Le sens de
la pudeur n'est pas le même selon le lieu où l'on se trouve : ramenée par certains en Occident à l'aspect vestimentaire destiné à dissimuler aux regards le corps dans ce que pourrait avoir de provocant sa nudité, et particulièrement dans l'exhibition des parties les plus intimes,
la pudeur se remarque aussi dans l'emploi d'un langage qui bannit toute licence et toute vulgarité, de sorte que l'on ramène tout à l'aspect sexuel et à ce que l'on pourrait dénommer la décence, oubliant que l'humain s'est d'abord couvert pour affronter les rigueurs et les variations climatiques (ou se servant de cette réalité pour occulter les difficultés qu'il peut y avoir à doser
la pudeur et une sexualité vécue sans complexe et sans honte dans une vie équilibrée) ; sous d'autres latitudes, c'est d'être nu qui est le signe de
la pudeur, et ailleurs encore cela n'importe ni dans un sens ni dans un autre.
La pudeur serait-elle une forme de respect de soi et de respect envers l'autre, une façon de "policer" les relations humaines ? D'échapper au mal moral, ou de vaincre le mal tout court, qui s'accompagne toujours d'une forme de culpabilité et d'un besoin de rédemption, comme si tout le mal du monde se trouvait dans ce qui a trait à la vie sexuelle ? Cette façon de définir
la pudeur serait réductrice selon Scheler, et il a sans aucun doute raison.
A l'aide d'exemples, il dresse un tableau géographique et adapte la définition donnée au mot pudeur selon l'univers mental des groupes humains étudiés. Un vrai travail de moraliste, de comportementaliste, d'anthropologue et de phénoménologue dans un texte assez court. Une leçon de philosophie vivante.
François Sarindar, auteur de :
Lawrence d'Arabie. Thomas Edward, cet inconnu (2010)