L'homme, aujourd'hui, est glorifié, admiré. Et ceux, innombrables, qui se passionnent pour ses oeuvres lui vouent un véritable culte — un culte presque maniaque, presque fanatique. Quand par exemple ils en arrivent à posséder un de ses livres en édition originale (rien à voir avec un ouvrage de bibliophilie), c'est comme s'ils tenaient entre les mains un précieux incunable. Pour eux,
Jean Ray est à prendre sans aucune réserve. Avec d'emblée tous les partis pris favorables. Par extraordinaire, sa vie les intéresse peu — ou plus exactement ils l'acceptent avec sa part importante de légende et d'inconnues. Et, au fond, ils n'ont peut-être pas tout à fait tort. Puisque l'oeuvre parle d'elle-même, à quoi leur sert-il encore d'aller savoir pourquoi et comment elle a été entreprise, à travers quelle trajectoire elle a été conçue et élaborée, à quelle circonstance correspondent la rédaction de tel livre, le jaillissement de tel conte, les éléments biographiques que contiendrait telle nouvelle ?