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Critiques de Anne Cuneo (47)
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Le Maître de Garamond

Sur le papier, ce livre a tout pour me plaire: l'intrigue se déroule sous François I et s'attache aux premiers imprimeurs confrontés à la montée du protestantisme et à la contre-attaque du clergé catholique.

Détaillons: Garamond a appris son métier auprès d'un maître qui est devenu son beau-père, il s'est marié, n'a pas eu d'enfant mais s'est installé à son compte. Son beau-père à été jugé et condamné à mort pour avoir imprimé un texte écrit par la sœur du roi, proche des réformés.

Et bien voilà, vous savez tout ce qu'il y a à savoir et je viens de vous éviter de looooongues et fastidieuses heures de lecture.

Quand je pense que dans certains romans il ne se passe rigoureusement rien et qu'on les dévore, l'oeil humide et le ventre noué. Mais là, bon sang, je comprends bien que tous les auteurs de roman historique ne soient pas aussi doués que Dumas, mais avec un sujet pareil, il y avait tout de même de quoi nous embarquer au cœur palpitant de la naissance des temps modernes. Et bien non, nada, rien de rien, aucune chair, aucune émotion, aucun souffle.

À la place, on a un robinet d'eau tiède, genre copie de bonne élève, à qui son prof de khâgne aurait demandé de rédiger un roman à la manière de Yourcenar. Alors, c'est sûr, elle s'est appliquée, elle a fait des recherches, et c'est name dropping à toutes les pages (et que je te rencontre Rabelais, et que je te taille une bavette avec Marot). Moi, je suis d'accord pour qu'elle ait une bonne note. Mais par pitié, qu'on refile son manuscrit à quelqu'un qui sait écrire et raconter une histoire! Ou alors qu'elle se fasse éditer dans une collection historique, "La vie privée des imprimeurs sous François I", et là au moins on saura ce qu'on achète.
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Le Maître de Garamond

Une très lecture à la fois divertissante et enrichissante.

Un saut en arrière dans le passé et nous voilà en 1534 à Paris. Antoine Augereau, imprimeur, est soupçonné d’hérésie et il est condamné au bucher.

Pour faire simple, il a des idées opposées à celle de l’Eglise, dont le bras armé est composé des théologiens de la Sorbonne. Il leur reproche (et il est loin d’être le seul à cette époque) les ordonnances que les prêtres vendent sans retenue pour absoudre ses péchés. Il soutient également que les textes sacrés (ancien et nouveau testament) doivent être traduits en français, imprimés et accessibles à tous, ce qui permettrait une compréhension fine de la religion, non pervertie comme lorsque les prêtres s’autorisent à détourner les textes et leur sens initial en leur faveur. Cela vous rappelle quelque chose, non ? Luther et Calvin ne sont pas loin en effet.

Le parcours d’Antoine, la vie au XVIème siècle et le monde de l’imprimerie/des éditeurs/de la typographie nous sont narrés par son apprenti Claude Garamond. C’est l’occasion de rencontrer des personnages illustres de l’époque : François Villon, Clément Marot, Erasme ou encore Rabelais, mais aussi de découvrir l’histoire de cette police, Garamond, et de comprendre le fameux « serif » que l’on voit sur nos ordinateurs !

Un très bon roman que je ne peux que vous conseiller.

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Le trajet d'une rivière

Le trajet d'une rivière, c'est la vie de Francis Tregian né en 1574 à Cournouailles. Sa famille sera dépouillée de ses biens et devra s'exiler compte tenu des persécutions envers les catholiques en Angleterre. On suit alors la vie de ce passionné de musique, au gré des guerres de religions et des rencontres avec des personnages de son époque tels Shakespeare.

