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3,83

sur 1080 notes
La berceuse de Kim nous laisse en éveil. Sa langue est magnifique et simple.
Elle nous dit les splendeurs de son enfance dorée puis, les misères épouvantables ,l'humiliation, les peurs, la précarité extrême, la fuite risquée et enfin son formidable rebond.

C'est un récit dense, touffu et délicat .
La beauté et l'horreur s'y côtoient.
Kim a vécu mille vies en une seule.
Chaque petit chapitre pourrait donner matière à une nouvelle.

Il faudrait relire ce petit livre pour le savourer vraiment. La première lecture, nous perd un peu tant elle est riche d'épisodes et de personnages .

La résilience de cette boat people nous laisse sans voix. le confort de vivre dans 'un pays en paix nous apparaît soudain comme le luxe absolu .
Belle lecture sensible.

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Ru : petit ruisseau, écoulement (d'eau, de sang, d'argent).
"Elle était très vieille, tellement vieille que la sueur coulait dans ses rides comme un ru qui trace un sillon dans la terre".
Ru : berceuse en vietnamien.
"Ce goût d'huile dans la gorge, sur la langue, dans la tête nous endormait au rythme de la berceuse chantée par ma voisine".
*
Ru est un récit composé de très courts chapitres, fragments du parcours de vie atypique de Kim THUY, auteure qui a quitté son Vietnam natal à l'âge de 10 ans avec d'autres boat-people ; elle vit aujourd'hui au Canada.
Elle nous confie avec émotion et réalisme ses souvenirs chargés de souffrances et de déracinement dans une narration à la chronologie entremêlée.
Depuis sa naissance dans une famille aisée durant l'offensive du Têt avec l'arrivée des communistes - pays alors divisé en deux : côté Sud les proaméricains, côté Nord les communistes, et la fuite de "boat-people" en passant par le camp de réfugiés en Malaisie, jusqu'à l'accueil dans le froid du Québec.
A travers des évocations olfactives, visuelles, émotionnelles, des repères lourds de sens, marquants à tout jamais, de moments tragiques ou miraculeux - sordides, de temps de guerre ; drôles, à l'arrivée au Québec ; ce récit représente les lueurs d'espoir à l'horizon - feuilles rougeoyantes des érables "où une main tendue n'est plus un geste, mais un moment d'amour", et aussi les cicatrices indélébiles.
*
Un hommage aussi à ces femmes qui portent sur leurs épaules, telles des marchandises, tout le poids de leurs propres blessures et des traumatismes de leurs maris, leurs fils, le dos arqué, tellement affligées.
"on oublie souvent l'existence de toutes ces femmes[...]très souvent, elles se sont éteintes ainsi sous cette lourdeur, dans le silence".
Humiliations, dépossessions... Puis devoir tout réapprendre, jusqu'à apprendre à ce qu'aimer veut dire.
"J'avais oublié que l'amour vient de la tête et non pas du coeur. de tout le corps, seule la tête importe. Il suffit de toucher la tête d'un vietnamien pour l'insulter, non seulement lui mais tout son arbre généalogique".
*
Ecriture tranquille, acérée, aux phrases lourdes d'émotions, qui nous plonge dans le vécu de ces exilés, réfugiés apatrides, survivants.
"La vie est un combat où la tristesse entraîne la défaite".
Une belle découverte littéraire.
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Je ne pense pas que ce fut une bonne idée de mélanger ces centaines d'anecdotes-souvenirs-réflexions entre le nid diamenté de Saigon, l'occupation communiste d'Hanoï, le camp thaï des boat peoples et la reconstruction à Quebec.

Beaucoup trop de mots et d'ennui.
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Quatrième de couverture : « Une femme voyage à travers le désordre des souvenirs ». Doux euphémisme pour une réalité beaucoup plus triviale : une jeune fille, une enfance dorée à Saïgon, l'arrivée du communisme au Sud-Vietnam, la fuite à bord d'un boat people, l'internement dans un camp de réfugiés en Malaisie, l'arrivée dans le froid du Québec…

