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Je croyais en savoir beaucoup sur ce personnage – dont l'activité en « faveur » des Juifs français a récemment été évoquée par un candidat d'extrême droite. Bien entendu à tort. J'avais lu « Soixante jours qui ébranlèrent l'Occident » de Jacques Benoist-Méchin, collaborationniste notoire, et surtout « La France de Vichy », plus récent, ouvrage clé sur la période de Robert Paxton.

En fait, ce « pavé » de 1200 pages se lit comme un thriller. Année après année, puis jour après jour, on y découvre l'évolution de celui qui gouverna la France en les heures les plus sombres de la défaite et de l'occupation allemande. Un travail colossal qui permet de saisir les clivages politiques de notre temps.

Comment ce fils d'agriculteur né en 1856, rejeté par sa belle-mère quelques mois après sa naissance, élevé par un oncle ecclésiastique, se réfugie dans l'étude. Marqué dans l'adolescence par la défaite de 1871, il choisit le métier des armes et poursuit une carrière sans relief puisqu'il n'est que lieutenant-colonel au déclenchement de la Grande guerre (il a 58 ans). Et, de façon assez inhabituelle, il va se montrer indispensable, par son aptitude à ménager les troupes, à organiser la logistique, à remporter la bataille de Verdun, à résoudre le mouvement de mutineries de 1917.

Le désormais maréchal devient une gloire nationale et internationale, occupe diverses fonctions dans l'entre-deux guerres. Considéré comme un officier républicain, catholique, coureur de jupons – il entretient des relations avec plusieurs maîtresses simultanément et ne se marie qu'à 64 ans avec l'une de ses ex. Ses idées politiques : anti communiste, anti parlementaire, anti francs-maçons et antisémite, comme bien des tenants de la droite. En rivalité avec Foch auquel il reproche d'avoir signé l'armistice de 1918 trop vite et sur le sol français, permettant de laisser l'armée allemande de se retirer dans les honneurs. Il est partisan d'un gouvernement hiérarchique et autoritaire.

C'est le seul homme qu'on va chercher au lendemain du désastre de mai 1940, pour demander l'armistice. Il prônera une politique de collaboration car il considère que l'Allemagne va gouverner l'Europe. Il recherchera sans cesse à obtenir des allègements aux conditions draconiennes imposées à la France. Sans succès.

Son problème majeur : son âge, que dément une forme physique éblouissante pour un homme de 83 ans. Entouré d'un groupe de fidèles pas toujours loyaux, il finit par perdre peu à peu pied. Selon Charles de Gaulle, Pétain serait mort en 1925, l'année de son intervention au Maroc, durant laquelle il aurait fait la preuve de son ambition et de sa capacité à le laisser manipuler par les politiciens.

« C'était un chef exceptionnel, je n'ai pas changé d'avis. le malheur a voulu, pour la France et pour lui-même, qu'il soit mort en 1925 et qu'il ne l'ait pas su. »

Devenu chef de l'Etat, doté des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire, Pétain se montre tout à tour réformateur, antisémite, diplomate, audacieux, seul chef devenu icône puis rempart chancelant, otage indécis, imprudent, chef dépouillé, semi-captif, exilé, accusé puis condamné et commué en prisonnier à vie (il va le rester 6 années ...), mourant vraisemblablement de la maladie d'Alzheimer, non connue à l'époque.

