Même sans être un dévoreur de livre, vous avez certainement déja entendu parler de
Salman Rushdie, romancier anglais né à Bombay et auteur de plusieurs best-seller dont un, "Versets sataniques" (1989) a été considéré comme blasphématoire par les musulmans et lui a valu une fatwa de l'ayatollah Khomeini, qui appelait tous les fidèles à l'assassiner.
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Les enfants de minuit" est son premier roman, paru en 1981 et a recu le Booker Prize la même année.
Pitch: Saleem Sinaï est un "enfant de minuit". Il est né à minuit le 15 août 1947, jour de l'indépendance de l'Inde et par cette naissance, lie à jamais son sort avec celui de la nation qui l'a vu naître. Tous les évenements sociaux, politiques ou économiques du pays trouvent leurs causes dans les évenements qui parsèment la vie de Saleem et de toute sa famille.
De plus, tous les enfants nés cette nuit-là entre minuit et une heure du matin (ils sont 1001) ont recu un don. Saleem, né à minuit-pile, a recu le don le plus puissant, le don de pouvoir investir l'esprit des gens, un don encore plus fort que de la simple télépathie et cela, enchevêtré avec le rôle de "symbole" dont il a hérité, fait de sa vie un canevas aux fils multiples et indémêlables.
Salman Rushdie nous livre ici une saga familiale baroque où l'on rencontre les grands-parents de Saleem au Cachemire, où l'on suit ses parents de Bombay au Pakistan, où l'on écoute chanter sa soeur, Jamila, où l'ont suit finalement toutes les aventures burlesques ou grandioses auxquelles Saleem, volontairement ou non, va participer.
C'est un roman riche, extrêmement riche, l'écriture de
Salman Rushdie couplée au destin de Saleem Sinaï nous emmène tantôt dans un récit digne des Contes des Mille Et Une Nuits, tantôt dans un pamphlet politique rigoureusement exact, tantôt dans une farce vaudevillesque.
Car c'est tout le talent de
Rushdie, celui d'arriver à concilier roman imaginaire et histoire, les deux paraissant impossible à mêler mais dont le mélange final est tout simplement fantastique: que l'on soit ou non un fanatique de l'histoire de l'Inde ou de l'Histoire tout court, on est forcément fasciné par la construction de ce pays aux mille visages, on apprend ou re-découvre des détails historiques sous couvert de suivre la vie d'une famille au destin marqué...
Le style de
Rushdie est dense, je ne le nie pas, l'entrée dans le livre est difficile, car Saleem nous fait le récit de sa vie en usant et abusant des flash-backs, des digressions, des commentaires annexes, des détails sans queue ni tête.
Mais une fois entrée dedans, je ne l'ai pas lâché: dès que je me plongeais dans ces 675 pages, je voyais des saris or et pourpre, des madras, des rues poussiéreuses, je sentais l'odeur du curry , du poulet massala et des masures des intouchables, j'entendais les dizaines de dialectes se mélanger, j'étais transportée dans une Inde que je ne connais pas mais que
Rushdie décrit avec tant de talent qu'il m'était impossible de ne pas être fascinée.
Un livre merveilleux, à ne pas manquer. Accrochez-vous au début et laissez-vous emporter au pays des rickshaws...