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La présentation de ce recueil de poésie par les éditions l'Arche est pour le moins atypique. D'un côté, on trouve la version traduite en français, de l'autre, celle en version originale. Il suffit donc, pour les amoureux de la langue de Shakespeare, de retourner l'opus.

« Imagine un vide
Une infinie et immobile noirceur
La Paix
Ou l'absence au moins
de terreur. »

Voilà, c'est ainsi que ça débute. Et c'est fort, violent même, et ce sera ainsi tout du long. Pas de filtre pour une parole percutante où la rage se fait entendre à travers les mots.
On va entendre sept monologues de sept personnages différents, à la dérive. Dans un monde pollué ou le lien social s'est détérioré, la jeunesse a recours à la drogue, l'alcool ou les médocs pour tenter d'oublier son désespoir, sa difficulté de vivre.
Que leur propose la vie ?

« Je sais que j'existe
Mais je ne ressens rien,

Je suis éclipsé
Je suis ailleurs. »

Avec des vers asymétriques, le rythme est haché. On ressent le vide et la pesanteur de la vie. N'y a-t-il aucun recours pour une vie meilleure ? Peut-être plus d'amour, en tout cas c'est ainsi que ce termine ce recueil

« Je suis dehors sous la pluie
C'est une nuit froide à Londres
Hurlant à mes proches
De se réveiller et d'aimer plus
Suppliant mes proches de
Se réveiller
Et d'aimer plus. »

« Ce poème a été écrit pour être lu à voix haute » est-il précisé sur la page du titre. Peut-être est-ce pour cela que j'ai eu du mal à entrer vraiment dans le texte. L'entendre déclamer à voix haute, voire crié, m'aurait sans doute aidée.

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Lecture-expérience en trois temps

Temps 1, le Français.
Qu'on leur donne le chaos, traduit par Louise Bartlett et D' de Kabal.

Un puissant cri collectif, un long témoignage qui réunit à 4h18 dans la nuit londonienne sept voix qui disent leur colère, hurlent leurs attentes, dévoilent leurs espoirs. Un cri poétique, un cri politique, le cri vital de ceux qui étouffent.

« L'Europe est perdue
L'Amérique est perdue
Londres est perdue
Et on crie encore victoire »

En verbalisant ces désillusions, en diagnostiquant le monde, Kae nous entraine vers le rebond.

« Hurlant à mes proches
de se réveiller et d'aimer plus
Suppliant mes proches de
se réveiller
et d'aimer plus »

C'est cash et destroy ; interpellant et bouleversant ; dérangeant et salutaire.


Temps 2, l'Anglais.
Let them eat chaos

Pouvoir quasi immédiatement se plonger dans la version originale de ce texte est un plus indéniable (même si les deux textes gagneraient à figurer en vis-à-vis). La puissance de certaines phrases se révèle davantage, comme la musicalité d'autres passages. Et le va-et-vient entre les deux textes devient alors enrichissement.

