Pourquoi Manue est-elle tellement touchée par la disparition (inquiétante, ce n'est rien de le dire) de Hector, son poisson rouge ? Pourquoi mène-t-elle une vie amoureuse tellement désordonnée, attirée qu'elle est « à flirter avec tout ce qui a un cerveau entre les jambes » (cette expression-là, p. 40, je ne suis pas près de l'oublier !) ? Pourquoi se frite-t-elle sans cesse avec sa mère ? Et pourquoi Fabio prend-il soudain tant de place dans sa vie sans que l'un et l'autre soient capables de mettre des mots sur cette vraie rencontre ?
Sans doute parce que Manue porte un vide au creux de la poitrine, un manque jamais évoqué ou si peu. Sans doute parce que Fabio, exilé de Carpi à Montréal pour tenter de (re)faire sa vie, porte en lui les mêmes doutes, les mêmes silences, les mêmes angoisses que la jeune femme. Peut-être aussi que Fabio porte en lui le silence de son grand-père Sergio, qui a survécu aux goulags de la seconde guerre mondiale, et qui a vécu, aimé, donné la vie à son tour après la guerre, sans révéler verbalement ses secrets… Et peut-être que, de ces trois destins entremêlés, naîtra quelque chose de bon, quelque chose de bienveillant, quelque chose de pleinement vivant…
En tout cas, la bienveillance, la pétillance, l'appétit de vivre, c'est ce qui ressort du roman de
Mélissa Verreault, qui raconte d'abord l'histoire de Manue, sa rencontre avec Fabio, avec un certain humour féroce d'autodérision et évoque ensuite le destin de Sergio avec une clarté lucide, une fluidité sans pathos qui nous rend le bonhomme extrêmement attachant. Dans la troisième partie du livre, Manue et Fabio se retrouvent et osent des projets pour écrire leur propre avenir.
Dans ce roman,
Mélissa Verreault convoque différentes facettes de l'angoisse de vivre, elle les traite tour à tour avec humour et avec profondeur. Au passage elle parle de son amour pour l'Italie, de cuisine, de vin rouge, de cinéma, de flirts, d'amour… et son message final est, sans aucun aspect moralisateur, qu'il est bon de se construire sur ses fragilités, de vivre un peu cabossé. de se démarquer des valeurs communément admises. du moment qu'on s'aime ! Son livre se lit avec le sourire, les pages se tournent toutes seules…
Merci,
Mélissa Verreault, de m'avoir apporté tout cela alors que je vous lisais dans une actualité particulièrement douloureuse !
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