"Ecrire c'est découvrir la liberté de s'inventer soi-même et d'inventer le monde. (p17)"
Comme vous le savez j'aime découvrir les parcours d'écrivain(e)s, ce qui les a menés à la littérature et également comment ils (
elles) travaillent. J'ai plusieurs fois été tentée par la collection Ma nuit au musée car j'aime le principe qu'un(e) écrivain(e) se raconte dans la solitude d'un lieu dédié à l'art. Celui-ci aura-t-il une influence sur son discours, sera-t-il le pourvoyeur de souvenirs, d'évocations ou le (la) visiteur(se) nocturne restera-t-il (elle) insensible à son environnement ?
Je connais
Leïla Slimani depuis la lecture de
Chanson douce mais je reste toujours à distance de ses romans. Pourquoi ? je ne saurai trop le dire.... Alors, pour mieux la connaître et savoir pourquoi cette distance face à son écriture, j'ai trouvé l'occasion de lever un peu le voile sur elle avec ce court récit autobiographique.
Je n'ai rien appris d'elle que je ne savais déjà car je l'ai écoutée à diverses reprises dans des interviews et elle ne se dévoile pas plus pendant une nuit dans la Pointe de la Douane à Venise qu'elle ne le fait ailleurs. Je respecte sa volonté de ne pas en dire plus mais alors pourquoi accepter le challenge. Certes tout le monde n'a pas vue ou ne l'a pas écoutée et dans ce cas cela permet de la découvrir.
J'ai trouvé certaines incohérences (mais ne sommes-nous tous pas fait de plein de contradictions) comme dans le fait qu'elle vit en recluse pendant l'écriture de ses romans puis qu'en fin de récit elle parle de ses nombreux voyages, qu'
elle s'attache peu à son apparence mais en parle beaucoup etc...
Elle évoque ses racines à Rabat au Maroc, son enfance bouleversée par l'emprisonnement de son père et sa perte, parle peu de sa mère, de sa presque indifférence face à l'art contemporain. J'ai même eu le sentiment que c'est finalement plus Venise qui lui a plu que le Musée.
"Le galant de nuit c'est l'odeur de mes mensonges, de mes amours adolescentes, des cigarettes fumées en cachette et des fêtes interdites. C'est le parfum de la liberté.(p72)"
Elle a une jolie plume qui réussit à mettre en images ses souvenirs, son quotidien mais j'ai trouvé cela assez nombriliste (oui je sais c'est un récit autobiographique) dans le sens où j'ai l'impression qu'
elle s'est construit un personnage, qu'elle n'en révèle que ce qu'elle a décidé d'avouer. Elle évoque à plusieurs reprises
Virginia Woolf qui, elle, acceptait de montrer ses failles mais également un autre visage d'elle que l'on connaît moins (par exemple son humour, son sens critique).
Ah oui j'oubliais.... Que de citations d'auteur(e)s dont j'ai du mal à croire qu'
elles lui soient venues ainsi, pendant sa déambulation... N'est pas Fabrice Luchini qui veut ! Et sans parler de son rapport addictif à la cigarette, allant même jusqu'à braver les interdictions dans le lieu. Oui elle aime fumer mais là n'ai pas le thème du récit.....
En résumé j'ai aimé parce qu'elle a une aisance et une fluidité de voix et d'écriture, mais elle aurait pu ne pas à aller à Venise pour se livrer, lieu magique que j'ai eu la chance de voir, pourquoi ne pas être restée à Paris par exemple dans l'Institut du Monde Arabe qui aurait peut-être poussée la narratrice à plus de profondeur dans ses ressentis, dans ses souvenirs, un lieu où ses deux racines, ses deux cultures se rejoignent et où la sincérité de ses propos m'auraient plus touchées.
C'était un pari qu'elle a relevé mais qui, pour ma part, n'a pas remporté la mise.
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