Subtile mélange entre
Charles Bukowski et
Montaigne, plus je lis
Rabelais et plus je visualise
Gérard Depardieu en toc de moine vidant ses tripes sur un parchemin.
Il y a des choses à apprendre parmi ces ordures, tout n'est pas à jeter, il faut juste avoir la patience de trier et un estomac d'acier. Par exemple, vous apprendrez que l'humanisme est né en même temps que l'invention de l'orgie-barbecue. En effet, l'étincelle qui a enflammé tous les grands esprits européens était couverte de fange à la naissance et avait pour cordon ombilical des viscères de porc entortillées en saucisson.
L'auteur badigeonne le cul des nobles, des clercs et des chevaliers avec du sang de mouton et procède à un véritable festin de fesses teintes pendant 200 pages. Un régal et une indigestion, de belles idées trainées dans la boue, de bonnes intentions enrobées d'injures,
Rabelais voulait simplement transmettre ses idées au peuple, à la multitude.
Or, trêve d'illusion, encore aujourd'hui, si l'on veut qu'un message passe partout, il faut taper dans le scandale, se souiller dans la vulgarité ou faire rire un bon coup. Raison pour laquelle le commun des mortels n'a pas lu
Proust et
Châteaubriand. Moi y compris d'ailleurs ! Je me réserve ce plaisir pour plus tard. Comme
Gargantua, je me conchie dans les lectures inutiles, je me nettoie les fondements de savoirs abrutissants avant de prendre l'Elebore d'Anticyre (sérum d'oubli) et de consacrer mon temps et mon attention à la voûte céleste et aux idées éternelles.
En prenant un peu de distance avec le récit, on observe presque la transition du Moyen-âge aux Lumières à l'échelle de l'oeuvre elle-même. Au début, le bon gros géant suit une éducation absurde et intoxicante. Puis, au fur et à mesure, il adopte un style de vie bien plus moderne qu'aujourd'hui. On apprend pour finir comment estoit le « manoir des Thelemites », un camp de vacance mixte un tantinet utopiste de bels gens, gentils et bien éduqués qui se tiennent par la main, s'instruisent sagement le jour et se promènent la nuit en jouant à touche-touche dans les arbres fruitiers, dans des habits sertis de rubis et diamants. Mais pour ne pas trop rentrer dans l'utopie,
Rabelais a prévu pour ses quelques privilégiés un hangar à côté du château rempli du personnel au service de ses jeunes mannequins.
Si vous ne le lisez pas pour les raisons ci-dessus, lisez-le au moins pour être capable d'insulter les gens en ancien français. Harry bourriquets !