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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
L'année dernière, après avoir fait saigner mes yeux sur plusieurs purges d'affilée, j'ai lu un Soulier parce que je savais que la série noire allait s'arrêter, et c'est exactement ce qui s'est passé. Cette année, alors que je venais derechef de m'esquinter la cornée sur un Balek, un Wül et un Adrien Tomas, j'ai réalisé qu'il me restait encore un Soulier dans mon escarcelle, et je me suis dit que c'était le moment ou jamais de le sortir.
Futur moche (et proche). La guerre entre les chrétiens intégristes et les musulmans itou est devenue mondiale et nucléaire, et a accouché d'un "facteur Z" qui transforme certains morts en zombies.
Pour les réfugiés européens, les camps se trouvent en Italie comme autrefois, mais maintenant l'El Dorado a changé de bord (de Méditerranée), il se trouve en Tunisie.
Le bouquin aborde certains thèmes chers à Soulier, comme par exemple le fait que la religion c'est caca boudin, mais il a raison, on ne se lasse jamais de le répéter.
Dans ce cloaque de bidonville qu'est le "Cratère", il est aussi question de handicap : il n'y a pas beaucoup de chocolat, et d'autant moins que le héros et narrateur n'a pas de bras.
Au début, mes dents ont un peu grincé, et le gyrophare de l'invraisemblance s'est bien vite allumé dans ma tête. Je ne parle même pas des zombies, mais de ses hypothèses géopolitiques (je ne crois pas que le christianisme moribond puisse renaître de cette manière, et c'est tant mieux) et du langage du narrateur qui paraît rapidement trop chiadé pour son niveau d'instruction... en dépit du fait qu'il s'exprime en argot, nous y reviendrons.
Et puis soudain, je suis emporté par la puissance du récit, qui souffle le gyrophare comme une vulgaire chandelle. Plus rien à foutre de la logique !
Au milieu de cette misère, de toute cette crasse et de toute cette violence, où l'expertise de Soulier n'est plus à prouver, c'est pourtant d'amitié, d'amour, de famille, de courage et de sacrifice qu'il parle le mieux, et les morceaux de bravoure que je lui connais prennent une saveur nouvelle dans ce langage presque créé sur mesure. Cambronne, c'est de la dentelle !
À ma connaissance, personne n'avait fait de la littérature en argot de cette manière depuis Louis-Ferdinand Céline. Excusez du peu !
Au fait, je n'ai plus de Soulier en réserve pour ma prochaine série de purges...
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C'est un parti original qu'a pris l'auteur en modifiant la carte géopolitique, en inversant les rôles pour mettre une famille française au coeur d'un camp de réfugiés en Sicile dans l'espoir d'atteindre la terre d'accueil : la Tunisie. le propos de départ est donc simple : ça pourrait bien vous arriver à vous, qui vous croyez bien à l'abri.
Nous voilà donc dans le camp d'Agira, avec Philippe, dit Pip, sa soeur et son père. Après la suppression pure et simple de l'Irlande avec une bombe à particules Z, une guerre élargie à plusieurs pays européens, un nuage toxique, la mort de leur mère, les enfants ont finalement fui la France avec leur père.
C'est un roman d'une grande richesse, beaucoup de choses y sont abordées, la pauvreté, la faim, l'amitié, le fanatisme religieux, la société avec ses écarts de richesse, le regard de l'autre, l'amour, la sexualité, la survie, la maladie, le handicap… et tout est traité avec une grande justesse sans jamais aucun misérabilisme. C'est sans doute l'avantage d'avoir mis des enfants au centre du récit, les enfants s'adaptent, ils ont la vie chevillée au corps et sont souvent le moteur de leurs parents. C'est parfois drôle, souvent touchant.

