Le volume se compose de deux pièces. La première pièce du tome,
La Chatte sur un Toit brûlant, est un classique. D'ailleurs, la photo de la couverture est issue de l'adaptation cinématographique. Que j'ai vu il y a bien longtemps.
Tennessee Williams nous livre à petites touches le destin de Brick et Margaret. Lui un ancien sportif, qui ne peut se résoudre à l'inaction. Elle, amoureuse et exubérante. Possessive et persuasive.
Les dialogues sont millimétrés, pesés. Les répliques fusent et réagissent. Chez Williams, pas de ressort lié à la situation, mais de l'action, venant des dialogues.
On pourrait être dans du
Shakespeare. le Roi meurt et on se partage ses avoirs. Air connu. le happy end, ou ce qui s'en rapproche le plus chez Williams, vient soulager tout ce monde, englué dans les haines et les envies. En l'occurrence, le fait ou non d'avoir des enfants, le fait ou non d'être un "bon" fils... C'est bien vu de Williams, tout à fait ancré dans le quotidien, intemporel, absolu. le dramaturge nous livre une vision exacerbée, déchirante, désespérée de l'âme humaine.
La seconde pièce, La Descente d'Orphée, m'était inconnue. Quand on regarde la distribution des acteurs pour la première parisienne, on est frappé par le niveau très relevé. Arletty, bien sûr, mais pas seulement. Il faut du lourd pour que cela ne soit pas caricatural, à coup sûr.
Tout se passe dans une petite ville américaine. J'ai supposé le Midwest. Avec les tumbleweeds qui roulent au gré du vent. Les haines se lâchent. de nouveau, les trahisons, les compromissions, les secrets se nouent et se dénouent. On est dans un suspense, un thriller, implacable. Chez
Tennessee Williams, les gens jugent leur prochain. Les condamnent. Dur. Et cela frappe juste. On se reconnaît. Oh, bien sûr, on n'a pas envie de se reconnaître dans ces femmes envieuses qui passent leur temps à épier et médire... mais c'est tellement bien vu de l'auteur.
Au final, une découverte.
Coller deux pièces peut se révéler tout à fait inadéquat. Cependant, plusieurs points les relient. le poids du passé tout d'abord, pas seulement celui de l'histoire des personnages, mais celui de la Tradition (avec une majuscule). Ensuite la beauté, la jeunesse, et le temps qui passe. Enfin, quelque chose d'instinctif, de primal, de viscéral. Je me suis surpris à penser que les personnages criaient, bien plus souvent que nécessaire. Tellement les répliques me semblaient devoir se hurler, frénétiquement, obsessionnellement.
Mais ce qui m'a le plus frappé dans les deux pièces, ce sont les didascalies, les indications fournies par Williams lui-même. La première pièce est un huis-clos, un duel... mais surtout un ballet. La place des protagonistes est réglée par l'auteur. Cela avance, recule, bouge, se positionne... car les places occupées ont de l'importance. La gestion de l'espace est un acteur à part entière. Efficace, terriblement efficace. La seconde pièce se déroule dans plusieurs endroits selon les tableaux, mais de nouveau on retrouve ce souci du positionnement des acteurs. le hasard n'a pas de place ici.