Il lisait lentement en épelant les syllabes, les murmurant à mi-voix comme s'il les dégustait, et, quand il avait maîtrisé le mot entier, il le répétait d'un trait. Puis il faisait la même chose avec la phrase complète, et c'est ainsi qu'il s'appropriait les sentiments et les idées que contenaient les pages.
Quand un passage lui plaisait particulièrement, il le répétait autant de fois qu'il l'estimait nécessaire pour découvrir combien le langage humain pouvait être aussi beau.
Il lisait en s'aidant d'une loupe, laquelle venait en seconde position dans l'ordre de ses biens les plus chers. Juste après le dentier.
" - Nous sommes comment ? questionnaient-ils.
- Sympathiques comme une bande de ouistitis, bavards comme des perroquets saouls, et hurleurs comme des diables."
Il passa toute la saison des pluies à ruminer sa triste condition de lecteur sans livre, se sentant pour la première fois de sa vie assiégé par la bête nommée solitude. Une bête rusée. Guettant le moindre moment d’inattention pour s’approprier sa voix et le condamner à d’interminables conférences sans auditoire.
Ils aimaient le voir, ils aimaient sa compagnie, mais ils voulaient aussi sentir son absence, la tristesse de ne pouvoir lui parler, et les battements joyeux de leur coeur quand ils le voyaient revenir.
C'était, dans l'obscurité, le bruit de la vie. Comme disent les Shuars : le jour, il y a l'homme et la forêt. La nuit, l'homme est forêt.
Antonio José Bolivar (...) prit la direction d'El Idilio, de sa cabane et de ses romans qui parlaient d'amour avec des mots si beaux que parfois, ils lui faisaient oublier la barbarie des hommes.
Antonio José Bolivar essayait de mettre des limites à l’action des colons qui détruisaient la forêt pour édifier cette œuvre maîtresse de l’homme civilisé : le désert.
C'était l'amour pur sans autre finalité que l'amour pour l'amour, sans possession et sans jalousie.
Il passa toute la saison des pluies à ruminer sa triste condition de lecteur sans livre, se sentant pour la première fois de sa vie assiégé par la bête nommée solitude. Une bête rusée. Guettant le moindre moment d'inattention pour s'approprier sa voix et le condamner à d'interminables conférences sans auditoire.
Ils prenaient seulement plaisir à le voir transpirer comme un robinet rouillé condamné à couler pour l'éternité.