N'ayant ni famille ni proches, il appartenait à ce que le jargon des services funéraires appelait " les personnes dépourvues de ressources relationnelles". Il partirait dans un camion et serait enterré dans l'indifférence d'une tombe anonyme. Personne n'assisterait à l'inhumation et aucune recherche particulière ne serait entamée. " Nous n'existons pas sans l'autre".
Puis la campagne s'était transformée en une succession de petites villes grisâtres et ses yeux avaient accroché le mot PARIS sur un panneau. Malgré tous ses malheurs, une larme d'espoir avait coulé sur ses jours. Paris, capitale des Lumières et du pays des droits de l'homme. Quelqu'un, quelque part, allait venir la secourir....
La cruauté humaine est sans limite quand on lui donne un alibi.
Ses malaises et ses cauchemars n’étaient que le sommet d’un iceberg, dont la base se perdait dans un abîme qu’il ne faisait pas bon aller l’explorer
Eric (le SDF) ne pouvait pas lui en vouloir, depuis le temps qu’il galérait dans cette ville il avait pigé que les gens n’étaient pas foncièrement mauvais, ils avaient juste peur. Peur qu’on leur parle, qu’on les mettent en retard, qu’on leur demande de l’argent, qu’on leur file des maladies, qu’on les agresse, peur de tout un tas de trucs au point de se réfugier sur l’écran de leurs téléphones portables ou dans leurs bouquins pour être le moins en contact possible avec le reste du monde. Y avait qu’à lever la tête pour voir tous ces gens fuir la réalité dans laquelle lui et ses camarades d’infortune se trouvaient empêtrés
Il était persuadé que l’identité d’une personne se créait en réaction aux relations entretenues avec ses semblables. « Nous n’existons pas sans l’autre » … »
Il n'était pas croyant, du moins pas catholique, nibfan des religions dogmatiques,mais dans ce genre de moment, il avait envie de remercier quelqu'un ou quelque chose pour lui avoir éviter Lemire.
A force de côtoyer la mort et le milieu médical, on finissait par se négliger soi-même.
C'était la première fois que ses voyages oniriques le menait dans un tel endroit. Après le labyrinthe de son enfance et la forêt de sa culpabilité, allait-il se voir condamné à errer indéfiniment dans un champ de ruine ? Ça ressemble pourtant à ta vie, dit une petite voie qu'il fit immédiatement taire.
Comme d'habitude, la voix gutturale de Bob avait surgi de nulle part. Tomar se retourna machinalement, mais il n'était pas là. Le cadavre se trouvait juste devant lui, quelques mètres plus haut sur la colline. Il était assis en tailleur sur un petit tas de feuilles, tel un yogi apocalyptique.