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EAN : 9782729600815
Dunod (01/01/1984)
4.25/5   2 notes
Résumé :
Quatrième de couverture

Cet ouvrage vise à donner un formalisme permettant d'attaquer tout problème de morphogenèse en général. Issu d'une réflexion sur les mécanismes à l'oeuvre dans le développement embryologique, ce formalisme débouche sur une méthode universelle permettant d'associer à toute apparence morphologique une situation dynamique locale qui l'engendre, et ceci de manière indépendante du substrat - matériel ou non, vivant ou non vivant - q... >Voir plus
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« Stabilité structurelle et morphogenèse » du mathématicien français René Thom (1923-2002) est le premier, je crois, ouvrage destiné au grand public sur la théorie des catastrophes (1977, Interéditions, 382 p.), réédité plusieurs fois par la suite.
René Thom est un jurassien d'origine, qui passe par l'Ecole Normale Supérieure, avant d'obtenir son doctorat en 1951 à Paris sous la direction, et la canalisation, d'Henri Cartan. Il sera professeur à la Faculté des Sciences de Strasbourg de 1954 à 1963. Recevant une Medal Fields en 1958 sur la topologie différentielle, avant d'intégrer l'« Institut des Hautes Etudes Scientifiques » (IHES) de Bures-sur-Yvette de 1963 à 1990. Il y est en bonne compagnie, puisqu'il y a là Alexandre Grothendieck, puis Pierre Deligne et Alain Connes, tous Medal Fields. C'est vraiment l'âge d'or de ce centre des sciences. Pour ce qui concerne Grothendieck, j'ai récemment relu et commenté les deux tomes de son ouvrage « Récoltes et Semailles » un pavé de 2000 pages (2023, Gallimard, 1506 p.).
Dans « Stabilité structurelle et morphogenèse », René Thom expose sa théorie des catastrophes, en termes simples, avant de diriger le « Séminaire de philosophie et mathématiques », à partir de 1972 à l'ENS. le but était de confronter les idées sur les rapports entre philosophie et mathématiques. Entre autres, il était également invité d'honneur de l'« Oulipo ».
L'ouvrage est articulé autour de quatre thèmes, mathématique, scientifique au sens large, épistémologique et philosophique.
La partie mathématique est relativement simple à comprendre. Il identifie sept types de catastrophes élémentaires, suivant le nombre de paramètres impliqués, et donc le degré de la courbe qui contrôle le potentiel d'un système. Ce dernier est facile à conceptualiser. Une courbe du second degré (n = 2), par exemple une parabole, admet un seul point minimum. Pour simplifier, on choisira une courbe à concavité vers le bas. Ce point minimum va représenter le point se stabilité du système. Par contre, si on considère une courbe de degré quatre (n = 4), elle possède deux points minimum, séparés par un maximum. Il suffit d'imaginer une bille roulant sur cette courbe. le maximum est un point instable. Par contre, les deux minima peuvent être considérés comme stables, à condition que l'on ne vienne pas perturber la bille.
Passant de la courbe unidimensionnelle V = f(x) à la surface V = f(x, y), on obtient ainsi les sept formes de « catastrophes » possibles, suivant leur degré et le nombre de paramètres que sont les coefficients des équations, qui contrôlent les minima des courbes. On a ainsi le pli, la plus simple des formes en degré 3 à 1 paramètre. Si deux paramètres existent, et que la courbe est de degré 4, il s'agit d'une fronce. Pour trois paramètres en entrée, et une variable, il s'agit de la queue d'aronde. Pour deux variables, c'est un ombilic hyperbolique (vague) ou elliptique (poil) selon son comportement à l'infini. Enfin, pour quatre paramètres on aura un papillon si c'est une courbe, à une variable ou un champignon, ombilic parabolique si c'est une surface. Avec plus de paramètres, d'autres formes de catastrophes distinctes apparaissent.
On constate donc de suite que le nombre de variables (x) ou (x, y) va déterminer si c'est une courbe ou une surface. Par contre, le nombre de paramètres joue sur le nombre et position des points d'équilibre ou d'instabilité, suivant la concavité des courbes.
Et c'est là que tout est parti en catastrophe, c'est le cas de le dire. La théorie de René Thom est essentiellement une description mathématique d'un passage entre deux situations, c'est la description d‘une bifurcation dynamique. le système passe brutalement d'un état à un autre, c'et la notion de catastrophe. Par contre, dire que c'est un pli, une fronce ou un papillon, n'a aucun rapport avec l'évolution des paramètres. Ou du moins leur mode d'évolution. Un pli, par exemple, n'implique pas que le système se replie sur lui-même. Ce sont les paramètres qui décrivent topologiquement un pli, et non le système.
Cela a été la grande confusion, née lors de la parution de la théorie de Thom, par son application, surtout à des sciences moins structurées, comme dans les sciences sociales et humaines.