Un roman historique sublîme! Au départ, j'avais des appréhensions, je craignais avoir droit à un récit historique très rigoureux rempli de longues descriptions. À mon grand bonheur, je me suis trompée! L'auteur nous présente plutôt ici une histoire passionnante mettant en vedette un homme courageux et attachant qui a réellement existé. C'est écrit dans un style tellement vivant qu'on se sent submergé par l'histoire et les aventures de Francis Tregian. Ce qui m'a le plus charmée est qu'on plonge littéralement dans le monde culturel de cette époque, les leçons de musique, la fabrication des instruments, le théâtre. On ressent vraiment la passion pour la musique du personnage principal.



Chapeau à l'auteur qui décrit à la fin de son livre sa démarche et ses recherches pour en arriver à ce récit. Elle ne prétend nullement détenir la vérité, mais nous livre à partir de ses interprétations des documents trouvés, une histoire des plus captivante!
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Le Maître de Garamond

Issu d’une famille de drapiers, Claude Garamond découvre, émerveillé, l’imprimerie. Aux côtés de Maître Antoine Augereau, il débute alors son apprentissage. Mais plus que les techniques d’impression, la composition et la réflexion sur les textes, ce sont le dessin et la fonte de caractères qui l’attirent. Contrairement à son maître, clerc reconnu dans le milieu intellectuel, Claude se considère comme un simple artisan – un artisan au service de l’intellect tout de même. Seulement, face à une Église qui entretient le monopole des connaissances et chasse l’hérésie à tort et à travers, chercher à créer des caractères qui puissent être lus facilement par le plus grand nombre est une démarche engagée… et risquée. De Paris à Bâle, en passant par Venise et Poitier, aux côtés des plus grands du début de la Renaissance – Rabelais, Marot, Villon… –, il découvre un monde plein de richesses mais peu à peu en proie aux dérives les plus dangereuses.



Le Maître de Garamond, c’est une fresque humaniste, une aventure intellectuelle, une histoire de passions et de réflexion. En bref, un roman historique réussi. Anne Cuneo parvient avec brio à accrocher l’attention de son lecteur. D’ailleurs, tout est mis en place pour le plonger dans l’ambiance de l’ouvrage : le texte composé en Garamond, le style fluide qui s’accorde au propos, l’équilibre entre Histoire et histoire personnelle. Possédant quelques légères lacunes en termes de culture religieuse, il est agréable d’avancer de concert avec nos héros sur les cheminements de la pensée et de la théologie – pas de conversion en vue, rassurez-vous !



Un ouvrage d’où transparaît un amour des phrases, des mots, des lettres et de leurs graphies, tendant vers la construction d’une pensée cohérente, d’une médiation la plus large possible… Depuis cinq siècles, un bel idéal !
Lien : https://auxlivresdemesruches..
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Le trajet d'une rivière





Roman historique retraçant la vie d'un musicien anglais Francis Tregian (1574 - 1620?) auteur d'une compilation de musiques de la Renaissance : le Fitzwilliam Virginal Book, musique anglaise de son temps William Byrd, Thomas Morney, aussi Monteverdi...

Quel personnage romanesque que ce gentilhomme musicien, latiniste et bretteur, catholique dans l’Angleterre de la Reine Elisabeth, la protestante, fils d'un proscrit, catholique, fanatique opposant à la Reine, musicien passionné, merveilleux interprète, facteur d'orgues et de claviers (appelés en Angleterre virginals)!



Roman de cap et d'épée, de chevauchées à travers toute l'Europe. Mêlé à diverses conspirations pendant les guerres de religion, catholiques contre protestants en Angleterre, mais aussi catholiques "politiques" contre Jésuites, Guise contre Navarre en France, conspiration des Poudres....guerre de Trente ans en Allemagne...Espion, ou franc tireur?



Francis aspire surtout à la liberté de conscience, à celle de rester catholique sans pour autant trahir la Reine. Envoyé à Douai ses maîtres partisans du duc de Guise, il acquiert la sympathie d'Henri IV, encore Navarre, et lui confiera même son fils à sa cour. Liberté de servir son pays sans se laisser manipuler, par Philippe II d'Espagne ou par les Jésuites. Roman de la tolérance religieuse dans une période troublée par l'intolérance.



la musique est la passion de Tregian. Il rencontre les plus grands musiciens de son temps. Il fut l'élève de Thomas Morley. A Mantoue, il fréquente Monteverdi.



