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Alexandre Tefenkgi (Illustrateur)
EAN : 9781534320949
128 pages
Image Comics (05/10/2021)
5/5   1 notes
Résumé :
Writer PORNSAK PICHETSHOTE's long-awaited follow-up to the critically acclaimed INFIDEL with stunning art by ALEXANDRE TEFENKGI (OUTPOST ZERO)! Following Edison Harkï, a haunted, self-loathing Chinese-American detective on the trail of a killer in 1936 Chinatown, THE GOOD ASIAN is Chinatown noir starring the first generation of Americans to come of age under an immigration ban, the Chinese, as they're besieged by rampant murders, abusive police, and a world that see... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Immigration contrôlée
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Ce tome est le premier d'une série indépendante de toute autre. Il regroupe les épisodes 1 à 5, initialement parus en 2021, écrits par Pornsak Pichetshote, dessinés et encrés par Alexandre Tefengki, mis en couleurs par Lee Loughridge, avec un lettrage de Jeff Powell, et des couvertures de Dave Johnson. Il s'ouvre avec 25 citations très louangeuses de magazines spécialisés dans les comics, et d'auteurs renommés comme James Tynion IV, Jeff Lemire, Brian Azzarello, Kurt Busiek, Joshua Dysart. Il se termine avec huit pages relatant la réalité de la politique d'immigration des États-Unis vis-à-vis des populations asiatiques. le tome contient également les couvertures alternatives réalisées par Sana Takeda, Annie Wu, Jen Bartel, Dustin Nguyen, Awanqui.

En 1936, à San Francisco, les gens préfèrent penser à l'or plutôt qu'à la porte dans le nom Golden Gate. La réalité est qu'à quelques kilomètres de là, sur l'île de Angel Island, les immigrants chinois sont reçus, parqués dans des baraquements, soumis à un questionnaire de cent cinq questions, et retenus pendant une durée variant de deux semaines à deux ans. Ce jour-là, Edison Hark attend des nouvelles du traitement de son dossier, en papotant dans un baraquement avec Kai, un jeune garçon de douze ans, conçu en Chine et envoyé aux États-Unis pour aider son père blessé, puisque les épouses n'ont pas le droit d'entrer sur le territoire. L'adulte essaye de rassurer le garçon qui a déjà fait un voyage de trois mois pour rejoindre ce pays, et qui attend depuis deux mois des nouvelles de son autorisation de séjourner pour pouvoir rejoindre son père. Deux officiels entrent dans le bâtiment et viennent serrer la main de Hark en lui présentant leurs excuses : ils ne savaient pas qu'il est un ami personnel de Frankie Carroway une des plus grosses fortunes de la ville. Hark les suit, après avoir assuré à Kai que tout finirait par s'arranger, tout en sachant très au fond de lui qu'il n'en est rien.

Quelques semaines plus tard, Edison Hark est revenu le premier inspecteur de police d'origine asiatique, à intégrer la police de San Francisco. Ce jour-là, il accompagne l'inspecteur O'Malley qui interroge violemment un homme chez lui, sous le regard de sa femme, de son fils et de son père. le passage à tabac redoublant de force, Hark se décide à balancer le grand-père : c'est un drogué, ce que prouvent les marques sur son avant-bras, et sa came est planquée dans le pot de fleurs sur le manteau de la cheminée. L'homme s'enfuit, mais l'inspecteur l'atteint dans le dos avec un fer à repasser et il finit dans le panier à salade. O'Malley le remercie tout en utilisant un langage perclus de mots insultants pour les asiatiques. Hark remarque en son for intérieur que son collègue porte un costume de prix, mais mal entretenu, comme s'il se laissait aller. Quelques temps auparavant, il s'était rendu à la demeure familiale des Carroway, pour y voir le Mason Carroway dans un profond coma sur son lit, et s'entretenir avec son fils Frankie. Ils avaient évoqué leur jeunesse, Edison ayant été adopté par Mason. Frankie lui avait demandé de retrouver Ivy Chen, une servante de la maison, avec qui son père entretenait une liaison. Il pense que sa présence pourrait ranimer son père.

