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Critiques de Alan Pauls (29)
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Wasabi

« Wasabi » est un petit roman de Alan Pauls, écrivain argentin, déjà reconnu dans son pays. Le roman a été écrit en 1994, après une première traduction par Jacqueline Baldran (1995, Arcane17, 171 p.) puis retraduit par Lucien Ghariani (2006, Christian Bourgois, 153 p.).

Déjà reconnu en Argentine, l’auteur vient de gagner une bourse d'écriture pour un séjour de trois mois en France Il est invité à séjourner dans la Maison des Écrivains Étrangers et des Traducteurs (MEET) de Saint-Nazaire et est hébergé, tous frais payés, devant produire un petit texte, en échange de l’invitation. C’est de bonne guerre.

C’est ce séjour que Alan Pauls décrit, sous forme plus ou moins d’autobiographie, en racontant les trois mois qu’un auteur en résidence, écrivain et argentin, passe en France avec sa femme Tellas. Sauf que l’écrivain hypocondriaque constate un kyste qui ne cesse de grossir dans sa nuque. Ayant consulté, il se soigne avec une pommade au wasabi. Le légume, en dehors de son utilisation en cuisine, équivalent au raifort, est quelquefois utilisé en cardiologie ou sur les tumeurs cancérigènes. Dane le roman, c’est son goût et l’effet euphorique lié à son ingestion qui le rend addictif. « Les premières minutes passées, lorsque la rafale avait cessé de produire son effet anesthésique dans le nez, une convulsion vorace s'emparait de nous. Nous devenions chair, chair réduite à son état de pureté maximale, pure chair crue ». En plus de cette addiction, le narrateur devient narcoleptique, avec des périodes de sommeil de sept minutes exactement, trois fois par jour. C’est pendant ses périodes de sommeil qu’il développe une obsession envers Pierre Klossowski. Le frère ainé de Balthus, qui meurt en 2001 à 96 ans, est déjà loin de la philosophie, il ne se consacre plus qu’au dessin, nus et demi-nus féminins, mis en scène dans des fictions érotiques.

Le narrateur, que l’on identifie à Alan Pauls, découvre que rien ne se passe comme il l'avait prévu. De plus, il ne peut pas écrire. Cette obsession, et le développement de son kyste, constituent l’armature du roman. Résultat, sa femme, se lasse de saint Nazaire et de la France. « Tellas allait faire un tour du côté des boutiques de mode, pendant que je jetais un coup d'œil sur les livres. Nous nous fixions ce contrat, tout en sachant pertinemment que nous ne le respecterions pas. Mes explorations me lassaient en général beaucoup plus vite que Tellas, si bien que je me mettais, une demi-heure après, à longer les vitrines, et à la chercher comme un amant trahi. Juste au moment où, décollant les yeux de la paire de chaussures qu'elle essayait et les levant, songeuse, vers la rue, elle apercevait mon visage anxieux penché au milieu des mannequins à moitié vêtus, à ce moment-là, Tellas semblait se souvenir des termes de notre pacte et approchait de la porte en claudiquant (un pied nu, à l'autre une chaussure qu'elle n'achèterait pas), et me recevait avec le soulagement de qui voit apparaître un messie dont il n'a jamais eu besoin ».

Elle se réfugie à Londres. Lui aussi veut aller à Londres. « Parce qu’ici, tout est si courbé ». Simultanément, son éditeur français se comporte comme un imposteur, préférant des beuveries interminables. La ville impersonnelle et vide, entièrement reconstruite après la guerre, l'empêche de dormir la nuit. Le synopsis du roman est donc la chronique hallucinée d'un écrivain qui n'écrit pas. Donc, il passe par des aventures pitoyables et finalement se se met en tête de tuer Pierre Klossowski en personne, qu'il déteste pour des raisons obscures.