A Londres il assiste à la première du Songe d'une Nuit d'été et collabore à la mise en scène d'Hamlet et fréquente Shakespeare. Un curieux parallèle s'établit entre le destin de Hamlet de celui du musicien.



Il croisera Rubens mais pas Montaigne dont'il emporte partout les Essais . C'est d'ailleurs à Montaigne que l'auteur, Anne Cuneo fait référence dans le titre du livre Le Trajet d'une Rivière.



Personnage romanesque, aventures inventées par le biographe? peut être pas tant que cela. Anne Cuneo s'est appuyée sur une longue étude des textes, des partitions, faisan t œuvre d'historienne. Dans un dernier chapitre, elle explique son travail. Et à la fin, une solide bibliographie permet d'étayer toutes les affirmations - ou presque....
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Zaida

J'ai rencontré Anne Cuneo au Salon du Livre de Genève où elle faisait une lecture à un petit groupe de personnes.



Elle m'a émue par son parcours, par sa ténacité et par son envie de devenir écrivain. Son personnage Zaida est taillée dans la même pierre, femme forte, en avance sur son temps, qui ne recule devant aucun des malheurs que la vie insiste à mettre devant son chemin et qui croit que la volonté et l'amour peuvent tout vaincre!



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Le Maître de Garamond

Anne Cueno s'est énormément documentée avant d'écrire ce roman sur la vie présumée de cet artisan qui a dessiné et sculpté les caractères de son nom Garamond. Ce personnage a , semble t'il, rencontré tous les grands imprimeurs, libraires et écrivains du temps de François I er et Sa soeur Marguerite de Navarre sur fond d'obscurantisme religieux qui n'accepte pas l'émergence de la religion réformée suite aux exactions des religieux. Il va croiser Erasme, Lefèvre d'Estaples, Rabelais, Clément Marot, François Villon... Un travail de fourmi sur les métiers émergents autour du livre et l'imprimerie. Mêlez de contes et d.incursions à Nerac, ville royale du Lot et Garonne où je vis actuellement.
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Un monde de mots

John Florio ce nom vous dit quelque chose ? Je dois avouer qu’avant de lire ce livre j’étais comme vous.

Pourtant voilà un européen humaniste du temps de la Renaissance que l’amour des mots commande de connaître.



1553 L’Angleterre de la reine Marie la sanglante, après les turpitudes d’Henry VIII elle a repris le pays en main et s’acharne à supprimer les protestants.

Pauvre Michelangelo Florio, prédicateur qui croyait avoir trouvé asile en Angleterre pour fuir les prisons de l’inquisition italienne. Il doit fuir à nouveau avec sa famille.

Le fils John va suivre des études à Tübingen où on espère le voir suivre les traces de son père. Il a une connaissance parfaite de l’italien, normal avec un père italien, il parle anglais normal sa mère est anglaise, ajouter suffisamment de français pour se donner bel air et voilà le parfait homme de son époque.



Là où le destin va être malicieux c’est qu’il va transformer pour John Florio l’amour des langues en outil de travail et en gagne pain.

Il va devenir l’homme d’une langue : l’italien qu’il va essaimer dans toute l’aristocratie anglaise, des familles lui confient leurs enfants, des pères mettent leurs fils sous sa garde. Pour eux il va collecter des mots, des phrases, des proverbes, de petits récits jusqu’à en faire pour la première fois un outil pédagogique. Tout y est, la vie quotidienne, les métiers, les expressions usuelles, tout pour que l’apprentissage soit aisé. Il est convaincu que la langue parlée vaut toutes les grammaires.

C’est la réussite, le bouche à oreille fonctionne et bientôt John Florio est reconnu, sollicité par les plus grands il peut avec ses cours faire vivre sa famille.

