Spoilers.
Une histoire et une écriture inspirées, le tout dans un enrobage réussi d'humour et de sensibilité. le début du roman est un des meilleurs moments, où l'on suit le périple de la vieille Gisèle avec son caddie, qui peste en bonne citoyenne contre les dégradations de panneaux publicitaires orchestrées par un taggeur inconnu. C'est drôle, ça met en scène une vieille un peu aigrie qui passe son temps à juger et condamner les jeunes et tous ceux qui ne se conforment pas à son étroitesse d'esprit. Et par la suite, les trois personnages qui s'allient pour aider Rose-Aimée en deviennent très touchants, notamment Gisèle, en ce qu'on devine leur solitude subtilement évoquée par l'autrice.
Les autres personnages sont hauts en couleur, notamment Papi Ferraille, le vieux anarchiste espagnol mécano (la scène avec le policier est hilarante), Victor, le fameux tagueur (qui s'efface un peu par la suite, dommage)... et le chien Youki, moche, stupide et un peu répugnant sur les bords ! La discrète Rose-Aimée, victime d'un vol à la tire, se révèle petit à petit pleine d'intelligence et émouvante. Jules est un adolescent en perdition, tient la route et suscite l'empathie.
L'histoire contient deux gags (la boule puante dans la boucherie, le vol du champagne au supermarché) avant de prendre un détour incidemment plus sérieux lorsque
le Gang des Vieux Schnocks prend sous son aile (sévère) le jeune Jules, et l'aide à résoudre ses problèmes (dette auprès d'un réseau délinquant avec leur chef RedBoule, décrochage scolaire l'année du brevet).
Ce livre est bourré de belles valeurs (solidarité, entraide, partage) et interroge sans ostentation certains sujets de société (marketing, malbouffe, street art). Quelques scènes sont touchantes voire font lâcher quelques larmes (le décès de Rose-Aimée qui casse la carapace de Jules).
Juste un bémol sur le personnage de Gisèle qui m'a paru trop hargneux voire agressif (envers Jules) quasiment tout le long du récit, même si ce tempérament essaye d'être nuancé à la fin car c'est elle qui contribue le + à rembourser la dette de Jules. Elle passe son temps à aboyer méchamment contre lui, ce qui la rend très antipathique. Aussi, je suis un peu mitigée devant la violence (physique et verbale) de certaines scènes (quand Jules est frappé à plusieurs reprises et apostrophé quand il pénètre dans la maison de Rose-Aimée).
Certains agissements discutables du Gang des Vieux Schnocks interrogent également la morale : la vengeance, le vol et la dénonciation calomnieuse (trucage et mise en scène pour faire arrêter RedBoule, certes délinquant et trafiquant, ils mettent une arme dans son sac).