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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Je me suis lancée dans «Le détour» sans trop savoir pourquoi mais je sais pourquoi je l'ai continué... Dès la première page j'ai été happée par l'écriture charnelle de Luce D'eramo, une écriture violente qui fait ressortir les bruits, les odeurs, les sensations des terribles Lager nazis. J'ai été bousculée par l'héroïne, jeune fille fasciste, volontaire pour s'engager dans ces camps de travail, une jeune fille pour laquelle on pense ne pouvoir ressentir aucune sympathie mais qui vibre pourtant d'humanité. Lucia raconte son expérience, les conditions de travail, elle est petite bourgeoise et pourtant tente d'interagir avec ceux qui ne sont pas privilégiés. Elle ne réussit pas toujours, elle n'arrive pas toujours à oublier ses préjugés... et c'est là que le roman bascule, passe à une narratrice extérieure qui interroge le lecteur et surtout ses propres actions passées, et propose alors un travail de mémoire intime et bouleversant.
«Le détour» se lit dans l'urgence, avec frénésie, celle qui transparait chez celle qui doit survivre, celle qui perce chez celle qui doit comprendre.
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Alors qu'elle mène une vie privilégiée dans l'Italie de Mussolini et fait partie des jeunesses fascistes, la jeune Luce d'Eramo veut vérifier par elle-même si les rumeurs sur le régime nazi sont avérées. En février 1944, à 18 ans, elle se porte volontaire pour rejoindre un camp de travail en Allemagne, et est affectée dans une usine de chimie. Sa conscience s'éveille alors, et elle est scandalisée par l'exploitation des travailleurs. Polyglotte, elle se lie d'amitié avec des Russes, des Polonais et quelques Français, et ensemble, ils organisent une grève. Plus tard, lors d'un retour forcé en Italie, elle monte dans un convoi de déportés, direction Dachau d'où elle s'enfuit à l'occasion d'un bombardement. S'en suit une vie clandestine, de ville en ville, jusqu'en février 1945 où, à Mayence, elle est gravement blessée dans l'effondrement d'un immeuble. La colonne vertébrale brisée, les jambes paralysées, elle est finalement renvoyée en Italie.

La nouvelle traduction de Corinne Lucas Fiorato permet de redécouvrir ce best-seller italien, paru en 1979. le récit ne suit pas l'ordre chronologique, ce qui est parfois déroutant. Il est en effet composé à partir de différents souvenirs revenus à la mémoire de Luce d'Eramo au fil de sa vie. Au-delà de ses aventures durant la Seconde guerre mondiale, il retrace aussi la vie riche de cette écrivaine, auteure de nombreux essais et romans politiques. Un bel autoportrait d'une femme d'un courage inouï et à la vie peu commune.
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Un livre surprenant et dérangeant.
Un autre regard sur la seconde guerre mondiale dans l'Allemagne nazi, un éclaircissement inédit sur ce que j'ai pu lire sur le sujet, un pas de côté qui éprouve notre tolérance, questionne longuement.
Luce d'Eramo était une femme impressionnante.
Plus qu'un récit, une recherche autour de la langue pour mieux préciser son propos avec plusieurs parties écrites à différents moments de la vie de l'autrice. Les souvenirs tardent parfois à s'éclaircir (ou refusent d'émerger).
Une réflexion sur ce que veut dire témoigner, faire récit de soi avec les manquements que cela suppose. Inconscient ou pas.
Une réflexion poussée sur l'écriture, sur la mémoire, sur la construction identitaire lorsque s'amoncelle les discordances et sur le besoin d'appartenir notamment dans la jeunesse.

Puis pour ne pas perdre de vue les différences de traitement entre les engagés volontaires et les autres, les prisonniers politiques et les autres, j'ai regardé Les quatre soeurs de Claude Lanzmann. (En ce moment sur Arte)
Remettre les choses à leur place. L'un n'empêche pas la cruauté de l'autre. L'un n'empêche pas que le point de départ est la misère sociale qui accable, les inégalités qui enterrent.
Pour autant, certains se sont vu dépossédés de toute humanité en une élection, et leurs religions ou leurs communautés, leurs handicaps ou leurs orientations sexuelles les ont déterminés moins vivants que les vivants. Souvent mort avant de tenter la survie.
Ne pas oublier.