Avec toujours la monstruosité de son kyste comme moteur d'écriture, le roman entre dans une nouvelle étape. Tellas se retrouve près de Londres, dans un phalanstère, communauté composée d'une majorité notable de Pakistanais. Au cours d'une descente aux enfers de plusieurs jours, il est battu et volé par trois Irlandais, il manque de l'argent pour régler l'addition.« J'ai quitté l'hôtel le soir même, encore abasourdi par les coups. Je n'avais pas d'autre choix : je devais une facture que je ne pouvais plus payer, et sans doute l'excuse de l'agression aurait-elle ressemblé à une supercherie inutile sur mes lèvres sud-américaines ». Un semblant de dramaturge chinois le sort de sa vie de mendiant et le ramène à la civilisation une semaine plus tard, après une minutieuse rééducation dans son studio. « Pendant sept jours l'homme m'a vêtu, nourri, veillé sur moi, adouci de douces mélodies country les délires de la fièvre […] Il lui devait tout. C'était entre leurs mains ».

Alors que les heures « me séparaient de l'humain », il se consacre à « cacher mon ombre sans vie et monstrueuse ». Son kyste devient même un objet phallique, qui fait qu’une prostituée l’aborde pour lui demander de chevaucher ce nouveau godemichet « Je l'ai vue me tomber dessus […]et retenir son souffle et s'arrêter à l'endroit exact où le seuil de sa vulve a effleuré le bout du harpon. Alors la femme, poussant un long soupir, s'assit sur moi avec une lenteur et une allégresse exaspérantes ». Il sombre dans la neurasthénie « Comme elle était belle, avec quel bonheur détendu cette beauté avait oublié d'avoir à plaire. J'ai découvert deux choses en même temps : combien je l'aimais, combien elle avait peu besoin du monde ». Et comme par hasard, sans en révéler trop, le récit se termine au beau milieu de l’appartement de Saint-Nazaire. Comme pour boucler la boucle.



Heureusement, il y a une postface, soit un bref entretien avec Christian Bouthemy, qui était à l’époque, le directeur de MEET. Alan Pauls affirme que « la littérature est une pratique minoritaire, résiduelle, dyschronique, qui trouve dans la solitude non pas son destin funèbre mais la force et l'intensité de la résistance ». Il prétend ensuite que « c'est la question du style. Une certaine façon de porter, de malporter, rapporter (comme on disait à l'école : rapporteur) la langue ». Ce qui fait que le lecteur peut s’interroger sur la signification des deux versions du roman, à onze ans d’intervalle. D’autant que le livre et l’auteur ont été l’objet d’une abondante exégèse.



L’histoire littéraire de « Wasabi » doit être replacée dans son contexte de la montée en puissance de la littérature argentine. Plusieurs raisons à cela. D’une part les auteurs argentins commencent à avoir une envergure qui dépasse de loin leur pays. C’est la génération post Jorge Luis Borges, avec Roberto Arlt, Ricardo Piglia, César Aira ou Sergio Chejfec. Les trois derniers sont d’ailleurs passés par le MEET. Avec eux se développe une édition typiquement argentine, qui fait que les auteurs ne doivent plus passer par les critères de Madrid. Enfin, c’est le moment où le pays s’internationalise, avec l’arrivée massives d’émigrés, souvent européens qui viennent changer de vie et de monde. La nouvelle génération littéraire a donné lieu à de nombreuses publications, dont celles de Béatriz Sarlo « Borges: Tradition and the Avant-Garde » (199, in Modernism and its margins » (1999, Routledge, 320 p.), Teresa Orecchia Havas « Asedios a la obra de Ricardo Piglia » (2010, PIE Peter Lang, 89 p.), Alejandra Laera « El Tiempo Vacio de la Ficcion » (2004, Fondo De Cultura Economica USA, 244 p.), Raphael Eteve « Echos d’Allan Pauls » (2018, Pessac, Presses Universitaires de Bordeaux, 367 p.)