J'ai été prise par cette histoire du début à la fin. J'ai du mal à trouver les mots justes et c'est plutôt bon signe, signe que ça a touché quelque chose de profond, là où justement les mots ne suffisent pas. Cette histoire vient titiller ce qui reste de notre humanité dans ce monde régi par des codes complexes, par l'argent, où chacun doit avancer pour lui-même. le communautarisme est fortement pointé du doigt, celui de la culture, du pays, de la tranche sociale, de la religion. Dans cette société à taille réduite, tout se rejoue et les rapports humains sont au coeur du récit, la famille aussi.

Soulier a choisi de donner une touche de fantastique à son histoire en faisant revenir en morts-vivants tous ceux (ou presque) qui calanchaient. Je ne sais pas dans quel but il l'a fait, mais ce qui transparait dans la transformation, c'est que certains deviendront des mordeurs et d'autres pas. On trouve alors une démarcation entre la nature humaine considérée comme bonne (les plus jeunes zombies ne sont jamais mordeurs) et ce que la société, notre éducation font de nous… si on les laisse faire. Et puis, s'il le fallait, rappeler que nous sommes tous des morts en sursis.

Le texte est le récit de Pip, qui atteindra finalement l'âge canonique de 84 ans, écrit par sa fille. Pip qui, pour raison de guerre, n'a pu aller à l'école et parle avec des approximations. C'est un texte qui surprend par cette retranscription, arrachant des lettres, modifiant des expressions. J'ai, au début, été vaguement dérangée par les erreurs toujours enfantines (« toute même » pour « tout de même » par exemple) de Pip, quand il peut par ailleurs utiliser des mots peu usités voire un peu savants et des tournures complexes. Si ça semble plus qu'improbable quand le personnage est comme ici le narrateur, ce mélange de styles est aussi un peu la marque Soulier, poussée là à son paroxysme.
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Y'a des auteurs comme ça qui vous mettent KO à petit feu et Fred Maculatures Soulier est de ceux-là.
En toute honnêteté, j'attaque la rédaction de ce retour sans trop savoir par quel bout le prendre.
Pas le Soulier, hein. le retour.
Enfin le retour du Soulier, venu d'une galaxie très très très lointaine pour nous foutre des mandales intergalactiques à l'aide de son stylo laser…

Désolée, je m'égare.

Vous l'aurez sûrement compris, mon utilisation d'un humour à deux balles et de références cinématographiques pas toutes fraîches signifie que je suis sonnée. Comment ne pas l'être, d'ailleurs, lorsqu'on vient de finir un livre comme « Des morts Des vivants ».

Ce livre est le récit de ce qui nous pend au nez, à nous autres, les « françoués » & co qui sommes bien au chaud dans nos chez-nous, à bouffer trop, râler toujours plus pour des broutilles et accepter sans broncher les tombereaux de merde que nous déversent les écrans télés. Liste bien évidemment non exhaustive.

Pour les naïfs pensant vivre dans un monde de bisounours et qui ne comprendraient pas à quoi je fais allusion, je vous laisse renseigner les mots clefs « migrants », « réfugiés », « guerre » dans les moteurs de recherche de vos navigateurs préférés… Prenez un xanax du coup, ça peut aider.

Nous sommes d'accord, lorsque j'écris ci-dessus que cela « nous pend au nez », c'est mon côté optimiste qui s'exprime (siiiiii, j'en ai un !), mais ne nous voilons pas la face, ça se passe déjà comme ça aujourd'hui, sauf en ce qui concerne les n…..dais (pas de spoil, pas de spoil).
D'ailleurs, même ça, je me demande si ça n'existe pas déjà quelque-part... mais on devient souvent méfiant après la lecture d'un Soulier.

Voilà pourquoi, si vous êtes dotés d'une capacité de réflexion, d'un estomac solide et d'un minimum de conscience sur ce qui se passe dans le monde de nos jours, vous ferez comme moi et plongerez tête la première dans ce cratère sicilien.

