Ce recueil regroupe 2 histoires distinctes : "Un deuil dans la famille" (A death in the family, épisodes 426 à 429 de la série Batman, 1988) + "a lonely place of dying" (épisodes 440 à 442 de "Batman", et 60 & 61 de "New Titans", 1989).
A la fin des années 80, Batman est affublé d'un nouveau Robin (Jason, Todd), l'ancien (Dick
Grayson) ayant gagné ses galons de superhéros à part entière sous le nom de Nightwing et faisant partie de l'équipe de Titans. Problème : Jason Todd ne rencontre pas l'adhésion des lecteurs. Solution :
Jim Starlin doit écrire un scénario permettant de mettre Jason sur la touche. Résultat : "Un deuil dans la famille" dans lequel Jason Todd part à la recherche de sa mère et tombe sur le Joker.
Avec cette histoire, nous sommes à la fin des 80, le marché américain des comics achève sa mutation en passant de la vente en kiosque à la vente en librairie spécialisée. Les responsables de série développent de nouvelles méthodes de marketing pour augmenter la visibilité de leur produit. Après une période flottement au scénario, Dennis O'Neil (le responsable éditorial de la série mensuelle Batman) sait qu'il tient une équipe solide avec
Jim Starlin au scénario et
Jim Aparo aux dessins (encré par Mike DeCarlo). Mais il lui faut absolument trouver comment le faire savoir. Son premier essai est la création du concept de la minisérie dans la série avec Ten nights of the Beast (en anglais). C'est un succès. "Un deuil dans la famille" reprend la même recette en l'améliorant encore.
Dans les sphères éditoriales, les responsables n'arrivent pas à trancher s'il faut évacuer cette encombrante version de l'assistant adolescent (sidekick) définitivement ou temporairement. Dennis O'Neil a une proposition de génie : DC Comics va faire voter ses lecteurs, par téléphone, pour savoir ce qu'il préfère. Tapez 1 Jason survit, tapez 2, Jason meurt. Et tout ça 15 ans avant le Loft et la Star Ac', et tous les programmes interactifs de la téléréalité. L'industrie des comics franchit un bond dans le domaine de l'interactivité.
L'histoire trahit son âge avec ces sentiments exacerbés, une logique infantile (comme par hasard le plus grand des superhéros intervient à la fin pour emporter la victoire), et des codes graphiques encore à destination d'un lectorat jeune (un personnage arrachant son masque pour dévoiler la cagoule de Batman en dessous). À condition de supporter ce mode de narration, le lecteur peut satisfaire sa curiosité quant aux circonstances de la disparition de ce Robin. 3 étoiles pour la valeur historique (sinon 2 étoiles comme récit témoin de son époque).
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Après le succès commercial du décès de Jason Todd, la question se pose de savoir s'il doit y avoir un nouveau Robin ou pas. à l'époque, Dennis O'Neil (responsable éditorial) expliquait longuement que beaucoup d'enfants avaient été traumatisés par la mort de ce héros et qu'ils avaient besoin d'un nouveau Robin. Dans la réalité, DC Comics était confronté à 2 soucis. le premier est que le personnage de Robin est décliné sur moult produits de merchandising (mug, figurine, draps, caleçon...) et que le département marketing exigeait son retour pour continuer à pouvoir vendre des produits dérivés. le second problème est que sans Robin les histoires de Batman ressemblent de plus en plus à celles du Punisher : exterminons les méchants avec le maximum de violence. Ça tourne en rond et ça aliène une partie du lectorat. La décision est vite prise.
"A lonely place of dying" raconte comment un jeune homme du nom de Tim Drake a été marqué à vie par une sortie au cirque au cours de laquelle 2 voltigeurs ont trouvé la mort (les parents de Dick
Grayson) et Batman a protégé leur fils. Plusieurs années plus tard, Batman a un comportement de plus en plus violent et de moins en moins intelligent, juste après l'annonce de la mort de Jason Todd. Tim Drake se donne pour mission de rabibocher Bruce Wayne et Dick
Grayson pour ramener un peu de lumière et de joie dans la vie du Chevalier Sombre (Dark Knight).
Marv Wolfman (scénariste) combine très intelligemment les exigences éditoriales (Tim Drake doit être sympathique sans être nunuche et son histoire doit le rendre légitime aux yeux des fans) pour dérouler un scénario plus fin que les comics de l'époque. Il est impossible de résister à la logique et aux sentiments de cette histoire qui ramène Robin dans le mythe de Batman. Malgré les grosses ficelles tirées par Two Face (Harvey Dent) le criminel de service, le scénario est intriguant et plein de saveur pour les fans.
Marv Wolfman sait même jusqu'où ne pas aller trop loin en laissant la fin relativement ouverte sur l'adoubement réel de Tim Drake par Batman. Il est aidé au scénario par George Perez sur 4 épisodes.
Coté illustrations, les épisodes de Batman sont illustrés par l'équipe en place de l'époque :
Jim Aparo aux dessins et Mike DeCarlo à l'encrage. Leurs planches sont d'un niveau de bons professionnels et se laissent regarder 20 ans après (malgré des choix de la coloriste parfois déconcertant, très simplistes). Les épisodes des Teen Titans sont mis en page par George Perez, dessinés par
Tom Grummett et encrés par
Bob McLeod. N'espérez pas vous régaler des cases pleines de détails de Perez. Là encore les dessins sont de qualité au dessus de la moyenne, mais Grummett et McLeod n'arrivent pas à donner le change sur la réelle implication (assez faible) de Perez dans les illustrations. 3 étoiles pour l'intérêt historique, 4 étoiles si vous êtes capables de passer outre la forme narrative à destination d'un lectorat de grands enfants ou jeunes adolescents).
Si Batman est un personnage dont vous souhaitez tout savoir, ce tome représente une lecture indispensable puisqu'il constitue tout simplement la fin de la carrière de Jason Todd et le début de celle de Tim Drake dans la famille de Batman. Il mérite 4 étoiles pour on intérêt historique, malgré une forme de narration juvénile. Si par contre vous recherchez d'abord une bonne histoire, sans curiosité affirmée pour ces événements, sans tolérance pour l'aspect nostalgique, il n'en mérite que 2.
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Le tome se termine par une histoire de 10 pages, écrite par
James Robinson et dessinée par
Lee Weeks, évoquant la perception que Jason Todd, Bruce Wayne et Alfred Pennyworth ont les uns des autres. 4 étoiles pour une sensibilité mesurée.