« Wasabi » est publié tout d’abord en espagnol (1994, Aguilar, Altea, Taurus, Alfaguara, Buenos Aires, 141 p.) puis réédité 11 ans après (2005, Anagrama, 160 p.). la traduction en français suit le même chemin après une première traduction par Jacqueline Baldran (1995, Arcane17, 171 p.) puis retraduit par Lucien Ghariani (2006, Christian Bourgois, 153 p.). Entre 1994 et 2005, en effet, ce ne sont pas seulement onze ans qui se sont écoulés, mais un changement de style et d’opinions dans de multiples domaines différents, un avant et un après dans ce récit. Entre il y a eu deux essais importants « Cómo se escribe. El diario íntimo » (1996, Éditions El Ateneo, Buenos Aires, 280 p.) et surtout « El factor Borges. Nueve ensayos ilustrados con imágenes de Nicolás Helf » (1996, Fondo de Cultura Económica, Buenos Aires, 160 p.). Ce dernier essai a été traduit en « Le Facteur Borges » par Vincent Raynaud et publié (2006, Christian Bourgois, 196 p.). Un autre fait marquant de cet intervalle est la publication de « El Pasado » (2003, Anagrama, Buenos Aires, 246 p.) traduit en « Le Passé » traduit par André Gabastou (2005, Christian Bourgois, 658 p.) qui lui vaudra le Prix Herralde en 2003. C’est surtout le premier prix décerné à un auteur non espagnol, mais argentin. Cinq ans après Roberto Bolaño et son « Les Déctectives Sauvages », mais tout de même. C’est donner une stature internationale à Alan Pauls.

Il se produit aussi des modifications importantes autour du style, du lien avec l'autobiographie, de la manière de raconter le temps, et de ses thématiques de fictions.

Dans le style et la phrase tout d’abord. Il n'y a toujours pas de longues descriptions, pas de longues phrases, mais pas non plus de rythme effréné, de comparaisons fantaisistes et de digression. Mais il y a déjà suffisamment d'éléments formels et conceptuels (points, virgules, italiques, longues parenthèses). Ainsi, dans « Le Passé », on trouve de longues disgressions sur le rapport à la maladie. Dans « Wasabi », c’est à propos de son obsession envers Klossowski « une idée m'a secoué. Je ne pensais pas ; je l'ai vue, tranchant comme un craquement : tuez Klossowski ». Alan Pauls, lui-même le reconnait.

En fait, il ne sait pas bien pourquoi Klossowski, et non pas quelqu’un d’autre. Est-ce parce que « il a abandonné la littérature pour les arts plastiques, […] et que cette œuvre est traversée par la pathologie » comme le suggère Teresa Orecchia Havas ? est ce tout simplement parce qu’il est fâché avec le temps. « Si je pouvais deux années avec cette maladie, je pourrais vivre deux ans et deux mois ». Après tout, ne perd-il pas du temps tous les jours avec ses crises de narcolepsie ? En faire un roman de l’attente ? de l’attente de quoi ? Un Godot à Saint Nazaire, cela serait Vladimir et Estragon aux bains de mer. Ou plutôt, en référence à Borges, une course poursuite improbable, du type d’Achille et la Tortue, avec le paradoxe de Zénon dans l’écriture du manuscrit demandé. Mais alors pourquoi introduire le chiffre sept, nombre premier, dans le roman, avec ses sept chapitres. Et sa référence à Otto Dix (lire 8 et 10), pour formuler que chaque sept années, une émission de télévision réunissait les mêmes personnages pour voir l’effet du temps qui passe. Façon de rendre le temps cyclique, à l’opposé du sept, insécable.

