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Citations sur Les intermittences de la mort (39)

Le ministère de la défense, appelé de la guerre en des temps plus sincères
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Effectivement, pour en revenir aux raisons inquiétantes de l'économiste, les calculs n'étaient pas difficiles à faire, voyons un peu, si une fraction de la population active cotise à la sécurité sociale, si une autre fraction de la population non active est à la retraite, soit pour une raison d'âge, soit d'invalidité, et par conséquent reçoit de l'autre sa pension de retraite, et la population active étant en diminution constante par rapport à la fraction inactive qui, elle, est en croissance continuelle absolue, on ne comprend pas que quelqu'un n'ait pas compris aussitôt que la disparition de la mort, qui semblait un summum, un apogée, le bonheur suprême, n'était finalement pas une bonne chose.
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La seule façon de liquider le dragon c'est de lui couper la tête, lui limer les ongles ne sert à rien.
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Non pas qu'il fût oublié, comme le prouvait une phrase qui se répandait et qui était répétée à l'envi par les piliers de bistrot, Au moins, disaient-ils, s'il se produit un putsch militaire, nous pouvons être sûrs d'une chose, même si les gens se canardent à qui mieux mieux, ils ne réussiront à trucider personne. On attendait à tout moment un vibrant appel du roi à la concorde nationale, une communication du gouvernement annonçant un ensemble de mesures d'urgence, une déclaration des hauts commandements des armées de terre et de l'air, car comme le pays n'avait pas de littoral il n'avait pas non plus de marine de guerre, faisant état de leur fidélité indéfectible aux pouvoirs légitimement constitués, un manifeste des écrivains, une prise de position des artistes, un concert de solidarité, une exposition d'affiches révolutionnaires, une grève générale organisée conjointement par les deux centrales syndicales, une pastorale des évêques invitant à prier et à jeûner, une procession de pénitents, une distribution massive de prospectus jaunes, bleus, verts, rouges, blancs, on parla même de convoquer une gigantesque manif à laquelle participeraient les milliers de personnes de tous les âges et de toutes les conditions se trouvant en état de mort suspendue qui défileraient dans les principales avenues de la capitale sur des civières, dans des brouettes, des ambulances ou sur le dos de leurs enfants les plus robustes, avec un immense calicot à la tête du cortège proclamant, sacrifiant rien moins que plusieurs virgules à l'efficacité du slogan, Nous qui défilons tristement ici nous vous attendons tous dans la joie. Finalement, rien de cela ne fut nécessaire.
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… la philosophie a autant besoin de la mort que les religions, si nous philosophons c’est parce que nous savons que nous mourrons, monsieur de montaigne a dit que philosopher c’est apprendre à mourir.

(Seuil, p.42)
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À vingt-trois heures cinquante-neuf minutes de ce trente et un décembre, personne n’aurait eu la naïveté de parier une allumette usée sur la vie de la royale dame. Ayant abandonné tout espoir, les médecins s’étant rendus à l’évidence inexorable, la famille royale, disposée hiérarchiquement autour du lit, attendait avec résignation le dernier soupir de la matriarche, quelques mots brefs peut-être, une ultime sentence édifiante destinée à la formation morale des princes, ses petits-enfants bien-aimés, une jolie phrase bien tournée et peut-être, à l’intention de la mémoire immanquablement ingrate de ses futurs sujets. Puis, comme si le temps s’était arrêté, il ne se passa rien. L’état de la reine mère ne s’améliora ni n’empira, il resta comme en suspens, le corps frêle oscillant à l’orée de la vie, menaçant à chaque instant de tomber de l’autre côté, mais rattaché à celui-ci par un fil ténu que la mort, car ce ne pouvait être qu’elle, continuait à retenir, par un étrange caprice. L’on était déjà passé à la journée suivante et ce jour là, comme cela fut annoncé dès le commencement de ce récit, personne ne mourrait.
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[…] ,qui démontra dès le commencement du monde combien il est difficile de vivre en famille, et cela n'a pas changé depuis, […]
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Depuis le début, nous n'avons fait que contredire la réalité et nous existons toujours, Que dira le pape, Si j'étais pape, que dieu me pardonne la sotte vanité de m'imaginer pape, j'ordonnerai la propagation immédiate d'une nouvelle thèse, celle de la mort différée, Sans autre explication, L'on n'a jamais demandé à l'église d'expliquer quoi que ce soit, outre la balistique notre spécialité c'est de neutraliser les esprits curieux par la foi, ...
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(...) Je disais ce que tout catholique, et vous n'êtes pas une exception, a l'obligation de savoir, et c'est que sans résurrection il n'y a point d'église, d'ailleurs comme vous est-il venu à l'esprit que dieu pourrait vouloir sa propre fin, affirmer cela est une idée absolument sacrilège, peut-être le pire des blasphèmes, Votre éminence, je n'ai pas dit que dieu voulait sa propre fin, Effectivement, vous ne l'avez pas dit en ces termes précis, mais vous avez admis la possibilité que l'immortalité du corps résulte de la volonté de dieu, point n'est besoin de posséder un doctorat en logique transcendantale pour comprendre que celui qui dit une chose dit l'autre, Votre éminence, je vous en prie, croyez-moi, ce fut une simple phrase à effet destinée à frapper les esprits, la conclusion d'un discours, rien de plus, vous savez bien que la politique oblige à ce genre de formules, l'église aussi, monsieur le premier ministre, mais nous autres, nous réfléchissons longuement avant d'ouvrir la bouche, nous ne parlons pas pour le plaisir de parler, nous calculons les effets à distance,...
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Bien que, comme cela a déjà été signalé une bonne partie des patients incurables dont la maladie était parvenue son degré extrême et dernier, si l'on peut licitement appeler ainsi un état nosologique annoncé comme devant être éternel, eût été déjà transférée chez eux et dans le sein de leurs familles, En quelles meilleures mains pourraient se trouver les pauvres diables, se disait-on hypocritement, ce qui es certain, c'est qu'un très grand nombre parmi eux, sans parents connus ni argent pour payer la pension exigée dans les foyers du crépuscule heureux, s'entassaient là pêle-mêle, non plus dans les couloirs, comme c'est la vieille habitude dans ces méritoires établissement d'assistance, hier, aujourd'hui et toujours, mais dans des débarras et des recoins, des combles et des greniers, où ils étaient souvent laissés à l' abandon pendant plusieurs jours, sans que quiconque s'en souciât, car comme disaient médecins et infirmières, quelle que fût la gravité de leur état, ils ne pouvaient pas mourir. A présent, ils étaient morts, emportés et enterrés, l' air des hôpitaux était redevenu pur et cristallin, avec son arôme si particulier d'éther, de teinture d'iode et créosote, comme en plein ciel dans les hautes montagnes . On ne déboucha pas de bouteilles de champagne, mais les sourires heureux des administrateurs des chefs de clinique mettaient du baume au cœur, quant aux médecins, il n'y a rien d'autre à en dire sinon qu'ils avaient retrouvé l'historique regard carnivore avec lequel ils suivaient des yeux le personnel infirmier féminin. Donc, dans tous les sens du terme, retour à normale.
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