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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Publié en 1933 et aussitôt interdit pas les nazis, c'est l'avant dernier roman de Leo Perutz, auteur autrichien d'origine juive, publié de son vivant. Un jeune médecin, Georg Friedrich Amberg, se réveille mal en point dans un hôpital. Les souvenirs qu'il a des cinq dernières semaines écoulées, ainsi que de ses raisons de se retrouver en mauvais état et alité, différent sensiblement du discours qu'on lui tient à l'hôpital : renversé par une voiture, il aurait passé ce temps dans son lit, plus ou moins comateux.

Or Amberg a des souvenirs très précis des événements qui se seraient déroulés dans le village de Morwede, dans lequel il a pris ses fonctions de médecin. le village est régi par le baron von Malchin, un ami du défunt père d'Amberg. le baron a d'étranges lubies et projets : il rêve de restaurer le Saint Empire Germanique, et pour ce faire imagine de se servir de la science, et utiliser une étrange substance, qui pourrait agir sur l'esprit des hommes, et lui permettre de les manipuler. Il est aidé dans ses recherches par une jeune femme, qui a déjà croisé la route d'Amberg et dont il est amoureux. le jeune médecin assiste en tant que spectateur aux menées du baron et de sa collaboratrice, qui n'ont pas forcément les mêmes objectifs. Sceptique et refusant de s'engager, il sera toutefois aux premières loges pour suivre les faits jusqu'aux événements graves et tragiques, dont il sera finalement une des victimes. Mais c'est un tout autre discours qu'il entend à l'hôpital : tous ces événements ne seraient-ils que le résultat d'un délire ? ou certains ont-ils intérêt à cacher ce qui s'est passé à Morwede ?

Nous ne pourrons répondre avec certitude à cette dernière question, chaque lecteur est libre de choisir l'option qui lui convient le mieux, ou de se dire que l'incertitude est inévitable. L'essentiel est dans le tableau halluciné et hallucinant d'une communauté vivant d'une manière rétrograde, dans laquelle un appétit de puissance et de manipulation voit le jour, et rend toutes les atrocités possibles. le village a des allures de cauchemar, à la limite du fantastique et de l'horreur, le roman joue aussi avec des techniques de romans policiers, sans oublier la science-fiction. Mais tout cela est utilisé en permanence par Perutz avec une sorte de distanciation, de second degré. Toutes les pistes sont incertaines et ne mènent à aucune solution solide. L'étrange labyrinthe de l'esprit humain ne semble pas avoir de sortie.

L'auteur crée un univers fantasmagorique, avec ironie et maestria, mais qui en même temps pose des questions qui n'ont rien d'irréel, la manipulation des masses, la façon dont le fanatisme peut se traduire en fonction de la société dans laquelle il émerge, par exemple, sont d'une brûlante actualité, et non seulement à l'époque où le livre a été écrit.

Brillant, dérangeant, frustrant, mais aussi très jouissif et posant plein de piste de réflexion, c'est encore une grande réussite dans l'oeuvre de Leo Perutz.
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Après avoir lu ce livre étonnant, détonant, je me suis aventurée sur les critiques du site.
Et en premier, celle qui est venue en premier, était celle d'Eric... longue, magnifique, sauf que après que dire ? Arrivant en 2021, ma première lecture de cet auteur, fascinée certes par cette découverte, qu'est-ce que je vais pouvoir dire de neuf ?
d'abord j'ai découvert cet auteur par l'éditeur décidément très intéressant,
puis j'avais cheminé chez les auteurs allemands, autrichiens, hongrois, de langue allemande...

Je ne vais pas raconter puisque Eric l'a tellement bien fait
Ce qui est absolument magnifique dans ce roman, jubilatoire, c''est le contraste permanent, entre l'existant et le non existant, entre la réalité et l'inventé ou l'imaginé.
Cette espèce de balance que nous donne l'auteur est géniale.

Ce qui est absolument génial c'est cette vision extraordinaire qu'a l'auteur, sur la mise en place des systèmes totalitaires... on parle souvent de 1984 de George Orwell, mais, beaucoup d'autres oeuvres et antérieures ont alerté sur la mise en place des totalitarismes... la preuve, celle-là.
Une lecture belle et agréable.
Une plongée dans l'histoire de l'Allemagne, histoire qui mérite d'être connue et reconnue.
Une jubilation car primo c'est très très bien écrit et deux, c'est d'un humour sarcastique et à plusieurs degrés.
Bref un vrai moment de plaisir.

