Robert WALSER est une clé : la "petite clé magique" qui nous manque. Je veux dire par là que les textes de l'étrange
Robert Walser sont une clé vraiment personnelle pour nous (Cf. la belle critique de dahu qui fait référence à cette "clé") car ils nous donnent accès immédiatement à une de ces "pastilles d'espace-temps" (qui peut être, d'ailleurs, un de nos objectifs principaux d'écriture et de lecture).
"Pastilles", oui... "bulles d'espace-temps" qui dérivent, si précises et tellement prégnantes que "l'on peut y être heureux" (citation d'un des courriers de
Franz KAFKA à
Max BROD)... Il suffirait de se réfugier à l'intérieur, mais à condition de savoir ralentir, "ici et maintenant". Ralentir son
regard en particulier (sorte d'attention flottante - comme une feuille de nénuphar - que depuis
Sigmund FREUD, les analystes et psychothérapeutes utilisent) : un simple rayon de soleil, une "belle passante" dans la foule du tramway (Cf. "Les belles passantes" d'
Antoine POL chantées par
Georges BRASSENS), un reflet d'or sur les eaux sombres du Lac...
Déjà plus de la moitié des "récits" de ce passionnant recueil : récits - ou "petites proses" - parus dans divers
journaux de de Berlin et Zurich, entre 1899 et 1920... "Moments" souvent très brefs, denses, fluides, merveilleux... La langue chante, comme dans "Geschwister Tanner" (
Les enfants Tanner), "Der Gehülfe" (
Le Commis), "Jacob von Gunten. Ein Tagebuch."(
L'Institut Benjamenta).
C'est au fond tout "
L'Amour du Monde" : celui qu'a chanté - en 1925 dans l'un de ses 22 "romans-poèmes" - son compatriote francophone
C.F. RAMUZ, né la même année (1878), si je me souviens bien...
"Où sous chaque seconde une éternité danse... " ("L'adolescence", chanson mythique d'
Henri TACHAN, 1975)
"En tramway" et "L'incendie" (1908 : l'année de parution du monumental "Commis" !) ou "Promenade du soir" (1915), en particulier, sont de purs moments de bonheur pour le narrateur et ses lecteurs : quel écrivain contemporain peut se vanter d'en procurer de pareils, ou seulement la moitié de cette sorte de bonheur-là ?
"Madame Scheer" (1915) est un exceptionnel et long "Moment" d'empathie "simenonienne" (Cf. le personnage central de "La fenêtre des Rouet") : sa logeuse-hébergeuse-amie, solitaire et généreuse, "vit et meurt"...
On y regrettera simplement la maladresse (Peut-être un texte "de complaisance", qui sait... ) de la longue nouvelle "La petite Berlinoise" (1909) : fallait-il la retenir ? (*)
Mais je vous renvoie aux excellents textes ci-dessous de nos ami/e/s dahu, Moan et laurentgui... où vous découvrirez beaucoup de ces très belles intuitions de lecture, élégamment exprimées...
*************************************************
(*) et pour cette édition de poche (Les puristes pourront donc revenir à la belle édition originale suisse "ZOE", bien plus onéreuse donc, ... ou gratter névrotiquement la couverture de l'édition de poche "Points Seuils" !), en page I de COUVERTURE la présence du sophisme de
Philippe Delerm - on compte peut-être sur son effet "vu à la TV" ? - imprimée directement par l'éditeur sous le nom de WALSER : d'ailleurs, totale imbécilité que cette perception de
Robert WALSER en "faux naïf"... car bien sûr, depuis la lecture de son chef d'oeuvre "
Le Commis" ou du vertigineux "
Les enfants Tanner", nous savons que R.W. est un VRAI écrivain... unique, suffisamment "intelligent" pour ne pas jouer le "faux naïf", observateur et lucide : celui qui pratique un ART littéraire (d'où cette deuxième imbécillité imprimée en couverture, que cette référence aux "Grands écrivains". Il y aurait donc les "grands écrivains" (Il y a un diplôme à passer ?) et, avouons-le enfin... la masse un peu trop floue, indécise, de la légion serrée des "autres" (Précisez,
Philippe Delerm, svp... : petits-écrivains, moyens-écrivains, non-écrivains ? para-écrivains ? écriveurs ? écrivants ? Dégustateurs de premières gorgées de bière ?). Mais la faute de goût revient à l'éditeur... Pourvu qu'ils n'en fassent pas une mode ("WALSER recommandé par Ph. Delerm" , "
LOVECRAFT recommandé par
M. Houellebecq", ou Dieu sait quoi...) pour essayer de "mieux vendre" leurs bouquins ! Pour ma part, pas besoin des avis imprimés de Tartempion en couverture du livre d'un autre pour lire
Robert WALSER... Paraphrasons à nouveau l'ami
Coluche : "On n'est pas QUE des gros-blaireaux !!! " (Nom de nom !) :-D
Lien :
http://fleuvlitterature.cana..