Pour être parfaitement à l’aise partout il lui faut parfaire son anglais et où mieux qu’au théâtre ? Il prend des leçons du meilleur, Will Shakespeare et fréquente le fameux théâtre de John Burdage et il a « un pied sur chaque rive » il devient « un intermédiaire entre l’Italie et l’Angleterre, qui est vite devenue ma vraie patrie ».

Il va côtoyer tout ce que l’Angleterre compte d’écrivains, de médecins, de philosophes, de savants. Certains sentent le soufre comme Giordano Bruno d’autres deviendront des amis sûrs dans ces temps d’effervescence culturelle.



Son don des langues s’étendant au-delà de l’italien il va progressivement être solliciter par les grands du royaume, le genre de proposition que l’on ne peut pas refuser, et il va petit en petit traduire des lettres, des libelles, des documents secrets…bref être un peu espion.

L’imprimerie se développe à grands pas et John Florio va en profiter, il édite un manuel d’italien qui porte le joli nom de Premiers fruits puis plus tard grâce à l’aide de mécènes généreux il va publier le premier dictionnaire Italien- Anglais qu’il baptise Le monde des mots et qui comporte déjà 75.000 entrées !!!

Il lui reste à franchir une étape de plus en devenant traducteur. Il assure la traduction du Décaméron de Boccace et il est le premier traducteur des Essais de Montaigne car dit-il :

« Par rapport à l’original, un texte traduit n’est rien sinon ce que le dessin est à la nature, le portrait à l’original, l’ombre à la substance »



Comme dans ses autres romans Anne Cuneo, grâce à son érudition, rend le récit très vivant, très riche tout en respectant la vérité historique.

Quelle aventure que ce livre, je l’ai ouvert et je dois dire que mes rendez-vous avec John Florio se sont accélérés. J’ai ressenti un énorme plaisir à entrer ainsi dans cette époque tourmentée et j’ai suivi la trajectoire de John Florio avec grand intérêt, un homme que j’aurais aimé, comme disait Mme de La Fayette, "avoir pour voisin".




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Le Maître de Garamond

Quelle jolie lecture!!

Ce livre m'a vraiment transporté dans un autre temps. Lire est devenu une chose tellement naturelle que l'on a du mal à imaginer que des hommes se sont battus pour permettre l'accès aux livres imprimés à tous. Et c'est là que nous transporte ce livre, aux débuts de l'impression, au passage du latin au français et des lettres gothiques à des lettres plus faciles à déchiffrer.



On assiste à la naissance d'idées nouvelles et à l'humanisme, cette volonté de mettre la connaissance à portée de tous.



Certaines notions me paraissaient un peu obscures, comme le luthéranisme ou le calvinisme, mais ce livre m'a permis de comprendre les enjeux de la crise des religions frappant cette époque. La naissance d'un schisme entre catholicisme et protestantisme s'est accompagnée de nombreuses persécutions de la faculté de théologie de la Sorbonne.



J'adore apprendre tout en lisant et ce livre remplit pleinement cet office. C'est historiquement fouillé et très agréable à lire. Il y a quelquefois quelques longueurs mais cela ne m'a pas gêné outre mesure.



En bref, un bon moment de lecture et de culture.
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Le trajet d'une rivière

Un roman à la gloire de Francis Tregian qui compila le Fitzwilliam Virginal Book recueil des plus belles musiques pour le clavecin de son époque.

Il n’était pas compositeur mais amoureux fou de musique, il lui consacra sa vie entière.

Enfourchons la machine à remonter le temps et arrêtons là un peu après 1600 en Suisse à Echallens, Francis a trouvé refuge dans ce village après une vie de dangers, de tumulte, et de musique. Il va raconter sa vie.



La Renaissance n’est pas seulement le temps du renouveau intellectuel, c’est aussi celui des conflits religieux. Francis Tregian est contraint de quitter l’Angleterre son père catholique intransigeant refusant de faire allégeance à la Reine protestante.