Temps 3, la vidéo.
Let them eat chaos – Live

Écouter et regarder enfin la performance de Kae, livre en main en version GB, et prendre le choc de ce flow incroyable, passant de la douceur fluide et langoureuse à la rage extrême de celle qui donne tout. Mais ça, ça ne se raconte pas…
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Imagine qu'il est 4h18
Heure un peu pourrie
Pour être réveillé.e
Mais aussi pour constater que tu es endormi.e
En état de veille, dissocié.e de la vie et du vivant
Imagine sept coeurs meurtris
Qui raconte la mélodie de leurs angoisses
Dans la ténèbre
Comme ça fait mal de se regarder
Vide
Qu'est-ce qu'on leur donne
A ces corps affamés
A ces esprits neutralisés
A ces coeurs surmenés
Le chaos est partout
On voit
Mais on ne bouge pas
Elle est quand l'heure du réveil
4h18
Heure pour suffoquer
Cette fois je vais me réveiller
Sept fois je vais constater que c'est plus dur
À faire à dire à porter
Cette jeunesse est brisée
Et tous les dérivatifs sont bons à prendre
Mais ils continuent de plus les endormir encore
Sept fois de repos impossible
Cette fois j'entends le cri collectif
Imagine un désespoir
Tellement immense qu'il est perceptible
Dans toute la ville
Au point exact de toutes ces questions
Absurdes et entêtantes
Somme toutes éternelles et fugitives
Qui nous assaillent avant le lever du jour
Imagine que tu ressens le chaos intérieur
De ces septs jeunes
Imagine que tu ressentes leurs intimes
Et que tu puisses voir toi aussi
Par ces fenêtres que leurs monologues
Sont le propre reflet de tes pensées
De tes propres observations de ce monde
Absurde qui va droit dans le mur
À quel moment tu te réveilles
À quel moment tu prends conscience
À quelle heure tu aimes
Et à quelle heure on se réveille
Pour réparer les dégâts des tempêtes
De l'hyper-consommation de l'hyper-avidité
De l'hyper-non-sens de nos vies
4h18
Heure de la solitude
Mais si on y est tous réveillé.e
A écouter ce poème urbain
Qui hurle toutes sortes de vérités
Est-ce qu'on ne rapprocherait pas nos coeurs
Est-ce qu'on ne pourrait pas en faire
L'heure de l'Amour
Imagine l'infinie possibilité de ce nouveau jour
A la lumière de nos éveils du coeur
Dans une mission interstellaire de partage
Et du chaos naîtra, un Soleil…
Je me réveille avec Kae Tempest, et vous?
Coup de 🖤
Lien : https://fairystelphique.word..
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Kae Tempest revient avec un ouvrage qui nous embarque telle une bourrasque dans le plus beau des chaos. Celui de notre société qui en demande toujours plus, jusqu'à ignorer le vrai sens de la vie.
L'humain, être magnifique dont l'ego et le train-train quotidien à dissimuler sa lumière. C'est dans une rue de Londres que nous rencontrons plusieurs personnalités aux bourses et chemins différents. Leur point commun ? Trouver un sens à leur existence.
En ces temps où le monde s'est retourné pour bouleverser ce que nous avons laissé installé – par habitude, par soumission – Kae Tempest demande aux coeurs de chacun de se réconcilier avec l'amour, avec eux-mêmes, avec chacun de nos atomes et de prendre conscience de qui nous sommes.
C'est à travers une poésie cinglante que l'autrice soulève les dessous de l'illusion parfaite dans laquelle nous vivons. L'immersion dans le récit est intense, il n'y a pas d'adaptation ; le coeur est attrapé au vol et transporté.

Cette lecture m'a chamboulé plus que de raison. Et pour cause ; Kae Tempest a su poser des mots brutes et à la fois touchant sur le renversement de cette époque.
Merci à l'équipe de Gleeph de m'avoir permis de pouvoir participer à la chronique de cette belle aventure au coeur de la source des émotions humaines.

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Il est 4h18 selon Kae.

Ici Londres alors que les Happy hours se propagent dans les rues à une vitesse étincelante, alors que la Terre se prépare à être scrutée façon zoom de cinéma, laissant apparaitre la luxueuse crasse humaine de ce qui se déroule dans tous ces putains d'appartements londoniens -

ou de n'importe quelle grande ville, n'importe quel ailleurs d'ailleurs - et, si tant est que le bitume bouffe la terre et qu'il gangrène Alicia Esther Jemma Bradley Pious le temps de quelques vers, souvenez-vous, c'est le Happy Hour.

Qu'on leur donne le chaos est un long poème qui se lit aussi bien en slam qu'une nouvelle, et dont les thèmes récurrents de Kae viennent te happer façon pythie moderne balançant sa prose à balles réelles.

Ça coule comme du miel gâté dans les oreilles, les décors bouffent du sombre, les corps s'emmêlent et se détruisent, à l'image des petites soeurs et des petits frères que nous étions, projeté.es dans cette culture dominée par les sons furieux de The Prodigy et, qui ont cru longtemps être invulnérables et éternel.les. La relève insolente et parfaite aux baby-boomers qui nous gavaient de biberons pendant qu'on louchait sur les cachetons.