Il s'en est suivi une série d'articles scientifiques dans lesquels chacun trouvait une application de catastrophe à une situation de changement brutal, confondant souvent l'évolution topologique des paramètres avec l'évolution du système. On pourra lire à ce sujet le volume édité par René Thom et Jean Petitot « Logos et Théorie des Catastrophes » (1996, Patino, 515 p.). Il reprend les actes d'un colloque tenu en 1982 au Centre Culturel International de Cerisy. C'était au temps où ce centre organisait des rencontres intéressantes mêlant des sciences humaines et des sciences plus dures, comme la complexité ou la littérature.
C'est alors qu'intervient Sir Erik Christopher Zeeman (1925-2016). C'est un mathématicien anglais connu pour son travail en topologie géométrique et en théorie des singularités. Il a lui aussi participé à l'aventure de l'IHES, puis à « The University of Warwick », à Coventry, où de suite il crée six postes tous en topologie, ce qui permet au département de devenir immédiatement compétitif sur la scène internationale. Deux remarques à ce sujet. L'une est qu'il est capable d'échanger quatre postes académiques contre des subventions. Cela permet à des doctorants de diriger les recherches d'étudiants moins avancés par groupes de deux, d'une façon similaire au système de tutorat pratiqué à Oxford et Cambridge. La seconde est qu'il est anobli en 1991 pour son « excellence mathématique mise au service des mathématiques anglaises et de l'enseignement des mathématiques ». On pourra toujours se consoler en espérant des félicitations de collègues, assorties d'un pot à la charge de l'impétrant.
Christopher Zeeman popularise alors l'idée que la théorie des catastrophes permet de modéliser les situations où des changements progressifs dans les valeurs de paramètres produisent des effets brusques. Cette idée, développée par Stephen Smale, puis par David Ruelle, physicien à l'IHES, consiste à dire que l'approche topologique modifie profondément la manière dont on doit concevoir la modélisation mathématique. Ce qui n'est pas inexact. Elle débouche avec la théorie des systèmes dynamiques et le chaos déterministe. Mais c'est une autre histoire.
Le formalisme de René Thom débouche sur une méthode universelle permettant d'associer une morphologie quelconque à une situation dynamique locale qui l'engendre. Cette relation est indépendante du système, matériel, vivant ou non, qui en est le support. On introduit ainsi la notion de « catastrophe ».
Les applications vont de la physique pure, comme pour les singularités des fronts d'onde en optique, à la morphogenèse en biologie, jusqu'à la théorie des structures syntaxiques en linguistique.
On constate que les conséquences sur la philosophie des sciences vont rapidement bouleverser la façon de considérer les changements brutaux dans l'évolution des systèmes complexes. Avec Smale et Ruelle, on aborde l'aspect, à la fois causal et déterministe des systèmes, ce qui implique la notion d'attracteur, parfois étrange, qui permet d'anticiper l'évolution dynamique d'un système. Ce qui conduit parfois à la notion de chaos. A nouveau, ces concepts ont donné lieu à toute une littérature, souvent à base d'auto-organisation, appelée « Self Organized Criticality » (SOC), qui a pu remplacer la tarte à la crème des Ziegfeld Folies des débuts du cinéma muet. Pour se consoler des catastrophes, on pourra utilement consulter le livre de Pierre Senges « Projectiles au sens propre » (2020, Editions Verticales, 168 p.).

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Préface de Mieke BAL
Nouvelle édition actualisée
Dans le contexte actuel de guerre et de pandémie, la réédition de Mère Folle prend une tonalité particulière. En effet, dans un récit littéraire, l'ouvrage met en scène la rencontre anachronique des Fous d'un théâtre politique très populaire en Europe après la Grande Peste et la Guerre de Cent ans avec ceux des asiles où l'auteur a travaillé comme analyste pendant trente ans.
Demain, c'est la Toussaint. La narratrice, psychanalyste à l'hôpital psychiatrique, vient d'apprendre la mort par overdose d'un de ses patients psychotiques. Découragée, elle s'en veut et en veut à la psychanalyse de cet échec. Tentée d'abandonner son travail, elle y retourne néanmoins « à reculons ».
Débute alors un étrange voyage où des personnages surgis du passé, fous du Moyen-Âge, acteurs des Sotties – Mère Folle – se mêlent aux malades de l'hôpital, mais aussi à de grands penseurs comme Erasme, René Thom, Artaud, Wittgenstein ou Schrödinger avec qui elle engage des dialogues imaginaires. Cette traversée dialogique, qui est aussi un retour vers son propre passé, la rend capable de recevoir et mettre en actes les enseignements de Gaetano Benedetti à qui elle rend visite à Bâle pendant le Carnaval. Il lui conseille de s'immerger dans le délire de ses patients afin de devenir leur égal fraternel et de leur ménager un espace auxiliaire où pourront être rendues conscientes les « aires catastrophiques » constitutives de leur folie. le traitement possible de la psychose est à ce prix.
Dans le contexte actuel de guerre et de pandémie, la réédition de Mère Folle qui met en scène la rencontre anachronique des Fous d'un théâtre politique très populaire en Europe après la Grande Peste et la Guerre de Cent ans avec ceux des asiles où l'auteur a travaillé comme analyste pendant trente ans, se révèle particulièrement précieuse.
Dans la collection
Hypothèses
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