, son chien, son pommier, les rides de sa mère, le dos voûté de son père, la larme au coin de l'oeil d'un inconnu, les photos jaunies...

« Ces fantômes de sentiments, vaporeux, évanouis, avortés, qui restent entre nous et qui nous étouffent », Anne Percin les libère ici. Et nous libère.
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Pierre a quitté Paris, sa thèse sur Simone Weil, ses amis et le mannequinat pour s'installer à la campagne, faire les brocantes et écrire la biographie de Rosa Bonheur, une peintre féministe du XIXe siècle qui peint des vaches – entre autres. Il a surtout quitté R., cet homme qu'il craignait tant de perdre. Alors, à La Flèche, il vit du minimum : minimum d'argent, minimum d'émotions et minimum de sentiments. Sauf qu'à défaut d'argent, des émotions et des sentiments, Pierre en a à revendre, qui bouillonnent en sourdine sous son crâne et dans son ventre, qui remplissent le vide de rien et le rien d'amour. Dans ce paysage calme peuplé de personnages épars, il apprend peu à peu : à dépecer les lapins et à dompter ses fantômes.

Une quête identitaire en pays sarthois, pourquoi pas. Écrite par Anne Percin, avec plaisir. Au final, un roman haut en couleurs, où pudeur et provocation entrent en harmonie. L'on découvre peu à peu l'histoire de Pierre en même temps qu'il apprivoise son existence. Humour, douleur et douceur parsèment son chemin où le deuil a laissé sa marque, à côté de l'insécurité, du bonheur et des erreurs. Bonheur fantôme porte bien son nom : sous couvert de peu d'événements, c'est le tourbillon d'une vie qui cherche à se vivre.
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