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3,84

sur 174 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Gouleyante poilade hérétique et irrévérencieuse, ou douloureux testament d'un écrivain qui clôt son oeuvre sur le tableau d'une humanité dont il n'y a rien à sauver puisque même son Dieu est mauvais?
Reste le courage d'un Caïn, au demeurant fort sympathique, qui erre de par le monde et constate partout la vénalité des hommes manipulée par un Dieu vengeur et acariâtre, et qui ose lui renvoyer en pleine face sa propre méchanceté : Tu es mauvais, Caïn. Toi-même, Dieu!
Autant dire que l'on a le rire amer à lire cette fable grinçante, servie par le style inimitable de Saramago qui capture son lecteur dans un flot ininterrompu de virgules, lardé de pointes d'humour et de propos iconoclastes.
Un bijou!
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En écrivant page 91, «L'histoire des hommes est l'histoire de leur mésentente avec dieu, il ne nous comprend pas et nous ne le comprenons pas.», Saramago donne une clé de lecture de son roman Caïn.
Il ne nie pas, contrairement à ceux qui prétendent voir dans ce texte l'athéïsme profond de l'auteur et sa passion à «bouffer» de la religion, l'importance de l'idée de Dieu dans l'histoire humaine. Il valide en creux tout ce courant de pensée cherchant à inscrire nos racines chrétiennes dans nos textes fondamentaux et fondateurs.
Saramago est un sage, il refuse la facilité consistant à expliquer les actes humains, le bien, le mal, la morale, uniquement par l'existence d'un Dieu.
Il respecte ceux qui le font mais tente, avec brio, de leur démontrer qu'ils sont dans l'erreur.
Il propose une lecture marxiste des textes anciens, écrits (pour les croyants) à une époque où les hommes ne disposaient pas des concepts qualifiant leurs actes, et où Dieu après les avoir crées, les mettait sans cesse à l'épreuve pour les jauger et les évaluer.
Saramago montre non sans jubiler, comment ce Dieu a favorisé à l'opposé de la doctrine qu'il prétend faire régner sur le monde, la domination, l'exploitation de l'homme par l'homme, les riches et les pauvres, la maladie, la misère, la guerre et la famine, en en faisant peser la responsabilité sur les hommes parce qu'ils sont incapable de relever le défi des épreuves qu'il leur impose.
Saramago peint un Dieu absurde, distrait, sûr de lui, et doté d'un sens de l'humour qui confine au cynisme.
Il laisse vaquer Adam et Eve nus dans le jardin d'Eden et s'étonne ensuite que Eve puisse céder à la tentation.
Le style fleuve et débridé de Saramago, son non respect des règles élémentaires de la grammaire et de la ponctuation, son refus d'utiliser des majuscules là où il le faut, nous emporte par sa déraison mais nous donne à réfléchir sur le sens de la vie, du progrès, de la morale.
Caïn nous sert de guide dans le dédale des textes anciens, il apparait comme un homme de bon sens, mettant le doigt là où ça fait mal.
Il explique comment et pourquoi Dieu l'a tranformé en assassin, et fort de son bon droit, il accompagne tous ceux qui au cours de l'histoire biblique ont eu à pâtir de cette facilité de Dieu à mettre ses héros dans l'embarras. Il aurait pu être celui qui empêche Esaü de porter une cuillerée de lentilles à sa bouche.
Il est aux côtés de Joshua au pied des murailles de jericho, il accompagne les victimes collatérales de l'incendie de Sodome et Gommorrhe, il est près de Moïse quand celui-ci s'apprête à sacrifier Isaac, enfin il est l'amant de Lilith la diabolique.
Ce livre est à la fois iconoclaste et vengeur, il nous mène à sa façon dans les coulisses de ces événements qui ont influencé notre histoire sociale, ont creusé les fondations de la psychanalyse, ont inspiré notre morale laïque, et nous tendent un miroir à peine déformant.
Morceaux choisis
«(...) Adam put enfin apprendre à (...) lancer des semences dans un sillon, jusqu'à parvenir à l'art sublime de l'élagage, cet art qu'aucun seigneur, aucun dieu n'avait été capable d'inventer.»
«En tuant Abel parce qu'il ne pouvait tuer le Seigneur», Caïn apporte une réponse à la question «pourquoi l'espèce devrait-elle se perpétuer...»
«Un samaritain, c'est quoi, (...) je ne sais pas, ça m'est sorti comme ça, sans réfléchir, moi non plus je ne sais pas ce que ça signifie.»