No future vs. Chaos

La désillusion selon Kae est magnifique, elle éloigne de l'aigreur et c'est ce qui fait toute la différence. de pessimisme romantique à s'en gaver jusqu'à la moelle. Qu'on découvre ses écrits ou qu'on se conforte dans son oeuvre, ça propulse au premier plan la honte et la rage d'une génération bercée d'illusions.

Encore ? Of course, dear.

Je remercie Les éditions de L'Arche et l'application Gleeph pour m'avoir envoyé ce livre afin qu'il soit lu en avant première. C'est un novembre aux allures de fin du monde, qu'on leur donne le chaos.

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Sept voix dans la nuit, 4h18 à Londres, on est paumé, seul et sans sens : contemporaine colère. Kae Tempest déroule son texte, ses sonorités puissantes, ses collages de pertes et de défonces, d'anéantissements salariales et de fatigues quotidiennes. Qu'on leur donne le chaos pourtant ne cède pas à la résignation : dire ses existences suffirait, qui sait, à restaurer, à inventer, leur capacité d'amour.
Lien : https://viduite.wordpress.co..
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Un poème urbain qui visite la nuit de sept londoniens qui n'arrivent pas à trouver le sommeil, en proie aux doutes, au vide, à l'absence de sens de leurs existences.
4h18 - une tempête et les voix des sept londoniens s'unissent dans un cri collectif, exprimant toute la colère, les peurs le mal être et les désillusions d'une génération qui étouffe.
A travers ce long poème, Kae Tempest, ambassadrice du Spokenword, du Slam et du Rap outre manche, nous donne à écouter le monde contemporain dans ses vertiges, ses peurs, à ressentir l'incandescence de ce monde. Et elle nous exhorte à nous réveiller, à vivre plus.
« La vie, c'est juste un truc à faire »
L'ouvrage est présenté en version bilingue et c'est un parti pris intéressant. On peut passer d'une version à l'autre, apprécier la puissance du flow de Kae dans la version originale et le travail remarquable de restitution en français réalisé par la traductrice Louise Bartlett (qui a également traduit un autre recueil de Kae Tempest que je suis en train de lire- Étreins toi - également en version bilingue). On ne le dira jamais, un traducteur (trice) est un auteur(e) à part entière. En offrant la possibilité aux lecteurs d'avoir accès au texte source, ces derniers peuvent mesurer la difficulté de la tâche du traducteur et des trésors d'invention et de création dont il doit faire preuve pour restituer au plus près, et avec les contraintes et les ressources de sa propre langue, le flow, le style percutant et l'oralité revendiquée de ce poème.
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Le poème est épique, brutal, violent, chaque mot gifle, l'écriture est directe, percutante, on est comme abasourdis devant une telle rage. Des monologues se succèdent, ils sont sept, clamés simultanément par de jeunes gens quelque part dans Londres. le système britannique, comme tous les systèmes politiques capitalistes, a échoué, et pourtant il continue à pleine vitesse dans le mur. La jeunesse est désarmée, presque incrédule devant la catastrophe en cours, alors il y a les palliatifs, drogue, alcool, le pouvoir des paradis artificiels. Car désastre écologique, car avenir compromis, bouché, car relations humaines détériorées par le virtuel, vendues, car le racisme, car la haine.

On ne croit plus en rien, alors on s'abrutit par des dérivatifs (« Je fais mes heures / pour gagner mes cachetons »), mais aussi par les selfies qui développent un peu plus un ego déjà surdimensionné. Texte en tous points vertigineux, il est un long cri de révolte, une poésie sociale et contemporaine dans laquelle ne sera fait aucun prisonnier, dans cet amas humain où le désespoir règne désormais en maître, guidé par la gentrification.

« L'Europe est perdue

L'Amérique perdue

Londres est perdue

Et on crie encore victoire.



C'est le règne du non-sens

Et nous n'avons rien appris de l'histoire.



Les gens sont morts de leur vivant

Étourdis par les lumières des rues.

Mais regarde comme la circulation continue ».