Une biographie passionnante, dont « la vieillesse allait s'identifier avec le naufrage de la France ». Un part d'ombre de notre histoire qu'il ne faut pas oublier.
Lien : http://www.bigmammy.fr/archi..
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Par les temps qui courent...
Il faut du temps pour en venir à bout car cette biographie de Pétain est très approfondie, très volumineuse. Mais cela en vaut la peine car Bénédicte Vergez-Chaignon est une excellente historienne et qu'elle parvient à à dresser un ouvrage remarquable de netteté dans ses réponses. Pour ceux qui resteraient sceptiques, un coup d'oeil à la bibliographie permet de ses faire une idée du travail proprement colossal de cette historienne.
Il y a tout d'abord le militaire de la guerre de 1914-1918 brillant, très brillant au début, puis finalement mis sur la touche car considéré comme trop défaitiste. Puis un Pétain mi-homme politique, mi- militaire des années 1920-1930 qui glisse vers l'extrême-droite et admire Franco. Puis enfin le vieillard plus que réactionnaire qui profite de la défaite (dans laquelle par son poids dans les décisions militaires et la stratégie tout au long de l'entre-deux-guerre il est au minimum associé) pour installer une régime nauséabond. Ceux qui se posent des questions pour savoir si cet homme a réellement contribué à apaiser la situation des juifs (il faut se pincer mais on l'entend dire parfois ces temps-ci) trouveront ici des réponses : NON. D'autant plus que dès les années 1970 Paxton avait démontré que le statut des juifs n'avait pas été fait à la demande des Allemands mais de manière spontanée.
En somme à la lecture de ces livres il n'y a plus d'ambiguïté du tout. Quand au reste doit-on s'amuser que ce chantre de la religion catholique, des valeurs familiales les plus traditionnelles ait appris qu'il était envoyé sur le Front durant la Première guerre mondiale alors qu'il était au lit avec sa maitresse ?
Faites ce que je dis pas ce que je fais, soit. Là n'est pas l'essentiel, il est dans l'association effroyablement tragique entre celui qui a paru, de manière bien illusoire être un sauveur (resté populaire jusqu'au bout du reste) et un des épisodes les plus honteux de notre histoire.
Je suggère en contrepoint de lire la biographie de Jean Moulin par Azéma ou le colossal De Gaulle par Jackson...
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Une somme, particulièrement documentée mais pas lourde pour autant... Et bien évidement on ne sait que penser; et si Pétain était l'auberge espagnole? Chacun y apporte ce qu'il veut y voir. Toutefois au final, une immense vacuité. Portrait consternant au final, en refermant on hésite entre "pauvre type!" et "pauvre homme!".
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Encore un livre qui prouve que L Histoire n'est jamais définitivement écrite. 
L'auteure utilise des nouveaux documents pour nous relater des aspects plus complets sur ce personnage qui a fait partie de l'histoire de France.
Son approche n'est pas dans le jugement mais dans la recherche de la compréhension d'un homme qui a dû pendre des décisions dans les deux guerres mondiales.
Son procès m'a laissée perplexe : comment juger les actes de cet homme ? j'aurais été très déstabilisée si j'avais fait partie des jurés. 
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Pétain ! Quelle complexité que ce personnage
Il semble que le phantasme se mêle à la réalité, que l'histoire nourrisse la légende et vice versa.
Militaire disposant de certaines facultés intellectuelles et physiques, pour autant, sa carrière est lente. Obscur colonel au début de la première guerre mondiale, il n'a pas la réputation d'un militaire entreprenant. « VERDUN » sera son heure de gloire
Et pourtant, le malentendu est déjà là…retour en arrière sur un personnage laissé volontairement dans l'oubli :le général de Castelnau...celui qui ne sera jamais nommé maréchal pour raisons politiques.
Lors de la bataille des frontières, la 2e armée qu'il commande va connaître le même sort que ses voisines. Elle est battue à Morhange le 20 août 1914 et ne doit son salut qu'à une retraite précipitée qui le ramène dans la région de Nancy. À cet instant, les Allemands pensent tenir une victoire décisive. Ils vont devoir déchanter.
Surgissant des collines qui s'étendent autour de Nancy sur lesquelles il a réussi à reconstituer son armée, Castelnau tombe sur le flanc des troupes allemandes et remporte la victoire de la Trouée de Charmes. Sa victoire prépare le redressement français sur la Marne qui intervient quelques jours plus tard.
Ces combats terriblement meurtriers conduisent les belligérants à changer leurs méthodes de combat. Dorénavant, les armées s'enterrent. C'est la guerre des tranchées.
Pendant la première partie de l'année 1915, le généralissime Joffre et celui qu'il considère comme son second opérationnel, le général Foch, entraînent les armées françaises dans une série d'offensives dont les gains sont négligeables au regard des pertes qu'elles engendrent.
Castelnau y est résolument opposé. Il propose de rechercher plutôt une victoire dans les Balkans où les alliés de l'Allemagne sont dans une position critique.
À défaut, Castelnau est nommé le 22 juin 1915 au commandement du principal groupe d'armées, celui du Centre. Quelques semaines plus tard, il est promu adjoint de Joffre en qualité de chef d'état-major général des armées.
Cela ne l'empêchera pas d'exercer la plénitude du commandement suprême lors de la bataille de Verdun. Au moment où l'attaque allemande se déclenche, le 21 février 1916, il se rend sur place et prend les mesures qui sauvent la ville. Il nomme le général Pétain et réorganise le commandement local. Il ordonne aussi en novembre 1916, contre l'avis de Joffre, la dernière offensive qui transforme cette longue bataille en une victoire
Voilà le mythe est lancé, le quiproquo aussi et on connait la suite…
Ni les militaires, ni l'opinion, ni les alliés, ni les politiciens français ne prépareront la seconde guerre.
Tout sera fait pour abandonner nos alliés de l'époque, les sacrifier face au délire d'HITLER, un ministre comme BONNET sera une vraie honte, jusqu'à dynamiter toutes les possibilités d'alliance avec la Russie pour « calmer » l'Allemagne ; quant à CHAMBERLAIN !!!!
Bref, les français font appel à un personnage « surcoté », âgé, qui ne comprend plus rien et qui à mon sens, ne sera qu'une marionnette aux mains de fanatiques sans réel pouvoir ; puisque toujours soumis au bon vouloir allemand.
Entendons-nous bien, quand je dis « marionnette », et « fanatiques sans réels pouvoirs », le régime de VICHY a eu une très triste réalité.
« Marionnette » ne veut pas dire que l'on doit l'exonérer, mais quand on pense aussi à son passage en Espagne comme ambassadeur et son pathétique relationnel face aux franquistes…
Tout échappe à ce personnage à qui l'on confie une mission bien trop grande pour lui. Pour autant a-t-il été autant la dupe que l'on veut bien nous faire croire ?
Il arrive au pouvoir, parceque personne d'autre ne « dispose de l'envergure » à l'époque.
Son mérite ? Ne pas avoir fui …ses responsabilités durant son procès, mais risquait-il réellement quelque chose au regard de son passé et des conditions de sa nomination.
Il est bien plus facile encore aujourd'hui, de s'acharner sur un homme, que de s'attarder sur le contexte l'époque, ou que la France affronte enfin son passé sans esquiver la réalité
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Une brillante biographie, extrêmement documentée, qui remet en perspective la vie de cet homme héros et bourreau.
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