La famille va devoir trouver refuge hors du pays pendant que le père va croupir des années en prison. La famille a encore des appuis et Francis va recevoir une excellent éducation, une éducation classique de l’époque où l’on apprend le maniement de l’épée aussi bien que le latin.

C’est vite un musicien confirmé au grand dam de sa famille qui l’aurait bien vu ecclésiastique , il ne compose pas mais joue à la perfection et va au gré de ses pérégrinations en Europe rencontrer les plus grands musiciens de l’époque.





Pour vivre il occupe divers emplois, secrétaire à Rome, drapier en Hollande et parcourt les routes en tous sens. Anne Cuneo lui prête une vie amoureuse et aventureuse qui lui permet de nous livrer une jolie fresque de l’époque.

Ses aventures sont nombreuses dans cette Europe en proie aux guerres religieuses mais aussi à la peste où nul n’est à l’abri de la prison, de l’inquisition, un temps où il est difficile de rester un homme de tolérance.

Francis Tregian est un humaniste qui lit les Essais de Montaigne, qui est reçu à la cour d’Elizabeth, qui croise Henri de Navarre sur le champ de bataille et fréquente les théâtres où l’on joue Shakespeare.

L’amour de la musique est vraiment le fil rouge de ce roman flamboyant.

Anne Cuneo est habile à mêler le vrai et l’imaginaire. Tous les personnages sont attachants, le roman est fourmillant de vie, on ne s’ennuie pas une seule seconde et on prend en passant un bain d’histoire de la Renaissance tout à fait réjouissant.






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Le Maître de Garamond

Le maître de Garamond, de Anne CUNEO (lu en Ed.: Le livre de poche, n°30190) est pour moi un vrai coup de coeur! Merci à l'amie qui me l'a fait découvrir...



En 1534, à la veille de Noël, Maître Antoine Augureau, imprimeur et fondeur de caractères est, hors de tout procès conforme au droit, déclaré hérétique, pendu puis brûlé avec ses livres sur le bûcher de la honte, celui que la faculté de théologie de la Sorbonne dresse depuis des années déjà pour asseoir son pouvoir. L'enjeu est d'importance, il faut maintenir le peuple dans l'ignorance, l'empêcher de se référer à des textes traduits dans la langue vulgaire qui est la leur, le français! La facilitation de l'accès aux écritures d'origines ne peut être admissible pour ces théologiens qui exploitent le peuple par leurs sermons dont le sens est parfois à l'opposé du message originel. La papauté a consacré le commerce des messes et des indulgences, puits de revenus prélevés auprès du peuple à qui il suffit de faire peur face aux affres du jugement dernier. "Dieu ne pourra les pardonner de tous leurs méfaits s'ils n'ont pas contribué à la puissance de l'Eglise romaine en se délestant de leurs maigres revenus pour racheter leur salut!" Si facile à dire lorsqu'on se pose en hommes de Foi, détenteurs de la Connaissance et qu'on cache, derrière le charabia interprétatif des textes, l'essence même du message de pardon d'amour prôné par le Christ!



Luther, Calvin, les évangélistes, Marot, Rabelais, les intellectuels les plus brillants des débuts de la Renaissance et, avec eux, tous les imprimeurs qui osent deviner l'avenir qui s'ouvre au monde, tous ces éveilleurs de conscience sont tracassés, pourchassés, déclarés hérétiques. Pour la Sorbonne, toute personne les soutenant, osant rapporter leurs propos ou simplement ne pas s'en offusquer, doit être soumise à cette inquisition et promise au bûcher. Que d'obscurantisme, au nom de Dieu! Que d'énergie malfaisante dépensée dans le seul but de s'octroyer un pouvoir intellectuel sans fondement!



