Est-ce que les heures difficiles que je viens de vivre peuvent expliquer l'étonnant renouveau d'un homme de mon âge ? Possible, en tout cas, quel anniversaire, quel feu d'artifice ! Et Astrid en redemande. Enfin repu, je n'ai pas la possibilité de réclamer un temps-mort, elle me couvre de baisers, me lèche à son tour, me dévore, frotte ses seins lourds sur ma poitrine velue, pendant que d'une main experte elle stimule à nouveau mon sexe. Elle le lèche avec la même délectation, la même jouissance qu'éprouve le gamin qui, dans le dos de sa mère, saisit la cuiller en bois encore chaude dans la marmite aux confitures et la lèche goulûment. Je ne suis plus le maître du jeu, si jeu il y a, dans cette explosion de jouissance physique.
Cette jeune femme, une inconnue pour moi il y a trois mois, prend une importance grandissante dans mon esprit. Je n’avais pas connu cette sensation depuis ma rencontre avec… Helène, ma femme, dix ans plus tôt. Hélène ! Un trouble soudain me gagne, n’était-elle pas encore présente à mes côtés l’été dernier ? Après nos vacances plus ou moins réussies en Floride, cette descente aux enfers, brutale, implacable, avec cette explosion virale faisant de ma femme une victime et de moi un… assassin ! Aurai-je droit à une rédemption ? Pourra-t-on me pardonner ? J’en doute. Je suis simplement en sursis, condamné à la fuite perpétuelle.
Ce personnage qui l’a fait rêver est étalé sur son siège, le visage mangé par une barbe de deux jours, les cheveux gras, poisseux ; il porte un survêtement délavé, déchiré, dégageant une odeur pénible de sueur refroidie, ses pieds sont dénudés, sales, couverts d’ampoules. Cet homme dont l’aspect ferait fuir toutes ses copines, qui déclencherait une crise cardiaque à sa mère, cet homme l’impressionne, donne du sel à sa vie.
J'avais couru le matin pour...le plaisir, eh bien, maintenant c'est pour ma survie. Trêve de fatigue, trêve de douleurs, je dois courir, courir, toujours courir… mes jambes sont intactes
Nous avons évité de peu la collision. Incroyable, le seigneur de la forêt d'un côté, moi, de l'autre, un assassin. Comme lui, je dois éviter l'homme. Nous courrons tous deux mais nous ne sommes pas logés à la même enseigne. Je ne pense pas qu'il soit en danger, lui, en juillet je suppose que la chasse est fermée. En ce qui me concerne, la chasse est ouverte, ô combien !
Philippe Le Douarec est l'invité de Philippe Goudé dans l'émission C'est à lire de France 3 Normandie.