Roman à découvrir
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La bible-fiction que voici s'approprie les ressorts de la science-fiction, grâce aux voyages dans le temps de Caïn, qui explore le passé, le futur, ou les présents, multiples ; il explore plusieurs épisodes bibliques, se jouant du temps et le discours se fait anachronique parce que les personnages bibliques n'entretiennent pas les mêmes discussions, n'ayant pas les mêmes préoccupations que dans le texte fondateur et que le texte change en conséquence.

La réécriture de la genèse nous présente les parents de Caïn, Adam et Eve, amateurs de clins d’œil complices, déjà conscients qu'ils sont de leur nudité. Il nous brosse un vulgaire portrait de Dieu, qui se pare de ses beaux atours - de juge tout puissant - dès qu'il veut impressionner les hommes mais qui se fait de plus en plus discret au fil du temps, et qui se cache parce qu'il a honte de ses actes.

Saramago omet intentionnellement toutes les majuscules parce qu'il désacralise le texte sacré. Il est drôle d'avoir une nouvelle approche du dieu, terrible, de l'ancien testament. Et Caïn, qui tue Abel, son frère, le criminel donc, par excellence, le tout premier, même, de la Bible, entre en discussion avec Dieu, et il le contredit et il se révolte contre la justice de dieu qui certes, se discute, dès qu'il s'agit du massacre d'innocents.
C'est ainsi que l'accusé se fait accusateur ; qu'il fait le procès de Dieu.
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« Son dernier livre», ces quelques mots ont toujours suffi, il fallait à chaque fois se précipiter en librairie. « Caïn » est le dernier dernier ouvrage du Prix Nobel de littérature. Quelle tristesse ! Nous devrons désormais, sans le frisson de la découverte, nous contenter de relire ses merveilleuses histoires. Quelle chance ont ceux qui ne connaissent pas encore ses romans !

José Saramago, il y a vingt ans déjà, avait fait scandale avec « L'évangile selon Jésus-Christ ». Il récidive aujourd'hui et nous fait, de la plus belle et courageuse façon, sa révérence. Quelle hardiesse, au soir de sa vie, il traite – comme son personnage principal – le créateur sur un pied d'égalité. Il défie dans son roman, avec une invraisemblable jeunesse, un dieu cruel et envieux. Il lui retire littéralement sa majuscule. La peur, qui fait plier les jeunes vieillards , celle de la mort qui fait mettre tant de genoux à terre, n'aura pas infléchit José Saramago. La colère et la révolte contre les injustices, qui épargnent les imbéciles, n'auront pas cessé de l'animer sa vie durant. Il a du hurler de rire quand, lui donnant ainsi cent fois raison, les censeurs vaticanesques l'ont excommunié.

Lecteur érudit, José Saramago avec une fausse naïveté revisite l'Ancien Testament. L'écrivain prend partie pour Caïn contre Abel, il s'insurge contre les massacres et les vengeances de toutes sortes. Dans un espace temps en désordre, Caïn, qui aime la vie, connaîtra la lascivité à la cour de la reine Lilith, la compassion pour Abraham au bras tendu sur la tête de son fils Isaac, la colère de Moïse passant au fil de l'épée les adorateurs du veau d'or, les massacres et les pillages perpétrés par les tribus d'Israël contre les Madianites mais aussi la fourberie des anges, les subterfuges et les calculs des habitants de Babel, le sort sans pitié qui frappe la ville de Sodome et les souffrances inutiles infligées à Job.

Ultime roman contre les dévots et certainement pas réponse aux interrogations des Hommes, « Caïn » de José Saramago aurait pu avoir en exergue ces deux vers de Charles Baudelaire :
« Race de Caïn, au ciel monte,
Et sur la terre jette Dieu. »
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N°518 – Mai 2011.
CAÏNJosé Saramago – le Seuil.
Traduit du portugais par Geneviève Leibrich.

Après « L'Évangile selon Jésus-Christ », sorti en 1992, où José Saramago (1922-2010) présente Jésus perdant sa virginité avec Marie-Madeleine, l'auteur récidive dans ses attaques contre Dieu avec ce roman. A l'évidence, il a, sinon l'envie de créer la polémique, à tout le moins celle de vider avec Lui un lourd contentieux. Alors que nombre d'écrivains ont célébré le Créateur ou ont choisi, au contraire de l'ignorer, Saramago le dénonce comme « un dieu cruel, envieux et insupportable qui n'existe que dans notre tête ». Quand il parle de Lui, il évite soigneusement la majuscule qui d'ordinaire orne son nom et choisit dans ce roman de présenter le meurtre d'Abel par son frère Caïn non comme le disent les Écritures à cause de l'envie mais bien plutôt à cause de l'injustice de Dieu. Il dépeint Caïn, pourtant présenté comme le premier meurtrier, comme un être bon et amoureux de la vie mais qui, s'étant rebellé contre l'arbitraire divin, est méprisé par Dieu. Ainsi le seul coupable de la mort d'Abel ce n'est pas Caïn mais Dieu. « Qui donc es-tu pour mettre à l'épreuve ce que tu as crée ? » lui dit Caïn.

