A partir du XIe siècle, la France connaît un essor sans précédent. Le paysage se hérisse de remparts, de tours et de cathédrales ; des bourgs poussent autour des châteaux et des abbayes, des villes nouvelles, des bastides, surgissent de la volonté des princes et des rois. La démographie explose comme jamais.
Mais comment vit-on dans ces grandes cités ? Quelles forces, quelles mutations, quel souffle les animent ? Tout un pan de la recherche investit aujourd’hui les rues et les maisons des citadins médiévaux. Des archéologues, des historiens explorent les sous-sols et les archives pour nous révéler un univers inattendu : grouillant de vie, dynamique et entreprenant, un monde qui a inventé le commerce international et la banque, le droit du travail et celui des communes, où les femmes ont un métier, où les ouvriers contestataires fondent le compagnonnage, et, parfois, même, les religions dialogues. « L’air de la ville rend libre », confirme l’historienne Claude Gauvard, qui connaît, et aime, comme personne le petit peuple médiéval. Il façonne aussi les mentalités, donnant naissance à un modèle de civilité et d’urbanité dont nous sommes les héritiers.
« C’est l’histoire d’un paysan qui vient à Paris pour la première fois de sa vie. Etourdi par la foule, il perd sa femme sur le Petit-Pont et ne la retrouve pas. Drame ? Oui et non. Il rentre au village avec une autre ! » Ce fabliau du XIIIe siècle est rapporté par Thierry Dutour, maître de conférences à l’université Paris IV Sorbonne. Il n’est qu’un exemple de ces nombreux petits contes à rire médiévaux qui, à l’époque, valorisaient le citadin aux dépens du paysan rustaud et peu dégourdi. Un regard assez proche de certains clichés actuels !