Il pense alors à faire autre chose que la littérature qu’il a faite. Entre temps il a longuement lu Borges. Il décide de faire quelque chose d'inédit, qui va à l'encontre, voire de ses principes littéraires « J'avais été invité à Saint-Nazaire pour passer deux mois et le "paiement" [...] consistait en un texte de vingt ou vingt-cinq pages, dont la seule exigence était qu'il entretînt une relation, sans préciser laquelle, avec le lieu ». C’est le début de son séjour au MEET. Il prend ce séjour comme une pause, un séjour touristique. Et en effet, « dès mon arrivée, j'ai dit que je n'allais pas écrire une ligne pendant ces deux mois d'invitation parce que je ne peux pas écrire quand je voyage ». Sa femme, Tellas, est du même avis et partage la même vue du séjour. Saint Nazaire est une ville portuaire proche de Nantes, il y fait bon vivre. « Quand je suis revenu à Buenos Aires, j'ai commencé à me sentir redevable à mes hôtes, et la dette augmentait en proportion inverse du peu d'emphase qu'ils mettaient à me le rappeler. Ils semblaient pratiquement avoir oublié que je devais écrire un texte en paiement de l'invitation et j'étais de plus en plus obsédé par ce texte. Le conflit était que je n'avais jamais écrit de littérature pour payer quoi que ce soit à qui que ce soit ».

Alan Pauls introduit également des éléments autobiographiques. Cette espèce de pacte éditorial, et le manque d’argent qui va avec, le forcent à écrire. Mais différemment. « la dette augmentait en proportion inverse du peu d'emphase qu'ils mettaient à me le rappeler ». On voit alors apparaitre le nom complet de son épouse Vivi Tellas, qui devient « la commissaire et directrice de théâtre » ainsi que celui de Christian Bouthemy, directeur en 1992 de la Maison des Écrivains Étrangers et des Traducteurs, MEET. Apparait aussi le kyste, qui est alors un petit bouton. « J'avais en fait un petit kyste à la base du cou et j'avais fait, sans résultat, des incursions dans l'homéopathie, pour me sauver de la chirurgie » confie t’il lors d’un interview.

Il essaye bien d’écrire, mais cela lui impose des pertes d’énergie énormes. « Assis à mon bureau, je m'étais mis en tête de barder la machine à écrire de cahiers et de papiers, persuadé que cette pression matérielle contribuerait à lui arracher les mots que mon imagination se refusait à lui dicter ». Les subtilités du changement de clavier entre Azerty et Qwerty lui posent plus de problèmes que de satisfactions. « La machine, une Olympia française, ne facilitait pas les choses. À peine me mettais-je à écrire, enhardi par la première étincelle qui faisait vibrer le désert de l'attente, que mes doigts s'enlisaient dans une bataille inégale avec les ruses du clavier. Ils s'inclinaient comme il fallait le prévoir, surpris par des accents indésirés ou par l'agencement trompeur des caractères, et le pire était que ce duel absorbait le temps et l'énergie que j'avais péniblement engrangés pour écrire. Certes chaque dérapage (le signe qui apparaissait toujours à la place du «ñ», les «o» et les «i» fatalement inaccentués, les malicieuses transpositions de la typographie) m'offrait en même temps une bouture inattendue de littérature précoce. Un autre écrivain, moins enclin que moi à se formaliser de ce genre d'accidents, aurait su célébrer et exploiter ces rejetons d'inspiration sauvage. Je ne sais combien d'histoires, de livres j'ai ainsi laissé filer, occupé que j'étais à régler le différend entre mes doigts et les touches du clavier, avant de les laisser agoniser et mourir enfin dans ces chausse-trappes dactylographiques qui étaient comme leurs urnes funéraires ».

Alan Pauls prend donc la décision d’écrire tout de même, mais différemment. C’est aussi la décision pour laquelle il optera plus tard, lors d’un « Stadtschreiber », (écrivain en résidence) à Berlin pendant un mois en échange de huit textes. « ce que je perds en raison du caractère « obligatoire » de la matière, je le récupère peut-être en raison de sa dimension « expérimentale » ».

