AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations sur Les enfants Tanner (57)

Les gens sans défense n’excitent que trop souvent chez les forts l’envie de leur faire mal. Sois donc heureux de te sentir fort et laisse les plus faibles en paix. Ta force paraît sous un bien mauvais jour, quand tu t’en sers pour tourmenter les faibles. Cela ne te suffit donc pas d’avoir toi-même les deux pieds sur terre ? Faut-il encore que tu en poses un sur la nuque de ceux qui vacillent et qui cherchent, pour qu’ils s’égarent encore davantage et coulent plus bas, toujours plus bas, jusqu’à désespérer d’eux-mêmes ? Faut-il donc que la confiance en soi, le courage, la force et la détermination commettent toujours le crime d’être brutal, d’être sans pitié et sans délicatesse à l’égard d’autres qui ne sont pas même un obstacle sur leur chemin, qui sont simplement là à écouter avec envie ce bruit que font la gloire, les honneurs et la réussite des autres ? Est-ce noble, est-ce bien d’offenser une âme en proie aux rêves ? Les poètes sont si vulnérables : alors vous autres, ne blessez jamais les poètes.
Chapitre 5, p64
Commenter  J’apprécie          360
Il aimait en été le passage du soir à la nuit, ce lent effacement de la forêt rougeoyante dans l’obscurité finale de la nuit. Il se mettait alors à rêver sans paroles et sans pensées, sans plus se faire de reproche, et en s’abandonnant à sa belle fatigue. [...] L’infini lui paraissait brusquement ce qu’il y avait de plus proche.
Chapitre 6, p80
Commenter  J’apprécie          290
[…] quelle splendeur, un homme nu en bonne santé ! Quel bonheur, être débarrassé de ses vêtements, être tout nu ! C’est déjà un bonheur d’être mis au monde, et ne pas en avoir d’autre que d’être en bonne santé est encore un bonheur qui dépasse en éclat les pierres les plus précieuses, les plus beaux tapis, les fleurs, les palais et toutes les merveilles qu’on voudra. La plus merveilleuse des merveilles, c’est la santé, c’est un bonheur auquel on ne peut rien ajouter qui lui soit comparable […] À ce bonheur complet et magnifique, si l’on consent à le reconnaître dans ce corps nu, lisse, mobile et chaud que nous avons reçu de la vie terrestre, il faut bien que quelque chose fasse contrepoids : le malheur ! Il nous empêche de déborder, il nous donne une âme. Il prépare notre oreille à entendre le beau son que cela fait quand l’âme et le corps, mêlés l’un à l’autre, passés l’un dans l’autre, respirent ensemble.
Chapitre 14,p183
Commenter  J’apprécie          250
Il y a là quelque chose de fier et d'élevé, mais quelque chose aussi d'incompréhensible et de presque inhumain. Pourquoi donc tous ces gens, qui écrivent ou qui comptent, et même des filles toutes jeunes parmi eux, passent-ils par la même porte du même immeuble et viennent-ils gratter, essayer des plumes, compter et gesticuler, tirer la langue et se moucher le nez, tailler des crayons et porter des papiers? Est-ce qu'ils aiment ça, est-ce qu'ils y sont forcés, ont-ils l'impression de faire quelque chose de raisonnable et de productif? Ils viennent de toutes les directions, certains arrivent même par le train de lieux éloignés, ils dressent l'oreille pour savoir s'ils ont encore le temps de faire une petite promenade avant d'entrer, ils sont si patients dans tout cela, une patience de moutons, et puis le soir ils se dispersent, chacun dans sa direction, pour se retrouver tous le lendemain à la même heure. Ils se voient, ils se reconnaissent à leur pas, leur voix leur manière d'ouvrir la porte, mais il n'ont guère affaire ensemble. Ils se ressemblent tous et sont pourtant tous l'un pour l'autre des étrangers, et si l'un d'entre eux meurt ou détourne des fonds, ils s'en étonnent pendant une matinée et puis tout reprend son train. Il arrive qu'il y en ait un qui soit frappé d'une attaque alors qu'il était en train d'écrire. Qu'aura-t-il donc eu de ces cinquante ans pendant lesquels il aura * travaillé * dans la maison? Cinquante ans durant, il est entré et sorti chaque jour par la même porte, il a employé des milliers de fois la même formule dans des millions de lettres, il a porté un certain nombre de nouveaux costumes et s'est souvent étonné d'user si peu de paires de chaussures dans l'année. Et maintenant? Pourrait-on dire qu'il a vécu? Et des millions d'hommes ne vivent-ils pas comme lui? C'étaient peut-être ses enfants le sens de sa vie? Peut-être sa femme faisait-elle tout le plaisir de son existence? Oui, c'est bien possible. Je ne veux pas me donner l'air d'en savoir plus sur ces choses-là, car je me dis que je suis encore bien jeune.
Commenter  J’apprécie          221