Dès lors il est condamné à errer (juif errant !)sur la terre, succombe aux charmes de Lilith qui est à la fois la maîtresse d'une ville, l'épouse de Noé et l'amante des hommes de passage. Il aime la vie, est le témoin impuissant des grands événements de « l'Histoire Sainte ». C'est lui qui arrête le bras d'Abraham sacrifiant son fils unique à Dieu, c'est lui qui voit la tour de Babel et ce qu'il en résulte pour les hommes, qui assiste à la mort des innocents de Sodome, au bras vengeur de Moïse tuant les adorateurs du veau d'or, sans oublier des souffrances pour lesquelles Dieu s'allie à Satan pour tourmenter Job. C'est une sorte de roman philosophique voltairien, un conte plaisant, écrit et traduit sur un mode jubilatoire qui revisite les saintes écritures en s'adressant directement au lecteur. Caïn est présenté comme une sorte de Candide qui se promène dans le temps sur le dos d'un âne. Ensemble, et par le miracle de l'écriture, ils traversent le « présent-futur » ou « le présent-alternatif » mais aussi visitent le passé. Dieu est toujours présenté comme un dictateur sanguinaire, jaloux, manipulateur, rancunier et injuste qui fait un choix parmi les hommes. Déjà dans « Le Dieu manchot » Saramago avait posé le problème de l'injustice : un roi décide d'offrir à Dieu un monastère pour le remercier de lui avoir donné un fils mais cette construction occasionne la mort de nombreux innocents. Il pose le problème de la coexistence entre les hommes et Dieu, entre les puissants et les humbles.

C'est, d'évidence, un combat de la créature contre son créateur à travers la personnalité d'un être que la Bible, toujours manichéenne, a présenté comme quelqu'un de mauvais. L'Évangile prendra plus tard ce relais, notamment avec Judas. Caïn ose interroger Dieu et s'opposer à lui ! Prendre parti pour un désavoué, un réprouvé est toujours un défi intéressant, d'autant que c'est un prix Nobel de littérature qui fait ce choix. Combattre la soumission à une divinité qui est le socle de toute religion peut paraître iconoclaste. Cela n'en est pas moins la marque de cet homme engagé qui a, tout au long de sa vie, choisi d'être « politiquement incorrect », d'être en quelque sorte rebelle aux idées reçues et même à l'ordre établi, surtout contre l'Église . Depuis toujours, il a choisi son camp, celui des opprimés. On se souvient de ses positions pro-palestiniennes qui lui ont valu beaucoup de critiques au Portugal qu'il a été obligé de quitter, en Europe et dans le monde.

Il ne pose pas pour autant le problème de la foi (s'adressant à Dieu il n'en nie pas l'existence mais remet en cause la bonté qui est censée le caractériser) qui est personnelle à chacun mais celui de la transcendance de Dieu et de la résignation humaine. Il est lui-même un écrivain dont le rôle est de raconter des histoires (Il précise qu'il est « un simple rapporteur d'histoires antiques »). Il considère que la Bible est un livre d'histoire emprunt de violence et qu'il peut parfaitement réécrire à sa manière en le désacralisant. Il m'apparaît que c'est un écrivain qui n'accepte pas le compromis et qui a choisi de se rebeller contre ce que l'humanité dans son ensemble considère comme une évidence : la soumission aveugle et consentante à une sorte de destin dicté par Dieu avec tout ce qu'il a d' injuste et d'irrationnel. Il me semble que, dans la mesure où l'on reste soi-même, où l'on assume ses choix, surtout s'ils vont à l'encontre de ceux du plus grand nombre, de ceux dictés par les institutions, on est parfaitement respectable. La peur de la mort, celle de l'enfer, de la damnation éternelle dont on nous a si abondamment parlé dans nos sociétés tant marquées par le judéo-christianisme, n'ont pas de prise sur lui. Il affirme ses convictions et en accepte les conséquences et je ne vois pas au nom de quoi il devrait se taire. Son style est remarquable, humoristique et toujours plaisant pour le lecteur. Il a fait valoir son talent comme le dit la parabole et je ne vois pas ce qui justifierait son silence. Et tant pis si d'aucuns ont pu voir dans ce texte une fable blasphématoire !