Il termine son roman en citant son maitre Jorge Luis Borges. « Les bords de son œuvre coïncident avec les bords de la littérature […] on ne peut pas écrire après Borges ; on peut juste apprendre à écrire ». Un bel hommage. Il faut lire « Le Facteur Borges » par Vincent Raynaud (2006, Christian Bourgois, 196 p.) avant de relire Borges.

Parmi ses exégètes, Beatriz Sarlo propose une lecture du roman suivant une tonalité d‘avant-garde (« Borges: Un escritor en las orillas » (2007, Siglo XXI de España Editores, S.A., 160 p.). Elle suggère « qu'un des principes de l'avant-garde est que les contrats doivent être trahis. La trahison du contrat est comme la morale de l'avant-garde ». Mais ce n’est que pour mieux y renoncer « Au contraire, Alan Pauls a rempli ce contrat au maximum : au lieu de le transgresser, en obéissant au geste typique de l'avant-garde, il y adhère complètement, en y répondant de manière excessive : il détourne la transgression par le excès de complaisance que le roman semble mettre en scène ». A l’inverse Teresa Orecchia Havas (in « Echos d’Alan Pauls » compilation d’articles édité par Estève Raphaël (2018, Presses Universitaires de Bordeaux, Pessac, 367 p.) conçoit la démesure autobiographique du roman comme une simple « légalité choisie par l'écrivain pour ouvrir la voie à la question fondamentale » qu’est la figuration du processus d'écriture. C’est-à-dire qui « comporte des obstacles, des buts, avec des accélérations et des prises de conscience soudaines ». D’où le résultat qu’Alan Pauls écrit finalement « un roman sur l'impossibilité d'écrire sur commande tout en écrivant un roman sur commande ».





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Histoire des cheveux

Le personnage principal, perpétuellement dénommé par "il", a "un petit problème avec ses cheveux", qui constituent le centre de sa vie et de ses attentions, vous voyez tout de suite l'intérêt du bonhomme . Les 170 premières pages consistent donc en une très longue séance chez le coiffeur, parfaitement observée jusque dans les moindres détails. Entre le coups de ciseaux, dans une culture de la remémoration et de la digression, "il" repense à d'autres séances chez le coiffeur tout au long de son existence, aux mains de sa petite amie dans les cheveux de son meilleur ami qu'elle était en train d'embrasser, à la coupe afro qui a été le grand geste de révolte de son adolescence, à la boule à zéro de son meilleur ami quand il a été emprisonné pour un vol de voiture dans sa jeunesse... Il vante les mérites de Celso, ce coiffeur si "génial" que la coupe qu'il pratique lui offre comme un nouveau départ dans la vie, parle de ce fameux meilleur ami qu'il croise épisodiquement au fil des années dans des rencontres toujours surprenantes, de son chien qui le mord un beau jour, ne le reconnaissant pas suite à sa nouvelle coupe de cheveux magique, et de sa femme Eva, qui finit par le quitter. Je la comprends bien, la pauvre, bien que rien ne nous soit livré de l'histoire de ce couple, car ce type est d'un initérêt absolu, sans personnalité en dehors de cette particularité, ou en tout cas l'auteur ne nous fait pas le plaisir de la partager.



Bon, bien qu'il y ait un coté brillant, c'est assez rasoir (arf), sauf évidemment si on porte un quelconque intérêt aux cheveux, coupes et coiffeurs, ce qui n'est pas mon cas. A la page 170 (sur 220) apparaît enfin, comme un cheveu sur la soupe un personnage, qui, lui non plus n'a pas droit à un nom. Il est désigné par "l'ancien combattant" sans qu'on sache pourquoi et comment il a combattu, et il est le fils, longtemps parti en exil, d'un ancien opposant argentin. Et là je me suis dit: ça y est, voilà enfin ce qu'annonce le quatrième de couverture : « cette évocation subtile et politique de la décennie la plus sombre de l'histoire argentine », ce roman « qui dialogue avec le présent et flirte avec la parodie politique ». Mais non. Cet épisode sur l' « ancien combattant » donnerait une assez bonne nouvelle, d'autant qu'on arrête enfin de parler de cheveux pour une trentaine de pages, jusqu'au moment où il essaie de vendre une perruque à caractère historique (ayant appartenu à une opposante assassinée par le régime) à notre héros….



