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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
François Sureau, qui dans les années 80, était auditeur de deuxième classe au Conseil d'État est amené au tout début de sa carrière, à rédiger les conclusions sur la demande d'asile politique de réfugiés. Le dossier d'un nationaliste basque Javier Ibarrategui lui échoit, et il rédige les conclusions qui doivent décider du rejet ou non de sa demande, demande présentée par Georges Dreyfus. Mais dans les années quatre-vingt, l'Espagne franquiste n'est plus, ce droit d'asile ne paraît plus légitime, Ibarrategui est débouté, non sans avoir expliqué que des groupes franquistes étaient toujours actifs et qu'il risquait d'être assassiné.
Le chemin des morts est un récit très fort et surtout très sincère, où François Sureau, alors tout jeune juriste, plein d'illusions et d'idéalisme s'attelle à l'étude de dossiers de demande d'asile politique. Mais par naïveté ou crédulité, mais surtout s'attachant plus au droit qu'au contexte politique basque, il élabore consciencieusement le dossier qui préconise le rejet de l'asile politique d'un basque, dont les conséquences le hantent encore.
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Le chemin des morts, au pays basque, c'est le chemin unique qui, partant de chaque maison, conduit au cimetière.
Dans ce court récit, François Sureau revient sur une étape fondatrice de sa jeunesse, lorsqu'au début des années 1980, il devait statuer sur les demandes de droit d'asile des réfugiés politiques.
Un moment d'Histoire, une rencontre avec un ancien militant basque, et cette image ne cesse de l'accompagner dans toute sa carrière de magistrat, comme un veilleur sur sa conscience, un fantôme fidèle.
Le texte est court, mais nous plonge très vite dans une époque et dans les débats qui l'agitent. L'auteur, sait, tout en brièveté, revenir sur un fait marquant pour lui et le partager avec nous, ce qui peut donner un autre éclairage sur le reste de son travail et de ses interventions. Il sait allier la profondeur du sujet et la facilité de la lecture, chacun repartant ensuite avec ses propres questions.
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Le tribunal de la conscience...

Dans ce récit bref et saisissant, François Sureau relate un épisode capital de son expérience de juge de la commission du recours des réfugiés politiques dans les années 80. le jeune juriste se réjouissait alors de quitter le labeur torpide du droit administratif rural pour une cour qui appliquait un droit où « le vent de l'histoire passait entre les articles ».

Il eut à connaître du cas d'Ibarrategui, un ancien activiste basque ayant renoncé à l'action violente. Celui-ci était menacé dans la jeune Espagne démocratique par des factions franquistes dans un combat où « personne ne pouvait compter sur l'oubli ou le pardon ». Or le droit exigeait que l'on refuse l'asile politique à un ressortissant espagnol puisque l'Espagne entrait dans son processus de démocratisation. Accorder l'asile à un espagnol eût revenu à nier le changement de régime espagnol.

Le droit et la morale...

L'écrivain d'aujourd'hui voudrait retenir la main du juge d'hier. le tribunal jugea en droit et l'écrivain aurait voulu juger en espèce, en tenant compte de la singularité de la situation. Instruit de la faiblesse du droit, c'est sur le terrain moral que se place ce récit. Il met en scène la duperie à laquelle s'expose ce lui qui veut toucher à l'histoire en train de se faire.

Sureau donne vie à des personnages admirables : la sollicitude du juge Dreyfus, le courage résigné d'Ibarrategui… Tous sont mus par un souci éthique, par une droiture morale qui tranche avec les personnages habituels de la littérature contemporaine, agis par le désir, le sentiment ou le déterminisme. C'est comme si l'on retrouvait un chemin non pas mort mais délaissé, celui d'une littérature où la question de la vie bonne et du devoir est au coeur du texte.

Une clé pour comprendre l'oeuvre de François Sureau ?...

Le Chemin des morts semble répondre à une phrase qui m'avait étonné à la fin d'un précédent roman, Inigo : « Quiconque a tenté de garder les yeux ouverts après la trentaine sait sur quoi se fonde l'estime de soi et l'estime des autres et ce qu'elles valent ». J'étais surpris par ce dénigrement intempestif de l'estime de soi. Peut-être que le sentiment tenace de la faute exprimée dans le Chemin des morts explique en partie cette affirmation.

C'est un récit bref parce qu'il est adossé à beaucoup de silence. Ainsi, l'auteur clôt en disant avoir « payé son dû » et être revenu au droit après un « long détour ». La mention furtive de ce long cheminement, presque sans bruit et sans trace, trouvera peut-être son élucidation dans un prochain livre de François Sureau.


Fabien LACOSTE

Lien : http://bit.ly/17U6KA2
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Dans ce court livre, l'auteur nous raconte une expérience ancienne, qu'il a vécu lorsqu'il a été affecté à la commission des recours aux réfugiés. Il aura à statuer sur le sort d'un militant basque qui doit retourner en Espagne puisque ce pays est devenu démocratique. L'homme qui sait qu'il sera tué là-bas tente, sans animosité de défendre son droit de rester en France, pour se protéger.
François Sureau nous donne un témoignage fort et dérangeant. On ne peut que penser à cet homme, condamné à mort indirectement. L'auteur n'oubliera jamais son nom. D'autant plus que ce ce jour là un réfugié roublard a réussi à tromper la justice.
C'est un témoignage digne et sans ambiguïté que ce livre délivre. Il pose aussi la question du pouvoir des hommes et de la culpabilité.
Quant au chemin des morts c'est une autre histoire... Une jolie tradition basque.

