N°736 – Mars 2014.
CLUB DUMAS (ou l'ombre de Richelieu)–
Arturo Pérez-Reverte – le SEUIL.
Traduit de l'espagnol par
Jean-Pierre Quijano
Le prétexte de ce roman est donné par la narration que propose Boris Balkan, un intellectuel spécialiste de la littérature et critique d'art. Il évoque sa rencontre avec Lucas Corso et intervient à plusieurs reprises dans le cours de ce roman en apportant diverses informations notamment à propos des « Trois mousquetaires » et rectifie des erreurs historiques faites par Dumas..
Enrique Taillefer, le célèbre éditeur de livres de cuisine et amateur impénitent de feuilletons du XIX° siècle est retrouvé pendu à son domicile avec pour seule explication de son geste un livre ouvert, un exemplaire bon marché de « Vicomte de Bragelonne » dont une page est soulignée. Corso, « mercenaire de la bibliophilie et chasseur de livres à gage » mais aussi légèrement porté sur le gin, est chargé d'expertiser un manuscrit intitulé « Le vin d'Anjou » qui pourrait être un chapitre inconnu des « Trois mousquetaires » d'
Alexandre Dumas. le document appartenait à Taillefer, l'éditeur défunt. Mais ce n'est pas sa seule mission puisqu'il est aussi chargé par Varo
Borja, un négociant en livres rares dénué de scrupules, d'élucider l'énigme d'un autre volume « Le livre des neuf portes du royaume des ombres » où figurent des planches bien mystérieuses qui, selon la légende auraient été de la main de Lucifer lui-même. Il fut brûlé à Rome avec son auteur, l'imprimeur Aristide Torchia en 1666 sur ordre du Saint-Office. Ce manuel dont il ne resterait qu'un unique exemplaire aurait en effet permis de convoquer le diable en personne ! En réalité il en resterait deux autres exemplaires et Corsa doit les comparer à celui qui lui a été confié ce qui va l'amener au Portugal et en France. Il accepte cette mission un peu à contre-coeur mais contre pas mal d'argent et on attente à sa vie dès sa sortie de chez
Borja. Les ennuis commençaient et les cadavres n'allaient pas tarder à s'amonceler sur son chemin parce que, bien entendu, il n'était pas seul sur cette affaire !
Taillefer, avant de mourir avait vendu son manuscrit au libraire La Ponte et avait dans l'idée d'écrire lui-même et de publier « La main du mort ou la page d'Anne d'Autriche », mais alors pourquoi se suicider ? Par ailleurs le manuscrit « Le vin d'Anjou » refait surface et avec lui le vrai
D Artagnan promu capitaine des gardes en 1667 l'année où l'on brûlait à Rome Torchia et son livre et
Gérard de Nerval, ami de Dumas s'est pendu avec le cordon d'un corsage ce qui n'est pas sans rappeler la mort de Taillefer !
Bien sûr Corso parviendra à déceler les différences existantes entre les livres puisqu'il y en a mais restera à les interpréter et à en découvrir a clé. Il se perd un peu (et le lecteur avec lui) dans les explications potentielles sur le sens des estampes et de leurs particularités à travers les arcanes du tarot, l'exégèse des formules latines qui les accompagnent, les mythes et les mystères qu'elles suscitent avec en plus l'ombre du diable et de la Cabale.
Les allusions au roman de Dumas se faisant de plus en plus nombreuses, on a un peu l'impression d'être dans l'un d'eux et que Corso en est un des personnages, comme l'aurait fait sans doute l'auteur du « Comte de Monte-Cristo » lui-même. D'autre part le manuscrit des Trois mousquetaires qu'il est chargé d'expertiser et le roman des Neuf portes n'ont que peu de rapport l'un avec l'autre mais
Perez-Reverte réussit, à travers la quête parfois périlleuse de Corso, à entremêler les deux oeuvres notamment grâce à son style et à la survenue de nombreux personnages et de situations que n'auraient sans doute pas renié Dumas. C'est donc dans une véritable enquête policière que nous entraîne ce roman, palpitant et mystérieux à souhait avec toujours une somme d'érudition dont on ne peut qu'être admiratif. Pourtant, j'avoue que je me suis un peu ennuyé à cette lecture ce qui pour moi est assez exceptionnel s'agissant d'une oeuvre de
Perez-Reverte.
La fin n'est peut-être pas à la mesure du livre mais au vrai peu importe puisque le suspense invite le lecteur attentif et passionné à tourner les pages jusqu'à l'épilogue. Corso est tellement obsédé par ses recherches que, au cours de celles-ci, il croit rencontrer des personnages de Dumas comme Milady qu'il croit reconnaître dans le personnage de la veuve Taillefer et un inconnu balafré qui lui évoque Rochefort.
J'aime bien
Perez-Reverte mais je dois dire qu'ici, le début m'a paru un peu laborieux. J'ai cependant poursuivi ma lecture mais je ne suis pas entré dans sa démarche créatrice comme d'habitude à cause peut-être des nombreuses citations de l'oeuvre de Dumas dont, je dois bien l'avouer, je ne suis pas spécialiste.
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Hervé GAUTIER – Mars 2014 - http://hervegautier.e-monsite.com
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