Cela dit, même s'il a dû s'exiler en Espagne à cause sans doute de l'Église catholique qui n'a pas supporter ses écrits et ses prises de position, il n'en reste pas moins qu'il est le seul écrivain de langue portugaise à avoir obtenu le prix Nobel de littérature (1998), et, à ce titre, son pays en est fier. Heureusement !






©Hervé GAUTIER – Mai 2011. http://hervegautier.e-monsite.com












































































































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Court roman d'un Prix Nobel de littérature, remarquable à plusieurs points de vue, son érudition sur un sujet délicat, la Bible, son parti-pris résolu contre la religion, son ironie féroce, son style inattendu.
Sa cible préférée est Dieu lui-même, être de chair, débarrassé de sa toute puissance, en proie à la réflexion, au questionnement, mais aussi à l'arrogance que met à jour la contradiction que lui oppose Caïn.
Tout a commencé dans l'affront que Dieu a prononcé à l'attention de Caïn, en lui préférant les offrandes d'Abel, celles de Caïn étant de fait quelque peu “rabougries“ (tous les deux sont les fils d'Adam et Ève). Caïn voit dans le choix du Seigneur une preuve de sa partialité et de son injustice. Contrairement à ce que prétend la Bible - Caïn se vengea des moqueries de son frère en le tuant - le meurtre d'Abel se veut une punition de Dieu lui-même, que Caïn ne peut tuer. Dieu réagit en condamnant l'assassin à errer en dehors du paradis, sur la Terre aride et brûlante.