Ce livre est finalement surtout un exercice de style, et ce d'autant plus que l'auteur use et abuse de phrases interminables, entrecoupées de virgules et de tirets, dont m'a fallu souvent reprendre la lecture à zéro pour les appréhender (ce qui était déjà le cas dans Histoire de l'argent mais m'avait moins fait souffrir). Il choisit une approche originale où il finit par se noyer, car il n'y a justement que cette approche originale, cette recherche d’une virtuosité qui s'avère vide.

Cela donne un truc cocasse, avec quelques moments brillants, mais assez vain.



(Mais évidemment je me dis que j'ai dû passer à côté de pas mal de symboliques, deuxièmes degrés, et allusions politiques).
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Histoire des larmes : Un témoignage

Une histoire de larmes et de non larmes… Le narrateur est un petit garçon qui a décidé très jeune qu’il ne pleurait plus, qu’il ne verserait plus de larmes. Il va nous raconter son enfance de fils de divorcé. Il vit dans un grand appartement ave sa mère, qui préfère rester couchée toute la journée. Lui, il est un petit Superman, qui un jour, s’est fracassé sur la baie vitrée du salon. Il est un petit garçon, qui aime faire du tricycle sur les trottoirs du quartier, un quartier où vit énormément de militaires. De temps en temps, son père passe le prendre et ils vont ensemble à la piscine ou au tennis. Nous sommes au Chili et le 11 septembre 1973, il est chez un ami devant la télévision. Lui, de cette journée, il n’a que le souvenir du goûter et des larmes de son ami face à l’écran de télévision et les images d’incendie de la Monada. Il va aussi nous raconter les larmes de sa première petite amie, qu’il a décidé de quitter après le coup d’état. Il y a aussi cet étrange voisin, à qui sa mère le confie quand elle a des courses à faire. Cet homme l’héberge de façon silencieuse, dans son appartement, mais qui est vraiment ce militaire si silencieux ??!! Avec de longues phrases, Alan Pauls nous entraîne dans l’esprit du narrateur. Nous sommes, en même temps, au moment actuel et dans ses souvenirs d’enfance. Les images s’entrechoquent, les souvenirs s’entremêlent. Il faut s’accrocher, pendant la lecture, mais on est tout de même vite happé par l’histoire du pays et la vie du narrateur.
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Histoire des cheveux

J'ai eu beaucoup de mal à rentrer dans la première partie (jusqu'à l'apparition de Celso). Et même une tendance soporifique de ce livre... d'autant plus que j'étais dans le Paris-Toulouse (entre Cahors et Limoges) où, en plein après-midi, la SNCF avait mis des wagons de train de nuit (couchettes relevées, mais quand même, zéro confort). Surtout la première partie, jusqu'à l'interminable scène de la coupe de cheveux par Celso. Des phrases parfois très longues, mais absolument sans le talent de certains spécialistes de ces longues phrases. Une histoire sans grand intérêt, même pas les souvenirs qui lui remontent page après page, la tête dans le bac...
Lien : http://vdujardin.over-blog.c..
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La moitié fantôme

Récit hilarant d’un fossé générationnel, le septième roman d’Alan Pauls explore surtout la faille béante entre le monde d’avant les « nouvelles » technologies et celui d’après.
Lien : https://www.lemonde.fr/livre..
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Wasabi

J'ai lu quelque part que Bolaño considérait Alan Pauls comme l'un des plus grands écrivains latino américains vivants. Il ne me fallait pas d'autre argument pour me convaincre de me jeter sur un échantillon de la bibliographie du romancier argentin.

C'est malheureusement la déception qui a été au rendez-vous...



