Sur l'amour et la mort

Sur l'amour et la mort/Patrick Süskind
le célèbre auteur du « Parfum » nous offre ici un florilège de réflexions sur l'amour et puis sur la mort avec quelques délicieuses anecdotes du quotidien qui valent leur pesant d'humour et d'audace. En effet la comparaison entre Orphée et Jésus en fin d'opus est osée.
D'entrée l'auteur affirme que ce que Saint Augustin disait du temps vaut pour l'amour : plus nous y réfléchissons plus il nous paraît se comprendre tout seul, mais si nous commençons à nous creuser la tête à son propos, nous n'en sortons plus. Stendhal le comparait à une sorte de fièvre, et Socrate à une ivresse, une maladie, un délire, une folie divine qui donne des ailes à l'âme. Pour les hommes, l'amour va avec le beau, le bien, le bonheur la perfection et c'est ainsi que l'amant voit l'aimé. L'amour est choses sublime, céleste et rédemptrice. Dans la Flûte Enchantée de Mozart on entend qu'homme et femme atteignent à la divinité quand ils connaissent l'amour. Et l'amour n'a pas d'âge, c'est bien connu, l'auteur faisant allusion à Philémon et Baucis, ce couple de vieillards phrygiens de la mythologie grecque cité dans Les Métamorphoses d'Ovide.
Mais l'amour présente une autre face : l'état amoureux induit une manière d'abêtissement passager de l'être humain et tout discours rationnel est vain pour éclairer l'amant.
Et puis comme Stendhal le pensait, l'amour instaure un rapport de nonchalante indifférence vis-à-vis de la mort. On observe alors une attitude qui cherche la mort comme seule libération possible d'une souffrance amoureuse insupportable, ou une attitude chevaleresque qui accepte la mort comme un risque nécessaire dans la poursuite du but érotique. L'auteur évoque alors le suicide du poète Kleist ainsi ce que celui de Werther dans l'oeuvre de Goethe, sans oublier Tristan et Iseut dans l'opéra de Wagner. L'amour d'Orphée pour Eurydice est aussi largement abordé avec un retour fatal des Enfers comme on le sait. Enfin par amour pour l'homme, Jésus offre sa vie. Orphée et Jésus ont tenté de vaincre la mort au nom de l'amour. Jésus a réussi mais Orphée a échoué.
Un petit essai très intéressant et d'une lecture agréable.

En quelques pages parfaitement liées, Süskind fait un parallèle édifiant entre l'amour et la mort. Un brin philosophique, parfois sur fond de roman, il aborde les deux thèmes avec clairvoyance et analyse. Cet essai pourrait sans conteste faire partie des classiques.

Quel délicieux petit livre!
Quelle intelligence et délicatesse pour parler de ces deux sujets majeurs, qui nous accompagnent dès notre premier souffle.
Pas grand chose à écrire d'autre que de le conseiller