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Dès 1979, et suite à la mort de Franco et au retour de la démocratie en Espagne, le gouvernement de Valery Giscard d'Estaing retirât le statut de refugié aux militants basques espagnols exilés en France, entraînant les premières expulsions au début des années 1980, tandis que les polices politiques continuaient d'être actives sur le sol espagnol et que les commandos du GAL (Groupe antiterroriste de libération) commettaient des attentats sur le territoire français ; vingt-trois assassinats commis en France leur ont été attribués entre 1983 et 1987.

Après l'élection de François Mitterrand, une vingtaine de militants basques déposèrent des dossiers devant la commission des recours de l'OFPRA (Office français de protection des refugiés et des apatrides).

Fraîchement émoulu de l'ENA, et dans cette ambiance «entre deux mondes» des années 1980, le narrateur siège depuis quelques mois au sein de cette commission, un poste peu envié de ses condisciples mais auquel il s'attache, emporté dès le départ par les enjeux humains, au moment où les dossiers de recours des basques y sont examinés.

«Lire ces rapports était toujours une épreuve. C'est que j'y devinais des vies sans pouvoir vraiment les comprendre, craignant toujours d'imaginer trop ou pas assez, souffrant pour finir de devoir les faire entrer par force dans les catégories du droit. Mais c'était mon métier, et je l'aimais malgré tout.»

Lecture brève et intense, «Le chemin des morts» est le témoignage saisissant d'un narrateur intègre qui, sans se justifier, veut simplement reconnaître une erreur de jugement, et éveiller la conscience du lecteur sur la distinction entre justice et droit.

«Trente ans ont passé [...] Plusieurs personnes que j'aimais sont mortes et leur apparence, malgré tous mes efforts, s'est effacée de ma mémoire. Javier Ibarrategui y est resté, comme pris dans des glaces éternelles. La faute a des pouvoirs que l'amour n'a pas.»
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Le Chemin des morts est un texte court et dense : 50 pages pour revenir sur la décision d'un juriste intègre, acculé par l'imbrication de l'histoire et de la raison d'État. D'excuses, il ne peut y en avoir : l'auteur analyse avec justesse les événements. François Sureau livre une intéressante réflexion sur la justice et le droit, sur les faiblesses humaines et celles du système. Sa sincérité et sa justesse forment un récit éthique, qui interpelle par le tragique de la situation. Une belle preuve d'honnêteté intellectuelle, dans un style sobre, au service d'un passé révolu : le Chemin des morts est âpre, mais absolument nécessaire.
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Ce petit texte d'une cinquantaine de pages est très fort, bouleversant. Il parle l'éthique, de justice, et devrait être lu par tous les magistrats et tous les politiques.

Jeune juriste dans la fin des années 1970, le narrateur est attaché au Conseil d'Etat et s'occupe de trancher les demandes d'asile. L'Espagne post-Franco étant redevenue un démocratie, Giscard annule l'asile politique des opposants et la commission doit statuer sur le cas de quelques Basques qui refusent de retourner en Espagne. Accéder à leur demande signifierait que la justice française ne croit pas à la réalité de la démocratie espagnole. En termes de droit, cela semble donc impossible alors même quelques signaux montrent que des groupes extrémistes sévissent encore.

Javier Ibarrategui est un des Basques qui demandent le maintien du statut de réfugié politique. Installé depuis longtemps en France, sans activité politique, il annonce clairement que sa vie sera menacée s'il retourne au pays mais qu'il accepte d'avance la décision qui sera prise. La délibération va vite, la choix est presque fait d'avance malgré l'opposition acharnée d'un des assesseurs et Ibarrategui retourne en Espagne, en application stricte du droit.

Le narrateur apprend peu après son exécution. Cette décision purement technique, prise en toute bonne foi, mais erronée le hantera tout au long de sa carrière.

Ce livre au très beau style se lit vite mais me marquera longtemps.

Lien : http://jimpee.free.fr/index...
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« du chemin des morts, j'ai fait le parcours de la ferme à la tombe. Mais plusieurs chemins étaient possibles, et je ne saurai jamais si j'ai emprunté le bon. »
Un jeune juge règle sans état d'âme le cas du réfugié basque Ibarrategui. Mais la dignité de l'homme et les conséquences de son jugement bouleversent sa vie.
Un court récit, aussi rapide qu'une sentence. Mais, une sentence qui n'en finit pas de résonner car « l'indifférence, et non le mal, avait brisé ces destins «
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Waow... Je viens de refermer ce petit livre et j'en ai le souffle coupé. Une belle intensité dans ces lignes puissantes, tantôt lumineuses, tantôt sombres.
J'ai toujours eu une pensée pour ces femmes et ces hommes qui doivent statuer sur le sort de requérants d'asile. Comment déceler le menteur, le profiteur sans remettre en question la parole du requérant qui a réellement besoin d'aide ? Comment décider de la sécurité d'un pays sans y être allé, sans s'en être imprégné, simplement en se fiant à un dossier trop souvent statique ? Comment arriver à laisser de côté ses émotions face à des récits de vie tout simplement insoutenables ?
Alors, je rends un hommage, un grand, un beau, à tous ceux qui travaillent avec ces humains en souffrance et qui luttent jour après jour pour plus de justice, de paix et de vérité !
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Court récit de François Sureau qui se concentre sur une expérience à la commission nationale du droit d'asile pendant les années 1980, j'ai beaucoup aimé le style, précis, froid et d'une efficacité diabolique.
Bien que je sache qu'il s'agit de la réalité dans le cas du Chemin des morts, j'aime les personnages réels ou de fiction torturés par un sentiment de culpabilité, l'un des sentiments les plus riches littérairement.
Cette coutume du chemin des morts au Pays Basque, que je ne connaissais pas m'a grandement intéressé. Pour ceux qui s'intéressent à la question, je conseille la lecture de Tomas Nevinson, de Javier Marias, qui, dans un tout autre style est pourtant tout aussi bien écrit.
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