« Ru », un récit poignant formé de nombreux courts chapitres comme autant de chroniques. Un texte pudique mais sans concession où l'on retrouve la légendaire douceur asiatique… Ni haine ni rancoeur, juste de la nostalgie de la part d'une exilée comme il y en a probablement tant d'autres… A la différence que peu d'autres, sans doute, possèdent la qualité de plume de Kim Thüy.
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Kim Thuy réussit à travers de courts chapitre à conter les souvenirs de petite fille née au Cambodge, exilée au Canada. Un premier texte plein de finesse, d'amour, Thuy se dévoile avec beaucoup de pudeur. Un voyage initiatque sans haine trente ans après avoir quitter son pays d'origine. Un récit qui fait appelle aux souvenirs et que Thuy restitue avec beaucoup d'élégance. Dans une écriture musicale, charnelle. Excellent.
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Dans son premier livre, Kim THÚY pousse devant elle une soeur presque jumelle, qui a son âge, un parcours voisin, des souvenirs communs.
À travers An Thịn qu'elle fait naître à Saigon au moment de l'Offensive du Tết, elle évoque le Vietnam de la guerre et celui de la paix que ses parents, ses deux frères et elle ont fui, la petite ville du Québec qui les a reçus, les anecdotes du décalage entre les modes de vie divergents, les incompréhensions, les adaptations… et se remémore les grands-parents, oncles, tantes, cousins, cousines qui les ont suivi en exil ou sont restés au Vietnam.

Très vite, elle parle aussi de ses fils, du lien qui les unit, de dilemmes devant lesquels elle a vu d'autres parents, durant la guerre et après, et de décisions qu'elle comprend depuis qu'elle est mère. de ses parents dont la vie a été évidemment bouleversée par l'arrivée des communistes et par l'exil. de souvenirs de la vie d'avant, des parcours entrelacés, toujours en écho avec ses choix de vie et ce qu'elle veut apporter à ses fils, forcément teinté d'exil, de différence.

Ce sont de petits cailloux qu'elle sème pour qu'ils puissent peut-être trouver leur propre chemin, à coup sûr afin qu'ils puissent comprendre le sien.

Je suis passée complètement à côté de ce monologue passant d'un sujet à l'autre, d'une époque à l'autre, esquissant en paragraphes courts les personnages qui ont peuplé son enfance et accompagné son exil.
J'ai eu l'impression d'être restée à la surface, ou plutôt à la porte, de ce récit à la première personne, comprenant bien les questions qu'il soulève sans pour autant éprouver quoi que ce soit d'autre.

Une lecture sans déplaisir, mais loin de ce que j'en attendais.
Dommage.
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Parsemé de courts chapitres, Ru est un récit autobiographique de l'auteure, une réfugiée vietnamienne "boat-people" s'installant au Canada. C'est puissant car le sentiment profond d'un déracinement est bien présent. Un peu d'ici, un peu de là-bas. Je suis une jeune d'origine vietnamienne, la génération de ses enfants. Alors le roman m'a touchée mais pas forcément pour L Histoire mais pour la poésie qu'elle y a intégrée. Certains passages ont été pour moi des textes "coup de poing". Les fragments de sa vie d'avant et de sa vie d'aujourd'hui sont entremêlés et ont fait d'elle ce qu'elle est. J'ai retrouvé la culture de ma famille et j'ai touché du doigt un tant soit peu ce qu'elle a vécu. Les mots en vietnamien disséminés dans l'ouvrage donnent encore plus de caractère au récit. J'ai beaucoup aimé, ce n'est pas triste, c'est "juste" juste.
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Kim Thùy, femme éminemment sympathique, est aussi une auteure accomplie. Son récit autobiographique vient admirablement le confirmer . Elle y parle avec sérénité et assurance du drame qu'elle a vécu avec sa famille lors de leur fuite éperdue du Vietnam à la fin des années 1970. Communément appelés « boat people », ces Vietnamiens, pour la plupart aisés, quittent tout, argent, maison, famille élargie, fuyant la répression communiste. C'est la ville de Granby au Québec qui sera leur ultime destination, d'où ils prendront un nouveau départ.
Un récit empreint de poésie, de souvenirs d'enfance, de sages dictons et surtout d'une résilience hors du commun.
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« Monsieur Minh m'a donné le désir d'écrire. J'ai rencontré monsieur Minh sur une banquette en vinyle rouge d'un restaurant chinois de la rue Côte-des-Neiges où mon père travaillait comme livreur. J'y faisais mes devoirs en attendant la fin de son quart de travail … Lui, ce n'est pas le ciel qui l'avait sauvé, c'était l'écriture. Sans l'écriture il n'aurait pas entendu aujourd'hui la neige fondre, les feuilles pousser et les nuages se promener. Il n'aurait pas non plus vu le cul-de-sac d'une pensée, la dépouille d'une étoile ou la texture d'une virgule ».

