Une étoile dans la brume

On se fait des illusions, parfois, sur la signification d’un sourire, d’un regard, d’un mot… On prend pour encouragement ce qui n’est que manœuvre de coquetterie. Il ne s’agissait que d’une simple comédie de salon dans laquelle je ne sus pas tenir le rôle qui m’était dévolu. Celui d’une distraction, d’un comparse !

Mes parents se sont imposé de lourds sacrifices pour payer mes études et m’amener à la situation que j’occupe aujourd’hui ! Le seul plaisir qu’il ait connu, c’est son accordéon, dont il jouait, dans la cuisine, tandis que ma mère vaquait à ses occupations, ou bien, les jours d’été, sur le pas de sa porte… Chacun de mes succès scolaires le remplissait d’orgueil ; et je travaillais ferme, car pour rien au monde je n’aurais voulu le décevoir ! Quand il est mort, j’étais ce qu’il souhaitait : ingénieur à la mine où lui-même avait été ouvrier…

Mais parce que son charme distingué et trop discret lui valait moins de témoignages d’admiration que certaines de ses camarades plus brillantes, Marion manquait de cette confiance en elle qui fait trouver normal l’amour d’un homme séduisant et supérieur par la condition ; et il lui arrivait de se demander ce qui, en elle, avait pu séduire cet homme splendide qui ne devait avoir qu’à choisir parmi les filles les plus belles et les plus riches.

Il semblait que l’oubli se faisait ; la routine de la vie recouvrait la douleur, les secrets, comme la cendre recouvre peu à peu les braises ardentes… Cependant, le destin continuait à avancer par ses chemins de mystère.

C’est une dure vie, voyez-vous, que celle de la mine ! Chaque fois qu’un homme descend au fond, il peut n’en pas remonter, et il le sait, consciemment ou inconsciemment. Et pour se protéger du danger, il doit s’en remettre à la science des ingénieurs et des directeurs. Ils appartiennent les uns et les autres au même ordre de choses. Si le travail des uns est plus dur, la responsabilité des autres est plus grande…