Le narrateur de "Wasabi" est lui-même écrivain et argentin. Il est en séjour avec sa femme Tellas à Saint-Nazaire, où il est invité à un salon littéraire. L'apparition d'un kyste dans la nuque le pousse à consulter une homéopathe recommandée par son éditeur. Elle lui prescrit une pommade qui, si elle s'avère peu efficace comme traitement de son kyste, qui prend peu à peu de monstrueuses proportions, présente d'autres avantages. En effet, son épouse et lui découvrent que la consommation, par voie orale, d'une infime dose de cette crème, leur procure de délicieuses transes. D'autres événements étranges ponctuent le séjour français du héros, comme le fait de subir, au moins une fois par jour, des absences de sept minutes...



Le synopsis de ce roman avait de quoi me séduire. On y navigue entre réalité et surnaturel, au gré de détails bizarres, loufoques, à l'image de ce kyste qui, tel un éperon planté dans la nuque du personnage, l'obligeant à se voûter, répugne et fascine à la fois. Le narrateur rapporte ses extraordinaires péripéties tantôt avec un détachement étonné, tantôt en les analysant à travers le prisme de la morosité que suscite en lui son caractère jaloux et suspicieux.

Seulement, j'ai trouvé la tonalité de ce texte en inadéquation avec son contenu. Stylistiquement travaillée, l'écriture d'Alan Pauls manque de fantaisie, de légèreté, au point qu'il m'est parfois arrivée de m'ennuyer au cours de la lecture de cet ouvrage, malgré sa brièveté.
Lien : https://bookin-ingannmic.blo..
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Histoire de l'argent

C'est une histoire de famille décomposée, le fils, simplement dénommé par "il" , étrange et inconsistant pont entre ses parents séparés. Le quatrième membre de la famille et l'argent cet argent qui coule à flot, avec lequel chacun joue à sa façon (au casino, au poker, en placements, en immobilier mais aussi en secrets, cachage, empaquetages divers, passionnant jeu d'amour perverti). L'argent est le lien entre les personnes, le but ultime, qui n'exclue pas cependant le débordement des sentiments, pour cette mère tout à la fois abusive et quémandeuse, ce père fantasque et charismatique. L'argent se donne, se prête, se rend somptueusement, s'extorque, se lègue, donne des émotions tendres ou fortes ; l'argent interroge assure, il humilie. L'argent est à la foi une valeur sûre, fondatrice, mais aussi insaisissable dans ces années 70 d'inflation monstrueuse, de corruption, de kidnapping à rançons exorbitantes. Ces gens sont riches à en mourir (comme le premier personnage à aparaître, le "premier mort" du héros adolescent, mort dans un curieux accident d'hélicoptère, et chacun s'interroge sur le devenir de la valise de fric disparue avec lui), ils croient que l'argent est leur rempart, mais découvrent qu'il ne protège de rien, il sont riches, mais dérisoires.



S'il m'a été assez difficile d'éprouver une réelle sympathie pour ces très riches et leur dieu clinquant, Alan Pauls est arrivé par son ironie mordante à faire plus qu'éveiller mon intérêt pour ce fonctionnement dé-réel, qui donne une réelle jouissance de lecture. Cela tient aussi à sa façon singulière, brillante, de raconter, d'éclater complètement la temporalité dans des allers retours aussi audacieux qu'irrationnels, de partir en digressions, au fil de longues phrases tendues au cordeau, parsemées de parenthèses, qui mettent une pression dans l'écriture.
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Le passé

2015
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Histoire de l'argent

Après Histoire des larmes et Histoire des cheveux, cette Histoire de l'argent est le troisième volet d'une fresque où Alan Pauls radiographie les quatre dernières décennies de son pays. La loupe qu'il utilise, cette fois, est celle du fric, une obsession collective qui lui sert d'outil symbolique pour comprendre l'essence d'une société dont les états d'âme semblent varier en fonction du cours de la Bourse.
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