Je vous préviens, cela remue sec et le mérite en revient exclusivement à l'écriture vivante, corrosive, imagée, (bordel, j'en ai marre des adjectifs mais le clone de de Niro le mérite) de Frédéric Soulier.
Imaginer ce que Pip, Lulubellule, Sauveur, Nour et tous les autres réfugiés du camp d'Agira ont vécu, ne laisse pas indemne.

Ce livre déborde de rire, de mots d'enfants, de larmes, de « ouais bon bah c'est comme ça épicétou », ça pue la mort et la décomposition, mais c'est justement ça, la VIE.
Il faut se répéter encore et toujours que ce n'est pas ce qui semble sorti d'un film d'horreur qui est le plus dangereux… c'est la totale indifférence des humains les uns envers les autres.

Au fil de la lecture, les neurones sont saturés et les horreurs deviennent presque anecdotiques, l'estomac se soulève et on ne peut s'empêcher de penser « Nanmeoh, il a pas bientôt fini là, le Soulier ? » lorsque soudain, de petites fulgurances d'une beauté fragile font leur apparition, portant à elles seules un espoir ténu mais pourtant bien concret. Superbes.

J'imagine à peine le boulot que ce livre a dû représenter d'un point de vue linguistique… Putes à fanon, comme dirait Pip, quel boulot dantesque ! Il y a du secret de fabrication là-dedans où je ne m'y connais pas.

Pour conclure, si j'avais voulu un happy end, j'aurais regardé un Disney pour me laver le cerveau en me répétant que « tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes ».
J'ai préféré la compagnie des gosses galeux aux yeux sauvages luttant pour survivre. La réalité.

Quand je pense que Frédéric Soulier m'avait justement conseillé de commencer par lire « Des morts Des vivants », je me dis que c'est un sacré coquinou !
Ou alors un mec vachement dangereux, à l'humour borderline, je ne me suis pas encore décidée… 🤔😆

C'est du lourd que je recommande.

NB:
Petit conseil pas superflu, si vous ne connaissez pas déjà l'écriture de ce talentueux auteur barbu et misanthrope, faites comme moi et lisez d'abord « le Cri sauvage de l'âme » pour vous préparer à cette avalanche d'images on ne peut plus réalistes.

NB2: Pour celles et ceux que ce sujet d'actualité intéresse, et parce que cela résonne avec le livre de Fred Maculatures Soulier, voici l'excellent article rédigé par Anna Cognet sur la survie des migrants Lors des traversées et le regard que les non-migrants ont sur eux:

https://www.cairn.info/landing_tireapart.php?ID_ARTICLE=LAUTR_057_0332&ID_AUTEUR=13735%3D&CD=9988605417032463170737899

Cet article vient de paraître dans le magazine L'Autre.
Lien : https://www.facebook.com/195..
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Encore un roman de Frédéric Soulier que j'ai adoré lire, on y retrouve sa plume unique, son vocabulaire tellement riche ( heureusement que la Kindle a le dictionnaire intégré), j'apprends toujours des mots grâce à cet auteur 😉
La troisième guerre mondiale s'est déclarée et un virus s'est répandu, les morts reviennent à la vie. Nous suivons un petit groupe de réfugiés qui doit réapprendre à vivre dans un camp où il n'y a que famine, maladie et désolations, ils sont mis à l'écart et heureusement que l'amitié, la famille et l'amour sont là pour pallier à tous ces manques. Un roman riche en émotions avec des personnages fort attachants, des passages crus, violents mais tendres et drôles aussi.
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L'humanité des morts… ou des vivants ?

Le style de Frédéric Soulier, particulièrement imagé, fleuri, souvent familier, n'a jamais été aussi approprié qu'ici. Il n'en demeure pas moins élégant, finement ciselé, et riche, ça oui ! Il pourrait vous donner la recette des cannellonis au fromage ou narrer ses premiers tours de bicyclette que ça sonnerait toujours aussi juste.