Assailli par la faim, perdu dans des plaines infinies, Caïn voyage dans l'espace et dans le temps, habitant le passé ou le futur. Il fait des rencontres, commence par celle d'Abraham décidé à immoler son fils Isaac, par ordre du Seigneur-Dieu qui voulait tester sa foi et son obéissance. L'ange envoyé par Dieu pour arrêter le bras du père docile, étant en retard, c'est Caïn qui s'en chargea, tout en questionnant le dessein du Créateur.
Cherchant du travail, Caïn s'apprêtait à malaxer de l'argile pour bâtir des briques, quand la reine Lilith le remarqua et l'attira dans sa couche où elle lui montra comment la chair pouvait prendre un tour incandescent, une coloration torride, jusqu'à faire naître une graine dans un environnement hostile. Cela dura ce que durent les passions.
Juché sur son âne et chargé de victuailles, Caïn se rend à Sodome et Gomorrhe, accompagnant Dieu qui avait entendu parler de ces cités pécheresses, où l'inhospitalité le disputait à des excès charnels, voire homosexuels. Épargnant Loth, neveu d'Abraham et sa famille, Dieu détruisit ces villes, y englobant les enfants, alors qu'il avait promis de les exempter de la peine collective. Caïn ne lui pardonnera jamais ce massacre d'innocents.
Caïn se retrouve ensuite mêlé aux compagnons de Moïse absent depuis quarante jours et quarante nuits pour cause d'établissement avec Dieu des tables de la Loi. Quelle n'est pas sa surprise en descendant du mont Sinaï de voir que ses ouailles ont élaboré avec la complicité d'Aaron, son propre frère, un Veau d'Or qu'ils adorent comme un Dieu ! Outré, le Seigneur, par l'entremise de Moïse, ordonne que soient exécutés trois mille hommes. La preuve irréfutable de la méchanceté profonde du Seigneur saute aux yeux de Caïn qui poursuit sa route, assistant aux manoeuvres des filles de Loth commettant l'inceste pour avoir une descendance, démontrant là l'absence de codes moraux propre à cette époque - ce qui ne soulevait d'ailleurs aucune indignation du Tout-Puissant.
Les victoires sur les Madianites permirent l'enrichissement considérable du Seigneur grâce à un nombre non moins considérable de morts - démontrant que les guerres sont des affaires rentables.
L'épisode de la prise de Jéricho par Josué, au son des trompettes, suivi de la prise d'Aï et de bien d'autres villes, avec leurs lots de morts, de traitres, de butins, de colère ou de vengeances du Seigneur-Dieu, de sa complicité belliciste quand il s'est agi d'arrêter le Soleil ou la Terre, je ne sais plus, pour battre les Amorites, tout cela est confus et ne mérite pas l'attention de Caïn qui ne songe qu'à s'enfuir, et finit par retrouver Lilith pour le plus grand bonheur de leurs étreintes.
Après ces plaisirs retrouvés, Caïn reprend son errance qui l'amène à chercher du travail auprès de Job, cependant que Dieu en réunion avec des sommités célestes dont Satan, fait un pari avec ce dernier, lui donnant carte blanche pour tenter de ravir la foi à ce fidèle d'entre les fidèles qu'est Job. Job dont la vie est florissante, entre ses terres, ses troupeaux et ses nombreux enfants, perd ainsi tout ce qu'il avait et devient même lépreux. Imaginant que c'est là la volonté divine, il garde sa confiance en Dieu (qui finira par lui restituer ce qu'il a perdu, prétend-il).
L'épisode de Noé et de son arche sont l'occasion d'une conclusion surprenante qui permet à Caïn de fignoler sa revanche sur le Tout-Puissant, en lui rendant la monnaie de sa pièce. Cette lutte a priori inégale prend décidément une tournure allégorique et résolument jubilatoire.
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Oui, le début fut ardu tant l'écriture de Saramago est atypique…. Ces longues phrases m'ont quelque peu décontenancée …. Mais une fois passée la barrière de la synthase … quelle lecture … quel voyage… quel verbe… merci à Saramago que j'ai découvert quelques années après sa mort lors d'un voyage à Lisbonne.
Je m'en vais lire le Dieu manchot
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Le prix Nobel de littérature portuguais qu'est José Saramago avait déjà abordé la Bible dans l'évangile selon Jésus Christ.
Ici nous voilà plongés dans l'ancien testament sous la forme non d'un roman, mais plutôt d'un conte, un peu à la façon du Candide de Voltaire, où le rôle du héros est tenu par un caïn qui cherche à comprendre, parfois avec une certaine naïveté, les évènements auxquels il est confronté : destruction de sodome et gomorrhe, les filles de loth, sacrifice d'isaac, fils d'abraham, les trompettes de jericho, moîse et le veau d'or, la tour de babel, et pour finir le déluge. Toute l'histoire est connue d'avance, et l'épilogue de ces épisodes ancré dans notre patrimoine culturel le plus profond.
A vrai dire, ce qui fait la grande richesse de ce roman très surprenant, est la profonde humanité donnée à caïn, et ses interrogations vers un seigneur tout puissant qui n'hésite pas à faire mourir ses enfants, par milliers, un seigneur qui parie avec satan sur la foi de job, et qui épargne caïn pourtant assassin de son frère abel, "seulement" condamné à errer en terres bibliques sur son âne. Lequel caïn, on s'en doute bien, ne comprend pas les "voies impénétrables " de ce seigneur qui n'hésite pas à tuer les enfants de sodome, alors qu'ils sont pour caïn tout autant innocents qu'isaac condamné à mourir de la main de son propre père, juste pour éprouver la foi en ce seigneur sanguinaire. Il y a assuremment une réflexion philosophique de toute une vie sur le sens du bien et du mal, sur la religion, sur Dieu lui même, que J Saramago nous livre ici, sous des dehors parfois très badins et pleins d'humour " d'ailleurs chers anges, d'où provient l'idée extravagante que dieu, du seul fait qu'il est dieu, doive régenter la vie intime de ses fidèles en établissant des règles, des prohibitions, des interdits et autres fariboles du même tonneau, demanda caïn".
Le lecteur pourra être surpris par l'aspect road movie du roman, avec des périgrinations de caïn faisant fi de l'espace et du temps, mais support très efficace d'une humanité dans laquelle on se reconnait volontiers.
La vraie surprise, ce sont les passages parfois très crus où sont évoquées les pratiques sexuelles, comme si Saramago avait forcé le trait pour se départir d'une écriture trop biblique et ancrer le propos dans la plus primaire matérialité humaine, non encore culpabilisée par la religion.
Pour finir, comme à son habitude, Saramago, dans cet ultime roman, utilise sa syntaxe et sa ponctuation si particuliers, sans majuscules notamment, comme je viens de le faire, pour citer ses personnages.
Assurément un très beau roman qui nous plonge dans de profondes réflexions et interrogations.
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Particulièrement grinçant et caustique pour qui connait son catéchisme, ce roman s'attaque avec beaucoup d'humour et de génie à la violence et à l'hypocrisie des religions. Il n'est pour autant absolument pas une attaque aux croyant. Les amateurs de subversion seront rassasiés.
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D'une drôlerie cynique et sans espoir, d'une humanité déchue menée par un saint patron moins vertueux qu'egocentré...
Un petit ovni littéraire qui m'a fait rire en me surprenant, qui m'a happé en me captivant...
Un petit bijou à offrir à ma belle-mère!!!
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