Cette " trilogie noire" porte bien son nom, car les trois recueils réunis ( de 1888 à 1890) offrent une vision pessimiste et sombre de la vie, à une époque où Émile Verhaeren, encore célibataire ( il a la trentaine) est en proie à la maladie et à la neurasthénie.
Aussi les mots obsédants comme le sang, la mort, l'infini, la nuit, la souffrance se retrouvent souvent, tout au long des poèmes.Si le poète exprime son désir de dépasser la douleur," Sois ton bourreau toi-même", s'écrie-t-il, la lecture de ces textes est bien plombante! Je me suis lassée de ces plaintes, typiques du Parnasse, dont est issu Verhaeren.
Cependant, au détour d'un poème j'ai été saisie par le pouvoir hypnotique de certains vers:
" Un vol d'oiseau qui plane, et plane, et, lourdement,
Chavire en un ciel gris où se fane la lune."
Et j'ai trouve intéressant aussi ce changement progressif, depuis les sages alexandrins dans " Les soirs" jusqu'à l'utilisation du vers libre dans" Les flambeaux noirs".
Mais mon impression générale reste très mitigée, on se sent imprégné de tristesse et de monotonie... Les recueils publiés ensuite sont pour moi plus intéressants.
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Les chats d'ébène et d'or ont traversé le soir,
Avec des cris de vis et de heurtoir.
Ils ont griffé mon coeur et le miroir
De mes yeux clairs vers les étoiles.
Les chiens du désespoir, les chiens du vent d'automne,
Mordent de leurs abois les échos noirs du soir,
Et l'ombre, immensément, dans le vide, tâtonne,
Vers la lune, mirée au clair des abreuvoirs.
Et c'est mon coeur qui saigne aussi,
Mon coeur morne, mon coeur transi,
Mon coeur de gangrène et de fiel,
Astre cassé, au fond du ciel.
Poésie - Le péché - Emile VERHAEREN