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Citations sur Voyage avec un âne dans les Cévennes (164)

L'enseignement de Modestine (l'ânesse) ne concerne pas que Stevenson. Notre époque serait avisée de l'entendre, d'en goûter la justesse car enfin, que sont nos voyages devenus dans notre siècle énervé, obsédé de vitesse, et voué à l'instantané ? Je me lève à cinq heures du matin, je suis à Orly à sept heures, à Goa dans l'après-midi : je ne me suis pas déplacé. L'avion nous a roulé dans la farine. Sous couleur de nous offrir le monde, il le confisque. : l'avion a créé le voyage immobile, le néant du voyage.

Gilles Lapouge
Extrait de l'Introduction
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C’était un doux vieillard, gentil, sensible, aimable, étonnamment ignorant. Sa femme qui n’était pas de manières si plaisantes, savait lire, encore que je ne suppose pas qu’elle le fît jamais. Elle témoignait d’une rare intelligence et parlait d’un ton tranchant comme quelqu’un qui porte les culottes.
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Le chemin était fort fatigant parmi la poussière et les éclats de pierres ; il n’y avait pas dans toute la contrée une seule auberge ni une boutique de victuailles où se restaurer un peu.
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À peine hors du village, Modestine, possédée du démon, jeta son dévolu sur un chemin de traverse et refusa positivement de le quitter. Je laissai choir tous mes ballots et, j’ai honte de l’avouer, cognai par deux fois la coupable en pleine figure. C’était pitoyable de la voir lever la tête, les yeux clos comme si elle attendait une autre correction. Je me rapprochai en hurlant, mais j’agis plus sagement que cela et je m’assis carrément sur le bord de la route, afin d’envisager ma situation sous l’influence lénifiante du tabac et d’une goutte de brandy. Modestine, pendant ce temps-là, croquait quelques morceaux de pain bis d’un air d’hypocrite contrition. Il était clair que je devais offrir un sacrifice aux dieux du naufrage.
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J’ai presque honte de poursuivre cette critique profane d’une règle religieuse. Toutefois, il y a encore un autre point au sujet duquel l’ordre des Trappistes appelle mon témoignage comme étant un modèle de sagesse. Vers deux heures du matin, le battant frappe sur la cloche et ainsi de suite, heure par heure, voire parfois par quart d’heure, jusqu’à huit heures moment du repos. Ainsi, d’une façon minutieuse, le jour est partagé entre diverses occupations. L’homme qui prend soin des lapins, par exemple, se précipite de son clapier à la chapelle, à la salle du chapitre ou au réfectoire tout le long de la journée. À toute heure, il a un office à chanter, une tâche à remplir. Depuis deux heures lorsqu’il se lève dans l’obscurité, jusqu’à huit heures lorsqu’il retourne recevoir le don consolant du sommeil, il reste debout absorbé par de multiples et changeantes besognes. Je connais bien des personnes, voire plusieurs milliers par an, qui n’ont pas cette chance-là dans l’emploi du temps de leur vie. En combien de maisons l’appel de la cloche d’un monastère morcelant les jours en portions faciles à entreprendre, n’apporterait-il pas la tranquillité d’esprit et l’activité réconfortante du corps ! Nous parlons de fatigues, mais la fatigue réelle n’est-ce point d’être un sot hébété et de laisser la vie mal gérée selon notre manière étroite et folle.
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Une pleine corbeillée de lois et de décrets, non plus que les sabots ou les gueules des canons d'un régiment de cavalerie ne peuvent modifier d'un iota la liberté de penser d'un laboureur.
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Je me suis rarement senti plus en accord avec moi-même, plus détaché des contingences matérielles. Le monde extérieur, dont nous nous protégeons dans nos maisons, m'apparaissait finalement comme un endroit délicieusement hospitalier. Nuit après nuit, dans les champs où Dieu tient maison ouverte, il semblait qu'un lit était fait et toujours prêt à accueillir. J'ai pensé redécouvrir une de ces vérités révélées aux sauvages mais restant cachées aux économistes. A tout le moins, j'avais découvert une nouvelle source de plaisir personnel. Mais alors que je jouissais de ma solitude, je devins conscient d'un manque singulier. J'aurais aimé avoir, allongée à côté de moi à la lumière des étoiles, une présence, silencieuse et immobile mais proche. Car il existe une communion plus apaisante encore que la solitude et qui, bien comprise, est la solitude faite perfection. Et vivre dans la nature avec la femme que l'on aime est bien la vie la plus libre et la plus accomplie qui soit.
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Personne ne connaît les étoiles qui n'a dormi, selon l'heureuse expression française, " à la belle étoile ". Il peut bien savoir tous leurs noms et distances et leurs grandeurs et demeurer pourtant dans l'ignorance de ce qui seul importe, leur bénéfique et sereine influence sur les âmes.
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Toutefois, je sais bien que nous sommes tous embarqués sur la mer
démontée du monde, tous enfants d’un même père et qui s’efforcent sur
beaucoup de points essentiels, d’agir de même et de se ressembler.
Et quoique ce fut, en un sens, par une sorte de malentendu qu’il me serrât si
souvent les mains et se montrât si enclin à entendre mes propos, c’était là
l’erreur d’une sorte de quêteur de vérité. Car la charité débute les yeux
bandés ; ce n’est qu’à la suite d’une série de méprises de ce genre, qu’elle
s’établit enfin sur un principe raisonnablement fondé d’amour et de patience
et une confiance absolue en notre prochain tout entier.
Si j’avais trompé ce brave homme, j’eusse volontiers continué à en tromper
d’autres de la même manière. Et si jamais, en fin de compte, hors de nos
voies individuelles et désolées, nous devons nous rassembler tous dans
une demeure commune, j’ai l’espoir auquel je m’accroche avec ferveur,
que mon frère montagnard de Plymouth s’empressera de m’y serrer les
mains une fois de plus.
Le Pays des Camisards, III - Dans la vallée du Tarn
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C'était un doux vieillard, gentil, sensible, aimable, étonnamment ignorant. Sa femme, qui n'était pas de manières si plaisantes, savait lire, encore que je ne suppose pas qu'elle le fit jamais. Elle témoignait d'une certaine intelligence et parlait d'un ton tranchant comme quelqu'un qui porte les culottes.
- Mon homme ne connaît rien, dit-elle, avec un mouvement de tête agacé. Il est comme les bêtes!
Et le vieux Monsieur donna acquiescement du bonnet. Il n'y avait point mépris de la part de l'épouse, ni honte chez le mari. Les faits étaient admis loyalement et ne tiraient pas autrement à conséquence.
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