Sophie Pointurier
roman
Harper Collins Traversée, 2022, 359p
Autant
Femme portant un fusil m'avait troublée, autant ce roman-ci m'a plu, et presque malgré moi. le titre surprend, que peut bien vouloir dire périphérique ? On le comprend d'emblée avec ce couple de peintres, Peter et Petra Wolf, des noms jumeaux, ou mieux encore, un seul nom qui unit le masculin et le féminin, Wolf plaçant l'être double déjà sous l'appel de l'art puisqu'il fait référence à
Virginia Woolf, l'autrice qui a lutté pour l'égalité homme-femme, et à l'école de Bloomsbury.
Ce couple est accompagné d'un autre couple dont l'union est à la fois le signe d'une victoire et d'un vivre-ensemble très difficile, Peter venant de l'Allemagne de l'Est et Petra de l'Allemagne de l'Ouest. Peter est arrivé à l'Ouest un peu avant la chute du mur de Berlin, ou un peu avant cela, en fait la date est entourée d'incertitude, et on ne pourra pas la demander à Peter, parce que Peter n'est jamais là, certes c'est un homme timide, enfermé dans ses problèmes de phobie sociale, mais sa femme doit le tenir caché, c'est une castatrice qui veut le succès pour elle toute seule, car Peter et Petra Wolf ont une cote très élevée, et tout le mérite en revient à Peter, grâce à son énergie, sa puissance, sa vision, d'ailleurs la dimension des tableaux, énorme, prouve que c'est bien un peintre qui en est l'auteur. C'est en tout cas la thèse autoritaire du directeur du Metropolitan de New York qui va organiser une énorme exposition de l'oeuvre des Wolf à la condition expresse que Peter soit présent, et qui va lancer un avis de recherche le concernant.
Commence pour Petra le début des complications.
Elle s'entoure de Vera, l'amie de toujours, une excentrique pour qui vivre, c'est prendre du plaisir, et de Muriel, la soeur de Peter, une femme mariée dont le passé est aventureux.
Ce livre, qui traite de la place des femmes dans l'art, et du traitement politique des oeuvres, on le lit comme si l'on était au cinéma. On voit les personnages, les trois femmes et tous ceux qui gravitent autour d'
elles, le policier, le critique d'art français, les thésards, la journaliste de Vanity Fair -leur allure, leurs traits, leurs mimiques ; on les entend. On entend aussi tous les préjugés sur les artistes femmes. On voit comment une parole dominante et dominatrice bâillonne les autres paroles.
L'enquête est menée brillamment, on a plusieurs regards, c'est drôle, vivant.