Ce poème sans concession, c'est pourtant un éditeur de théâtre qui l'a ressorti en 2022, peut-être parce que c'est une poésie qui peut se déclamer sur scène, être jouée. La version proposée ici est bilingue, pas en une mise en page du face à face habituel de deux langues, mais bien un texte français jusqu'à la moitié de l'ouvrage, que l'on retourne ensuite pour découvrir la version anglaise. Kae TEMPEST est une artiste britannique multiculturelle : poète, théâtreuse, rappeuse et romancière. Ce texte me paraît être parfait pour être lu des trois premières manières afin de faire passer le message (il est d'ailleurs précisé « Ce poème a été écrit pour être lu à voix haute »), il est aussi bref que brutal, traduit par Louise BARTLETT et D' de KABAL, le travail de retranscription n'ayant pas dû être de tout repos. C'est une réédition, l'originale, toujours chez L'arche, étant parue en 2016.

https://deslivresrances.blogspot.com/
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Les éditions L'Arche m'ont gâtée avant l'heure officielle des cadeaux de fin d'année.
Curieuse, je n'ai pas attendu (bouhhh!!!) fin décembre pour ouvrir le paquet. « Ô joie, un Tempest ! Merci bien les lutins de L'Arche ! »

Néanmoins je n'entends pas grand chose à la poésie, par goût c'est sûr, par incompréhension, souvent .

Mais avec Kae Tempest, c'est autre chose, encore.
Visuellement, ces enchaînements de mots sont comme les personnages que l'on y croise: de prime abord chaotiques mais évoluant dans la ville comme sur le papier pour trouver la place qui leur convienne le mieux.
De cette occupation de l'espace, en résulte un rythme, celui de la ville à 4h18. À l'heure où chacun a rejoint son confort de façade, quelques âmes errent encore, les yeux et le coeur ouverts sur les non-sens de leur existence, de l'existence tout court.
Le bonus c'est la version en langue originale.

Lire Tempest c'est définitivement se faire décoiffer par son souffle façon furvent (Cf La Horde du Contrevent, Damasio).



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Ce livre m'a été envoyé par l'éditeur et sincèrement, merci à L Arche pour la découverte.

Je l'ai lu dès réception, en pleine nuit, et je me suis sentie bien moins seule, accompagnée par ces sept inconnus qui à travers leurs maux, m'ont poussée à me confronter aux miens. Ça n'a pas été tendre ou facile, tout le contraire même, une véritable tempête qui m'a secouée de l'intérieur, faisant ressortir parfois jusqu'à des questions et peurs enfouies profondément. Mais comme aucun jugement n'est porté sur ces âmes, incapables de trouver le repos, je ne me suis pas non plus sentie jugée ou pointée du doigt.

J'ai vraiment été bouleversée par certaines pages. Il y a des moments que je préfère, certains qui m'ont moins "convaincue", mais je suis ressortie de ma lecture ébranlée, bousculée et les joues mouillées. J'ai souvent dû m'interrompre en pleine lecture, la respiration coupée, comme si je venais de recevoir un coup en pleine poitrine.
"La vie c'est juste un truc à faire." Cette phrase si simple mais si insoutenable au final, m'a fait penser à tant de choses en si peu de secondes... Ce n'est qu'un exemple parmi d'autres, mais ça souligne assez bien pourquoi j'ai apprécié cette oeuvre. Au-delà du message, de l'intensité des émotions, il y a la plume. J'aime énormément lorsque les mots sont "simples", le style "épuré" et que pourtant, on ne ressort indemne d'aucunes des déflagrations. Lorsqu'une oeuvre nous rappelle la force, le pouvoir et la portée des mots.

J'apprécie d'ailleurs qu'on ait le droit également au texte en VO. L'idée est géniale et c'est une super expérience de pouvoir profiter de la version originale.
Je dois du coup saluer la traduction de Louise Bartlett et D' de Kabal qui ont fait un boulot magistral.

C'est une expérience que je conseille à tou(te)s et que je ne regrette absolument pas.
Le mot sur la carte accompagnant mon livre espérait que la nouvelle tempête de Kae saurait m'emporter, je peux assurer qu'elle n'a eu aucun mal à le faire. Merci encore pour ce bout de chaos.
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