Il s'agit du deuxième récit de ce scénariste, après Infidel (2018) dessiné par Aaron Campbell, un récit d'horreur moderne. Cette fois-ci, Pichetshote a concocté un vrai polar historique. Dès l'introduction, il situe la date de l'action et le lieu : 1936, à San Francisco. Ces deux caractéristiques ne sont pas là juste pour faire genre, ou comme une toile de fond sans épaisseur. le récit se déroule au coeur de la communauté asiatique de la ville, et le récit comprend plusieurs passages sur les conditions d'immigration de l'époque, pour les personnes de cette origine, plus particulièrement en provenance de Chine. le gouvernement des États-Unis avait mis en place une forme de moratoire très sévère, et très discriminatoire. le personnage principal lui-même est issu de cette communauté, ayant été adopté par un riche entrepreneur blanc, ce qui le place à cheval entre les deux communautés. Il souffre de la même discrimination que les autres asiatiques de la part des blancs, et il apparaît comme suspect aux yeux des habitants de Chinatown en tant que représentant de l'autorité blanche, car inspecteur de police. Les auteurs consacrent donc une scène aux conditions d'accueil des immigrants asiatiques à Angel Island. Par la suite, ils mettent en scène le racisme ordinaire, les cabarets florissants de Chinatown, la volonté d'intégration quitte à être plus blanc, que blanc, le trafic de faux papiers, de passeurs plus ou moins honnêtes, d'aide aux épreuves d'Angel Island, le premier central d'appel téléphonique de Chinatown avec ses demoiselles du téléphone. Les pages de texte en fin de tome reviennent sur chacun de ces éléments, avec une chronologie très détaillée sur les différentes lois d'interdiction et de régulation de l'immigration, ainsi que sur le circuit Shop Suey (les clubs avec danseuses) et le central téléphonique. La dimension de reconstitution historique ne se limite donc pas à quelques références habilement intégrées à l'intrigue : il y a une demi-douzaine de pages d'explications en bande dessinée, intégrées. Les auteurs ont préféré le faire de cette manière et le résultat est fluide, sans donner l'impression de subir un cours magistral au beau milieu d'une séquence romanesque.

Ainsi, il s'agit d'un vrai polar : un inspecteur de police qui enquête sur une série de meurtres, trouvant leurs racines dans le contexte historique et social, dans une communauté considérée comme des citoyens de classe inférieure. Edison Hark est amené à interroger des personnes des différentes couches de la société, aussi bien des ouvriers que de riches propriétaires, exerçant différents métiers, des individus d'âge différent, allant d'un jeune garçon à un homme âgé, aussi bien des hommes que des femmes. L'intrigue découle complètement du contexte historique et géographique. Comme à son habitude, Dave Johnson réalise de magnifiques couvertures évocatrices, et expressionnistes, un vrai régal. le lecteur découvre ensuite les dessins d'Alexandre Tefengki : des silhouettes et des objets détourés par un trait encré un peu cassant, un peu anguleux. Des cases un peu aérées. Une forme de simplification des décors. Un usage régulier de l'affranchissement de représenter les arrière-plans. Il est possible que le lecteur regrette dans un premier temps que l'artiste ne réalise pas des planches dans une veine plus détaillée, que la reconstitution historique ne soit pas plus précise, plus descriptive. D'un autre côté, les cases ne sont pas vides, et la narration visuelle est fluide et claire. Les personnages sont toujours immédiatement identifiables, les lieux sont toujours présentés et assimilables.

Le lecteur plonge dans une véritable enquête criminelle constituant l'intérêt premier de la lecture : le scénariste ne l'a pas sacrifié au profit de la reconstitution historique. le premier crime est horrible, avec un cadavre que les asticots ont déjà bien commencé à bouloter. le scénariste s'amuse avec un tueur en série qui manie la hache, et qui semble être le retour d'un exécuteur du milieu du crime organisé, n'ayant pas sévi depuis des années. L'intrigue implique plusieurs personnes faisant office de coupable idéal, et mène l'enquêteur à revenir sur sa propre histoire personnelle. le scénariste maîtrise sur le bout des doigts les mécanismes d'un polar, et en joue avec élégance et efficacité. Dans le même temps, le lecteur se rend compte que les dessins lui permettent de se plonger dans cette époque de manière satisfaisante. Il se fait la remarque de temps à autre qu'il aurait apprécié une représentation plus photographique, ou que certains visages sont un peu simplifiés. Mais, dans le même temps, la narration visuelle assure sa fonction avec le bon dosage pour ne pas venir compliquer une histoire bien tordue, riche en rebondissements. En outre, le dessinateur varie ses angles de prise de vue, construit de réels plans de prise de vue, joue sur les cadrages, su le nombre de cases, ainsi que leur forme, pour une narration variée et adaptée à chaque séquence, finalement plus élaborée qu'il n'y paraît de prime abord.

Le titre de cette série est sciemment provocateur, renvoyant au principe du bon immigré, sous-entendant ainsi qu'il y en a des nuisibles. le lecteur comprend vite qu'il s'agit de mettre en scène la réalité historique de lois anti-immigration dirigées spécifiquement contre les Chinois. Il découvre que le scénariste s'est autant investi dans cette reconstitution que dans son intrigue. Dans un premier temps, les dessins ne payent pas trop de mine, mais à la lecture, ils font plus que remplir leur office : ils mettent en images l'histoire très riche, sans la faire devenir pesante, tout en apportant une fluidité et une variété remarquables. Les auteurs n'adoptent pas un ton de dénonciation : ils racontent d'abord une histoire dans un environnement historique, social et culturel, très bien rendu. Il ne plaque pas une intrigue prête à l'emploi, mais immergent le lecteur dans un récit entièrement engendré par cet environnement. Ils prennent le temps de faire exister les principaux personnages, à la fois par leur origine sociale et communautaire, à la fois par leurs aspirations personnelles.
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