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Luce d'Eramo raconte son expérience fasciste, à la fois idéaliste et volontariste, dans un camp de travail nazi à Francfort, avec à la clé une déportation au camp de concentration de Dachau à la suite de sa rébellion contre ce qu'elle découvre de détestable dans le nazisme… Elle finit par s'évader à nouveau et travaille sous une fausse identité dans un hôtel, à Mayence. Lors d'un bombardement des forces alliées, gravement blessée et brûlée, elle survit miraculeusement, mais handicapée. Luce d'Eramo s'en remet tant bien que mal et s'engage dans une pérégrination à travers des zones dévastées par la guerre, pour finalement retrouver l'Italie.
C'est le résultat de plus vingt-cinq années d'un exercice de mémoire pour témoigner – à défaut d'expliquer – son engagement dans la voie du fascisme – voie déjà tracée par sa famille de dignitaires à la faveur du Duce. Mais aussi un exercice de remémoration et de réminiscence dans une perspective de quête de la vérité…
Le questionnement de la véracité des souvenirs de Luce d'Eramo, de la vérité historique de ses épreuves, mais également la mise à plat du « pourquoi » et du « pour quoi » constituent la trame de son introspection durant cette période du IIIème Reich. Pour aboutir à une analyse du régime concentrationnaire et du travail volontaire mis en place par le génie du mal nazi ; une sorte de dissection sans concession, dont la description est souvent crue, violente et dont l'odeur de la souffrance et de la mort se respire à plein nez tout au long des quelques 500 pages de ce témoignage troublant.
« le détour » – dont le titre en italien est « Deviazione » –, c'est la déviation des idéologies oppressantes et criminelles du fascisme et du nazisme pour les refuser, les fuir et virer vers une recherche de la vérité et du sens originel de la vie. Ce détour, pour l'auteure, c'est se détourner de toutes les contradictions spéculatives pour se diriger – ou se rediriger – sur le parcours de la liberté ; quitte à s'opposer à sa propre famille ; ce qui à la longue devient bénéfique et salutaire…
Lecture dérangeante à la rencontre de la complaisance au nazisme, et à la fois, lecture troublante face à la révolte contre cet accommodement de plus en plus insupportable. Ces deux facettes de la personnalité de Luce d'Eramo nous rappellent nos égarements, nos manquements, nos compromissions. Nous avons tous un secret – ou plusieurs – à dévoiler. Tel est le message et le témoignage de l'expérience nazie de l'auteure, une aventure qui ne s'efface pas si facilement de sa mémoire. Mais une telle épreuve peut-elle être biffée de ses souvenirs ? Eh bien ! non ! et c'est tant mieux pour la vérité historique mais aussi pour la liberté retrouvée, sa liberté à elle, notamment contre ses vieux démons…
Par-delà les convictions doctrinales, le récit relève que s'il y a un peu d'humanité chez les hommes et les femmes, elle se manifeste et se révèle dans les temps difficiles de l'existence, dans les épreuves – et surtout dans les plus insupportables. Quand des êtres de tous bords – fascistes, nazis, communistes, démocrates, anarchistes – se retrouvent dans le même bourbier insalubre, il n'y a plus d'intérêt à s'entretuer. Ainsi, mieux vaut s'entraider pour mourir plus dignement et en paix – avec les autres et avec soi-même.
Un livre de mémoire d'un passé qui n'est pas révolu comme on nous le laisse entendre, car l'histoire se répète en s'adaptant aux circonstances actuelles. Un livre de réflexion aussi, car la guerre meurtrissant les populations civiles est plus que jamais d'actualité dans bien des régions du monde…
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Pourquoi ai-je choisi de lire ce livre ? Simplement pour m'apporter un autre angle de vue sur cette époque. J'ai été interpellée par le résumé : aller travailler de son propre chef dans un camp de travail Nazi. La démarche me semblait tellement surprenante qu'elle a aiguisé ma curiosité !

« Peut-être un chef d'oeuvre absolu » selon Gioliarda Sapienza. Je n'en dirais pas tant. Je dirais plutôt qu'il sort du lot par sa singularité et que pour cette raison il vaut la peine d'être lu.
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J'allais commencer en disant que le Détour déroutait le lecteur... L'auteur y narre ses souvenirs de son engagement volontaire en camp de travail nazi. le récit est découpé en plusieurs tranches, écrites à différentes époques, les liens à établir entre les morceaux n'étant pas aisés à faire. L'on comprend mieux l'intérêt d'avoir laissé ces chapitres dans leur ordre de rédaction au fur et à mesure de la progression de la lecture. L'autrice y révèle la difficulté qu'elle a eue à démêler ses souvenirs, et surtout faire face à ses "ruses mentales" qui l'ont conduite à faire des impasses sur certains épisodes. Fille de fasciste, elle a souhaité s'engager volontairement en Allemagne pour vérifier sur place la réalité des camps de travail. Une situation étrange : se mettre à travailler comme ouvrière, vouloir le même sort que les autres, mais être renvoyée régulièrement à ses origines (bourgeoises) par ses camarades de camp ou par les nazis.
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Luce est une jeune fille de bonne famille fasciste italienne qui veut mettre à l'épreuve ce qu'elle entend sur les camps de travail en Allemagne. Elle part donc se faire embaucher comme volontaire dans l'entreprise IG Farben.
Ces deux en Allemagne ne seront pas de tout repos. IG Farben, puis Dachau, puis rapatriement pour raisons médicales. Ne voulant pas retourner dans sa famille, elle profite d'un convoi qui repart.
N'ayant pas le statut de déporté, les conditions de travail ne sont pas tout à fait les mêmes, mais la jeune fille est confrontée aux dures réalités du nazisme et en reviendra marqué à vie, psychologiquement et physiquement.

Le détour est composé de quatre récits témoignages, rédigés dans les trente années qui ont suivi son retour.
Chacun des récits concerne un épisode particulier de ces deux années. Ils ont été rédigés en fonction des flashs de souvenirs et ne sont ainsi pas chronologiques.
C'est au lecteur de reconstruire le périple et l'enchainement des événements au cours de sa lecture.
Ces récits mettent l'accent sur le travail de la mémoire, qui occulte une partie des faits. Ceux-ci peuvent réémerger bien pus tard, en fonction des événements vécus, des chocs psychologiques ou des problèmes de santé.
J'ignorais totalement ce type de parcours et cette auteure pourtant prolixe en ouvrages romanesques universitaires et journalistiques qui tous cherchent à s'ancrer dans le réel, à l'image de ce qu'elle a vécu à 17-18 ans.
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amais la Seconde Guerre Mondiale et ses camps ne m'ont été racontés de cette manière. Avec tant de force, de vie, d'espoir. Redécouvert et republié au début de cette année dans une nouvelle traduction par les merveilleuses éditions du Tripode, cet ouvrage hybride, à la frontière de l'autobiographie et de la réflexion sociologique, est unique. C'est un témoignage des camps, dans la lignée de Charlotte Delbo et de Ruth Klüger, mais c'est aussi l'histoire d'une reconstruction mentale et physique.
Lien : https://lesmauxdits.fr/2020/..
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