De tous les endroits où j’ai été, poursuivit le jeune homme, je suis parti très vite, parce que je n’ai pas eu envie de croupir à mon âge dans une étroite et stupide vie de bureau, même si les bureaux en question étaient de l’avis de tout le monde ce qu’il y avait de plus relevé dans le genre, des bureaux de banque, par exemple. Cela dit, on ne m’a encore jamais chassé de nulle part, c’est toujours moi qui suis parti, par pur plaisir de partir, en quittant des emplois et des postes où l’on pouvait faire carrière et le diable sait quoi, mais qui m’auraient tué si j’étais resté.
Chapitre 1, p10
Commenter  J’apprécie          200
Il avait peut-être eu une fois dans sa vie le désir de s'en sortir, quand il était encore jeune, mais il n'avait pas eu la force de laisser derrière lui cette chose non réglée qui ressemblait à un devoir pressant, ni de la jeter en chemin, avec le sourire qui convient. Jeter? Jamais il n'avait rien jeté! Et s'il avait essayé, ça l'aurait, lui semblait-il, déchiré du haut jusqu'en bas ; il n'aurait cessé de penser avec douleur à ce qu'il avait jeté. Il ne jeta jamais rien et il perdit sa jeunesse à faire l'étude et l'examen de choses qui ne valaient ni étude, ni examen, ni amour, ni considération.
Commenter  J’apprécie          200
Beaucoup de curieux se retournaient sur l’étrange couple : elle dans ses longs voiles blancs et l’espèce de voyou qui n’avait même pas un pantalon convenable et qui faisait un contraste si insolent avec la dame qu’il accompagnait. Car telle est l’habitude des gens de s’indigner de l’aspect de leurs semblables et de se tromper lourdement sur leur compte.
Chapitre 4, p50
Commenter  J’apprécie          170
"Je ne veux pas d'avenir, je veux du présent. Cela me paraît valoir plus. On n'a d'avenir que quand on a pas de présent, et quand on a un présent, on oublie complètement même de penser à l'avenir."
Commenter  J’apprécie          170
J’aime la vie, mais pas pour y faire carrière, bien que ce soit une chose si formidable, à ce qu’il paraît. Qu’est-ce qu’il y a de si formidable là-dedans ? Des dos voûtés avant l’âge à force de rester debout devant un pupitre trop bas, des mains ridées, des visages blêmes, des pantalons en tire-bouchon, des jambes tremblantes, de gros ventres, des estomacs ravagés, des crânes dégarnis, des yeux mauvais, agressifs, racornis, vitreux, éteints, des fronts dévastés et le sentiment avec tout cela d’avoir été un irréprochable crétin. Merci bien. Je préfère rester pauvre et avoir la santé ; plutôt qu’un logement de fonctionnaire, je préfère une chambre pas chère, même si elle donne sur la ruelle la plus sombre, j’aime mieux les ennuis d’argent que l’ennui de me demander où je pourrais bien aller passer l’été pour rétablir ma santé ébranlée ; il est vrai qu’il n’y a qu’une personne au monde qui m’estime, à savoir moi-même, mais c’est précisément l’estime qui me tient le plus à cœur, je suis libre et chaque fois que la nécessité m’y oblige, je peux vendre ma liberté quelque temps et redevenir libre ensuite. Cela vaut la peine d’être pauvre, rester libre.
Chapitre 15, p195
Commenter  J’apprécie          150
Mais il n’est pas juste non plus de considérer, comme vous semblez le faire, que tout homme qui se met à parler de la beauté est un poète qui déraille ; pour ma part je pense qu’il peut même arriver à de froids calculateurs, du genre d’un prêteur sur gages ou d’un caissier de banque, de réfléchir à d’autres choses qu’à leur seul métier qui est de ramasser de l’argent. Il y a plus de gens qu’on ne croit qui sont sensibles et capables de réfléchir : simplement on n’a pas appris à les connaître sous ce jour-là. Je me suis fait un devoir quant à moi de risquer avec tout le monde de parler le langage direct qui vient du cœur : comme cela je vois tout de suite à qui j’ai affaire. C’est une règle qui vous expose à commettre pas mal de gaffes et il peut même arriver qu’une dame fort délicate, par exemple, vous paie d’une bonne gifle, mais qu’est-ce que cela peut faire ! Cela me fait plaisir à moi d’être ridicule, et je continue à croire que la considération des gens qui ne vous pardonnent pas une parole libre ne mérite pas qu’on se soucie beaucoup de l’avoir perdue.
Chapitre 14, p185
Commenter  J’apprécie          150






    Lecteurs (527) Voir plus



    Quiz Voir plus

    Quiz: l'Allemagne et la Littérature

    Les deux frères Jacob et Whilhelm sont les auteurs de contes célèbres, quel est leur nom ?

    Hoffmann
    Gordon
    Grimm
    Marx

    10 questions
    415 lecteurs ont répondu
    Thèmes : littérature allemande , guerre mondiale , allemagneCréer un quiz sur ce livre

    {* *}