Quelle belle découverte! Nous voilà plongés en plein cinéma, en plein road trip parfumé de parties de poker dans les endroits les plus miteux imaginables. Nous y suivons Zach d'un côté et Maxine de l'autre, deux écorchés vifs que la vie n'a pas épargné et qui ont appris à la dure à se débrouiller seuls et à anticiper les dangers grâce à leur don de la manipulation des cartes et au bluff.
Benoît Philippon manie la langue française avec brio et ses assimilations de mots savent nous faire sourire. Les premières lignes nous donnent la mesure: "Le père ne voulait pas que son fils trime comme un con. Faire les trois-huit, compter les fins de mois avant la retraite, compter les semaines avant les vacances, compter les heures avant le fin de la journée. 'Tant qu'à compter, compte les cartes', il lui disait." Une belle entrée dans la matière qui nous happe de suite dans cette histoire pleine de tendresse et de détresse.
Zach a un grand ami, Baloo, un gros ours au coeur sensible et à l'âme justicière, fervent défenseur des femmes et notamment des femmes violées; l'injustice le rend dingue et les salauds, il en fait son affaire à sa manière à lui, du haut de son mètre quatre-vingt-quinze et de sa carrure de monstre. Mais à l'intérieur, c'est un enfant brisé en proie au désarroi qui y loge, après la perte de toute sa famille dans un accident de la route dont il est l'unique survivant..
Maxine, elle, se scarifie un peu plus chaque jour. Elle veut ressentir la douleur quand tout devient insupportable. Elle a connu l'horreur quand elle était une jeune adolescente de 14 ans et aujourd'hui elle joue au poker comme personne et a su accumuler un sacré pactole pour enfin affronter son pire ennemi: son richissime père, dans une ultime partie de poker.
Et il y a le tout jeune Jean, enfant de 7 ans au QI surélevé témoin d'une intelligence hors norme, lui-même victime d'une mère abusive de laquelle Maxine décide de le sauver.
Tous ces destins finissent par se croiser et leurs sensibilités, leurs histoires personnelles et leurs affinités les rapprochent malgré eux et chacun trouvera en l'autre la famille qui lui a tant manqué.
Un très très bon livre, une écriture singulière dont on se régale, n'hésitez pas à découvrir cet auteur, c'est un vrai régal. Pour ma part, "
Mamie Luger" me fait de l'oeil.