Que dire de ce roman, que j'ai d'abord pris en main par obligation professionnelle, sans grande conviction, malgré les louanges que lui chantait ma collègue... ?
D'abord que la littérature Young Adult n'est définitivement pas pour moi, oui, ça, c'est clair ! Tant de malheur, de fatalité, de choix cornéliens, non... avec mon regard de jeune adulte (oui, admettez que c'est vraiment ironique dis comme ça), j'ai besoin de plus de lucidité dans le récit, de maturité , de raison ! Quand bien même nos personnages sont pris dans une situation impensable, impossible et indéniablement tragique... je n'ai pas réussi à me dire que tous ces cris et ces pleurs, ces extrémités, étaient inévitables.
Pourtant, Lochan et Maya, respectivement âgés de 17 et 16 ans, ne sont pas des adolescents. Ce sont bien des adultes, avec un foyer à gérer, un boulot (ils sont lycéens, mais ça revient presque au même du point de vue du roman : obligations, horaires à respecter, etc.), des enfants à assumer et à éduquer, depuis l'ado en crise jusqu'à la petite dernière de seulement 5 ans. Vu leur capacité à maîtriser ce quotidien non comme des adolescents mais belle et bien des adultes responsables, je me suis beaucoup attachée à eux mais j'ai finalement encore moins saisi ce manque de raison et de discernement quant à leur relation.
Parlons-en de leur relation : un frère et une soeur qui tombent éperdument amoureux l'un de l'autre. C'est un sujet très délicat que l'auteure aborde ici très intelligemment, en s'effaçant totalement : ni complaisance, ni jugement, juste les faits. Ils sont irrémédiablement amoureux, c'est ainsi et personne, pas même eux, ne peut rien y faire. Ce roman est écrit de telle façon qu'on en oublie qu'ils sont frère et soeurs, on a juste envie qu'ils soient heureux et qu'ils puissent être ensemble - même quand, comme moi, on a commencé cette lecture avec appréhension. Leur amour devient concevable, semblable à n'importe lequel finalement.
J'ai commencé cette lecture en pensant au mien, de frère, que j'aime par dessus tout, c'est sûr, mais jamais de cette manière, et je me demandais comment un amour fraternel pouvait évoluer de cette manière... et très vite j'ai compris : l'amour que je porte à mon petit frère a été instigué par mes parents, par leur amour à eux, pour nous. C'est ça qui nous rend frère et soeur, au delà des liens du sang. Eh bien Lochan et Maya n'ont jamais eu ça, des parents aimants, présents, pour les souder l'un a l'autre comme une fratrie. Ils ne sont pas frère et soeur autrement que biologiquement (et en parlant de sentiments, la biologie ne veut rien dire.) Ils sont complices, partenaires, ils travaillent main dans la main pour créer ce dont eux ils ont cruellement manqué : un foyer pour leurs frères et soeurs cadets. Donc non, regarder leur amour sous le prisme de sa propre fratrie ne sert à rien, ne veut rien dire, leur situation est différente. Ils sont un couple et ça, depuis le tout départ. Nous, lecteurs, assistons au moment où ils s'en rendent compte, simplement.
Ce roman est magnifique. J'y ai trouvé quelque chose que je n'y cherchais pas, et quand bien même cette littérature adulescente a le don de m'agacer par ces tournures toutes faites, par ces drames, ces extrémités inéluctables, cette fatalité digne d'une tragédie grecque, je dois admettre que
Forbidden m'a secouée. J'ai lu les dernières pages agrippée au livre. Quand bien même la fin est attendue et difficilement évitable pour nos protagonistes, on croit jusqu'au bout à une autre finalité, à une fin différente
à une fin heureuse (oui, ce livre finit très mal, prévoyez les mouchoirs si vous êtes un peu émotif !) pour ces deux ados qui s'aiment à la folie.