Le titre «
L'or du temps » renvoie à l'épitaphe de la tombe d'
André Breton – chef de file des surréalistes – « Je cherche
l'or du temps », qui traduit une quête spirituelle inspirée des alchimistes, vers la liberté. Il suit (du moins au début) le cours de la Seine depuis sa source – un fleuve qualifié de « coulée grise et verte » et somme toute d'assez ordinaire, comme le plomb du quotidien, pour s'enrichir au fil des 848 pages d'une formidable moisson de noms, connus ou moins connus et d'autant d'expériences, littéraires, artistiques, architecturales militaires, et spirituelles. L'index des noms occupe à lui seul plus d'une centaine de pages. le fil rouge de l'ouvrage est un autre livre, « Ma source, la Seine » et le parcours de son auteur, Agram Bagramko, un peintre émigré russe, lié aux surréalistes avant d'émigrer aux États-Unis, et dont des illustrations émaillent les pages de
l'Or du temps. Ses souvenirs sont relatés par Grigoriev, un ancien cosaque hébergé dans le Pavillon de peinture de « la Geneste », propriété d'un professeur « M », docteur en médecine, lequel n'est autre que le grand-père de l'auteur, et héros de la guerre de 14-18, où il a été gazé. Les recherches, confirmées par les interventions de
François Sureau dans les médias (où l'on peut constater que les présentateurs n'ont lu que très partiellement le livre !) montrent cependant que ce peintre est un personnage de fiction ! L'auteur en effet revendique son envie de parler de son pays qu'il aime, comme le ferait un étranger, d'où ce choix. Les thèmes abordés sont extrêmement foisonnants, de l'auroch de Heck à l'encyclique cachée de
Pie XI en passant par le Jansénisme de Port-Royal, le duc de Richelieu (pas le cardinal), dont la statue surplombe à Odessa les fameux escaliers du « Cuirassé Potemkine). La galerie des personnages est également impressionnante, comme en témoigne l'épaisseur de l'index : Maigret, Babar, Sherlock Holmes,
Apollinaire, Lyautey,
Albert Londres,
Joseph Kessel,
Arthur Koestler…
La liberté de l'esprit, l'expérience spirituelle, l'expérience de la vie sont au coeur de chacune de ces visites.
Une lecture extrêmement roborative, donc, que j'ai espacée par les pauses de deux Maigret et de deux Manchette, pour éviter le vertige, y compris de mon inculture, par comparaison !