Extrait de Kim Thuy dans Ru, 2009


Depuis l'ouverture de ce blog, il y a quelques mois, je me répète pratiquement chaque jour, en mon for intérieur, que tant que Kim Thuy et Ru n'y figureront pas, il sera hanté par le vide d'une présence qui m'est pourtant très chère. J'ai sans doute remis l'écriture de ce petit commentaire par crainte que mes mots n'arrivent pas à rendre toute l'admiration que j'éprouve pour cette femme. Mais ce temps est venu, que je ne peux plus retarder, d'autant plus que je l'ai rencontrée il y a trois semaines.

À la bibliothèque du quartier, j'ai eu le privilège de l'entendre nous parler de son roman Ru. Née à Saigon et réfugiée vietnamienne apatride, elle est arrivée en terre québécoise par bateau, à l'âge de 10 ans, après une traversée de plusieurs jours sur le golfe du Siam. Pour s'ouvrir au lecteur sur cet épisode éprouvant de sa vie, elle nous livre la force de son courage à travers un humour touchant et spontané. À la question « vous considérez-vous résiliente? », elle a répondu :

« La résilience non, je crois que ce n'est qu'un instinct naturel de survie ». Kim Thuy est une survivante, une femme qui vit de l'instant présent : « Mon père est de ceux qui ne vivent que dans l'instant, sans attachement au passé. J'ai hérité de lui ce sentiment permanent d'assouvissement ».

J'ai été subjuguée par son dynamisme, sa spontanéité, son authenticité, son naturel, sa simplicité, son humour (elle nous a fait rire durant ces deux heures, autant qu'elle nous a émus), sa vivacité, son courage et sa détermination ... Elle a en elle cette rage, cette soif d'exprimer le vécu de petites et grandes terreurs sans jamais s'apitoyer, sans jamais se victimiser, sans jamais sombrer dans le drame … Cette petite fille muette et effacée s'est muée en femme expressive et animée par une gestuelle débordante de vie.

Elle affirme que le contexte entourant son exil lui est beaucoup plus important que les faits, parfois fictifs (par exemple, l'épisode du grille-pain, celui du parfum et des hommes mariés). Puis, en tant que poète avant tout, elle se soucie, au moment de l'écriture, de bien ressentir la musicalité de chaque phrase : « Quand je relisais, je devais sentir les phrases comme un grand souffle qui ne s'arrête jamais ».

Privée de livres durant toute son enfance, sous le régime communiste, elle n'avait pour seule lecture que les dépliants publicitaires distribués ici et là. le tout premier roman qu'elle a tenu en ses mains, et partagé avec les membres de sa famille (car il s'agissait du seul roman présent dans l'appartement qu'ils habitaient à Montréal à leur arrivée), est L'amant, de Marguerite Duras. Son père, en l'achetant, avait ce désir de transmettre aux siens la vision d'un Saigon habité par l'amour, non que par la guerre et la haine. Il fut pour elle le présent d'un Noël avant l'heure, le plus beau cadeau jamais reçu. Cette privation semble d'ailleurs avoir grandement influencé la relation qu'elle entretient avec les livres.

Sa mère avait souvent répété qu'elle n'aurait pas de biens matériaux à leur léguer en héritage. Pourtant, elle exprime avec une immense reconnaissance avoir déjà reçu sa part d'héritage : « Je préfère me souvenir de mes chatouillements intérieurs, de mes étourdissements, de mes chavirements, de mes hésitations, de mes changements, de mes manquements ». Soucieuse de leur avenir, chaque jour, sa mère les obligeait à nettoyer vingt fèves germées en enlevant leur racine une à une. Elle les poussait ainsi au bord du précipice, les préparait à la chute...