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Cela faisait longtemps que je n'avais pas craqué sur l'une des magnifiques couvertures de la maison Zulma, voilà qui est réparé avec la lecture de « La neige De Saint Pierre », de Leo Perutz. J'ai cru avec le titre être emportée sur l'île De Saint Pierre et Miquelon, et bien pas du tout, on se retrouve au contraire enterré dans le fin fond de l'Allemagne rurale d'avant-guerre. Georg se réveille un beau matin à l'hôpital dans un sale état. Ses souvenirs sont un peu brumeux, et ne coïncident pas du tout avec ce que lui racontent les médecins : au banal accident de voiture évoqué, il préfère ses aventures de jeune médecin sur les terres du baron von Malchin…
Je ne le savais pas du tout, mais Leo Perutz est souvent comparé à Kafka : mêmes origines, quasiment même histoire, et mêmes succès littéraires, qui par contre sont plus difficilement parvenus jusqu'à nous. Je ne le comprends pas, car la lecture de ce roman fut pour moi passionnante, jouant tout du long sur la dualité rêve/réalité, et posant la question de la manipulation des populations. A l'aube de la seconde guerre mondiale, inutile de vous dire que les nazis avaient interdit ce livre dès sa parution. Bref, une super découverte (et en plus très bien écrite !).
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Une fable introspective et fantastique en forme d'avertissement contre la manipulation des masses et le totalitarisme.

«Lorsque la nuit me libéra, j'étais une chose sans nom, une créature impersonnelle qui ne connaissait pas les concepts de «passé» et d'«avenir». Plusieurs heures durant, mais peut-être aussi seulement l'espace d'une fraction de seconde, je restai allongé, dans une sorte de torpeur à laquelle succéda un état que je ne saurais plus décrire à l'heure qu'il est. Si je disais qu'il s'agissait d'un état de conscience vague, imprécis, allié à un sentiment d'indétermination totale, je n'exprimerais que de façon imparfaite ce que cet état avait de particulier et de singulier.
Il serait aisé de dire que je flottais dans le vide. Mais ces mots n'ont aucune signification. J'avais simplement le sentiment que quelque chose existait, mais je ne savais pas que j'étais moi-même ce quelque chose.»

Débutant lorsque le narrateur, Georg Friedrich Amberg, émerge du coma, ce roman de l'écrivain autrichien Leo Perutz (1882 – 1957) publié en 1933, traduit par Jean-Claude Capèle pour les éditions Fayard (1987) et réédité chez Zulma en 2016, est placé d'emblée sous le double signe du fantastique et de l'incertitude.

La suite sur mon blog ici :
Lien : https://charybde2.wordpress...
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Voici une découverte récente, un roman que j'ai beaucoup aimé pour son contenu, son époque, son style, et ce qui lui est arrivé.
La Neige de Saint-Pierre est sorti en 1933. Léo Perutz est un écrivain juif né à Prague. Il s'est installé en Autriche à Vienne, qu'il quitte après l'Anschluss (Annexion de l'Autriche par l'Allemagne nazie) pour la Palestine. Il est l'exact contemporain de Kafka, et quand je me suis plongée dans cette lecture, je me suis vite demandée dans quel monde j'étais tombé. Mais on ne va pas aussi loin dans l'absurde et on retombe sur ses pattes en comprenant le message. Quand vous connaitrez le contenu de ce roman, vous comprendrez alors pourquoi, dans ce contexte, il a été interdit quelques mois après la sortie.
Début des années Trente. Georg Amberg est un jeune médecin fraichement diplômé et apparemment peu motivé, recruté par un baron pour soigner les paysans de son village de Morwede après le décès du précédent médecin. Cela, c'est ce dont il se souvient après plusieurs semaines à l'hôpital de la grande ville voisine. Que lui-est-il arrivé ? En cherchant à se souvenir, des bribes reviennent, mais le chirurgien et le personnel lui font comprendre qu'il délire et qu'il est psychologiquement fragilisé après un accident.
Peut-il avoir inventé ce doit il croit se souvenir ? Les recherches scientifiques du baron, la chercheuses ‘'Bibiche'' croisée lors de ses études, la volonté de manipuler les villageois par l'absorption d'une substance, le souhait de voir revenir une ferveur religieuse comme celle qui poussa la population aux croisades médiévales…
Mais sommes au XXes en 1932, et la ferveur populaire qui se réveille n'est plus tournée vers la foi…du moins pas en Dieu…
Peut-il avoir rêvé tout cela ? Délire-t-il ? en a-t-il trop vu ? Cherche-ton à manipuler sa mémoire comme certains manipulent l'Histoire ?
Nous naviguons entre raison et folie, à la lisière de l'absurde et du fantastique.
Le message était clair, trop même, et pour les nazis, ce livre devait être interdit, ce qui fut fait quelques mois après sa sortie.
C'est un auteur dont j'ai désormais envie de découvrir les autres titres.
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