Ici, c'est le langage parlé qui prédomine, puisque c'est un survivant qui nous conte son histoire, sa misère, son quotidien à travers le regard désespérément lucide de son lui enfant.
L'empathie de cet auteur est impressionnante ; quoiqu'il décrive, nous sommes pris à la gorge, aux tripes… au coeur ! Il nous livre la galère, la faim et la soif, la pauvreté extrême comme très peu d'entre nous sont capables de l'appréhender – la mistoufle, en bon français dans le texte -, les maladies, l'attente, l'espoir… Il nous offre des paysages, des tronches, des odeurs, une société tantôt désespérée, tantôt galvanisée, organisée selon des règles propres à l'époque torturée qu'il décrit, avec ses palliatifs, ses jeux d'enfants, ses étapes, l'apprentissage de la vie, le fatalisme, une puissante dérision, l'amour et… la mort.
L'omniprésence de la faucheuse – le concept de mort demeure relatif du début à la fin – permet de mettre chaque élément de ce roman en lumière. Un univers riche, plus souvent tortueux et repoussant qu'idyllique, mais subtile et vrai. Un délice d'humanité.

Comme dans ses autres textes, Frédéric Soulier explore la noirceur de l'âme humaine, avec selon moi une maîtrise croissante. Il ne fait pas du glauque ou du triste pour la forme, non. Il nous retourne les boyaux et l'esprit pour susciter des réflexions profondes sur des comportements, nos comportement. Alors on s'imagine dans ces situations, et on souhaite ne jamais avoir à explorer cette partie de nous-mêmes.

Non content de renverser les règles et la conjoncture démographique contemporaine, il navigue avec une aisance remarquable entre dystopie et anticipation, alternant récit satirique et élans humanistes. Ah ! Pour un misanthrope, le moins que l'on puisse dire, c'est qu'il soigne ses lecteurs le père Soulier. Vous passerez du dégoût sincère au sourire attendri en quelques lignes, de la larmichette au bidonnage, du désir à la vengeance, du délire à la réalité, etc.
Un talent rare, tant dans le style que pour le partage, qui devrait conduire Frédéric Soulier au succès qu'il mérite. Merci pour ces supers moments de lecture.
Lien : https://editionslintemporel...
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Détour incontournable par Agira.
Spectatrice, voilà ce que j'ai été tout au long de ce récit contemplatif.
Ce mot n'a rien de péjoratif, bien au contraire, les émotions sont présentes. L'auteur, dont j'ai déjà pu lire les prouesses digressives et le scrupuleux talent mis au service du mot dans d'autres titres, donne à l'immobilisme un caractère d'une grande intensité. Oui, la tension de ces vies de réfugiés mène dans une dimension parallèle dramatiquement réelle où l'attente est une action à part entière. Je me suis tout de même posée la question sur le choix du camp pour son nom. Les personnages sont, cette fois encore, loin des clichés psychologiques lisses et sans saveur pour donner du corps à une humanité pas toujours triomphante.
J'ai beaucoup aimé cette lecture, inventive, aux dialogues riches à grand renfort de vocabulaire fouillé, insolite ou inusité, malmené. Bref, en plus d'adorer avoir de bonnes occasions d'ouvrir mon dictionnaire, j'aime être dérangée de cette façon dans mes lectures. Celle ci est plus que recommandable et d'actualité.
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J'ai une grande admiration pour le auteurs qui se servent d'un sujet surexploité (la contamination à grande échelle.) pour te livrer une oeuvre des plus originales. On laisse de côté le trait d'union de côté, ici on parle des morts et des vivants, et surtout de l'âme humaine malmenée dans des situations extrêmes. Tout au long de l'histoire vous aurez une résonance avec notre d'aujourd'hui... La religion qui nourrit la guerre qui engendre une barbarie admise. On est à se demander qui est réellement contaminé ?? Quant au style de l'auteur, goutez y ! Vous en reprendrez sûrement !
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