De ses deux fils, Pascal et Henri, le petit dernier est autiste. Elle en parle avec un amour qu'elle seule peut arriver à exprimer avec les mots justes, les mots d'une mère forte mais qui a droit à l'effondrement : « Je n'ai jamais eu d'autres questions que celle du moment où je pourrais mourir. J'aurais dû choisir ce moment avant l'arrivée de mes enfants, car j'ai depuis perdu l'option de mourir. L'odeur surette de leurs cheveux cuits sous le soleil, l'odeur de la sueur dans leur dos la nuit au réveil d'un cauchemar, l'odeur poussiéreuse de leurs mains à la sortie des classes m'ont obligée et m'obligent a vivre, à être éblouie par l'ombre de leurs cils, à être émue par un flocon de neige, à être renversée par une larme sur leur joue. Ils m'ont donnée le pouvoir de souffler sur une plaie pour faire disparaître la douleur ... ».

En terminant, par souci de faire place à ses mots plutôt qu'aux miens, qui se veulent de simples outils servant à rendre hommage à cette femme merveilleuse, j'aimerais simplement vous laisser méditer sur un dernier extrait … :

« Quand à moi, il en est ainsi jusqu'à la possibilité de ce livre, jusqu'à cet instant où mes mots glissent sur la courbe de vos lèvres, jusqu'à ces feuilles blanches qui tolère mon sillage, ou plutôt le sillage de ceux qui ont marché devant moi, pour moi. Je me suis avancée dans la trace de leurs pas comme dans un rêve éveillé où le parfum d'une pivoine éclose n'est plus une odeur, mais un épanouissement ; où le rouge profond d'une feuille d'érable à l'automne n'est plus une couleur, mais une grâce ; où un pays n'est plus un lieu mais une berceuse. »

Lien : http://www.lamarreedesmots.c..
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Publié en 2009, "Ru" est le premier roman de l'écrivaine québecoise d'origine vietnamienne Kim Thuy.

A l'âge de 10 ans, l'auteure s'est vue contrainte de quitter son pays, le Vietnam, avec une partie de sa famille et quelques 2000 autres "boat people". Avant de rejoindre le Québec, ces hommes et ces femmes échouent en Malaisie, dans un camp de réfugiés à l'espace limité et aux conditions sanitaires plus que douteuses.
Kim Thuy évoque la misère et l'arrivée des communistes sur sa terre natale, la débrouillardise de chacun mais aussi la solidarité pour pouvoir survivre.
Peu importe la dureté de son climat, l'auteure salue la générosité de sa terre d'accueil et de son peuple qui lui ont offert à elle et ses proches un nouveau départ et une indépendance auxquels ils ne pensaient plus pouvoir prétendre.

"Ru" apparaît comme une histoire de départ, de sacrifices et de rencontres.
Kim Thuy raconte les difficultés et la peur de l'exil vers une terre promise qui demeure inconnue et le sentiment de déracinement du au manque de repères face à une culture diamétralement opposée.
Le rapport à la famille et à la maternité est également très présent dans ces lignes. Si l'auteure affiche un certain détachement pour les choses matérielles et l'amour d'un seul homme, elle laisse entrevoir un lien très fort avec ses parents, ses oncles, ses tantes et ses deux fils dont elle prépare l'avenir en leur inculquant les notions de vie simple et de partage.

Au récit de sa propre histoire, l'auteure mêle des témoignages d'autres Vietnamiens qui comme elle ont connu l'horreur de la guerre et en ont gardé des séquelles ou qui au contraire se sont sacrifiés pour que d'autres puissent aspirer au "rêve américain".

Le schéma narratif de ce roman est particulièrement intéressant. Dépourvu de chapitrage et ménageant de larges espaces entre chaque bloc de phrases, il évoque cette mémoire qui vous prend par surprise, par flash-backs, le dépaysement, la difficulté de composer avec des réalités présentes et passées, de passer d'une culture à une autre tout en gardant son identité.
Chaque histoire semble se clore sur elle-même avant de se prolonger quelques pages plus loin.
Aussi, bien que le roman parte un peu dans tous les sens, je ne me suis pas sentie perdue pour autant.
Pour ne rien gâcher, l'écriture sensible et pudique de ce roman est magnifique ! J'étais d'autant plus impressionnée quand j'ai appris que Kim Thuy avait écrit ce premier roman en français.
Malgré la dureté des histoires rencontrées, le ton ne se veut en rien misérabiliste. Ici la douleur se devine plus qu'elle ne s'expose et il se dégage finalement de ce roman un puissant hymne à la liberté.
Un coup de coeur pour 2012 et pas des moindres, youhou !
Lien : http://contesdefaits.blogspo..
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