La mort d'Antoine Augureau, Maître Claude Garamond, son plus célèbre disciple, ne peut l'accepter. Sous la plume habile de Anne CUNEO, il va entreprendre le récit de sa vie, du gamin apprenti jusqu'au Maître graveur qu'il est devenu dans la ligne humaniste de son Maître Antoine. Il nous conte ainsi la fidélité, l'engagement réciproques entre Maîtres et apprentis. Il fait la part belle à la noblesse de coeur, à la droiture et au dévouement sans limite des petits gens envers les justes. Il étaye son récit par l'apport de contes anciens, de farces jouées sur la place publique, d'extraits de grands textes qui, deviendront plus tard, des monuments de la littérature française! Le récit est vivant. On chemine avec Claude Garomond., on a faim et froid avec lui, on apprend, on lutte, on gagne et on perd avec lui. On fait nôtre ses émotions, sa participation aux échanges d'idées, sa soif de justice, son obsession de la réalisation parfaite. Une histoire d'apprentissage. Un parcours de vie d'une violence, d'une âpreté et d'une exigence qu'on oublie trop souvent de réaliser lorsque, distraitement parfois, on ouvre et feuillette un bouquin sans trop penser aux combats qui ont été menés pour que nous ayons accès à la lecture!



De manière romanesque, certes, mais solidement ancrée dans les recherches historiques menées, Anne CUNEO nous offre le récit de l'épopée de quelques sages en quête de vérité, de sens et d'ouverture au monde nouveau qui s'offre à eux. Ils ont pour noms: Luther, François Rabelais, Marguerite de Navarre, Mâitre Antoine Angureau et son disciple Garamond à qui on doit l'invention des accents, de la cédille, puis la gravure des caractères typographiques qui sont à la base de ceux qui servent notre lecture aujourd'hui.



Et c'est là une autre raison d'appréciation sans limite de ce livre. On y découvre le récit du combat des imprimeurs pour nous permettre de lire en langue vulgaire, la nôtre, celle qu'on comprend le plus aisément. Combat, on le verra, porté au péril de leurs vies. Combat pour que puisse naître un caractère qui facilite pour l'oeil le plaisir de la lecture et de la découverte du sens. Que serions-nous devenus, nous, amoureux des livres, si de tels géants n'avaient pas combattus pour un savoir partagé, accessible, fécond pour une pensée libre, ouverte et confiante en ces temps nouveaux qu'il nous faut toujours tâcher de comprendre au plus près de nos réalités? Que serions-nous devenus?



Enfin, ce livre est criant d'actualité lorsqu'il met au jour les méfaits de serviteurs faussaires des idées fondatrices des religions. La faculté de théologie de la Sorbonne au 16e siècle, les fondamentalistes de l'Islam aujourd'hui. Les raisons sont les mêmes, non? Asseoir un pouvoir sur le dénis du droit à la connaissance, à la compréhension, à la mise en débat et perspectives d'idées qui auraient tout à gagner d'être discutées, proposées, jamais imposées!



Le Maître de Garamond, un livre d'histoire qui invite au respect des anciens et qui nous ouvre à la compréhension de l'avenir. Un livre à partager!
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Le Maître de Garamond

Le Maître de Garamond est l’histoire, inspirée de la réalité, d’Antoine Augereau, qui fut à la fois imprimeur, éditeur et graveur de caractères typographiques. Si la police Garamond (que l’on trouve dans nos traitements de texte) porte le nom de son apprenti, le narrateur de cette histoire, elle fut probablement conçue par Antoine Augereau lui-même.



Roman historique d’une très belle écriture, les personnages sont vivants et attachants et l'intrigue bien menée! Roman passionnant et instructif.
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Le Maître de Garamond

Une magnifique fresque contée avec talent par Anne Cunéo. Elle nous fait vivre les débuts de l'imprimerie, où imprimer un livre est réservé à des érudits maîtrisant une grand savoir et plusieurs langues, et où imprimer un livre est également dangereux pour l'imprimeur surtout si le contenu n'est pas approuvé par l'Eglise...

On suit les différents protagonistes à travers les yeux de l'un d'eux, apprenti, compagnon puis maître...

Un récit vivant qui nous fait revivre des heures peu glorieuses de notre passé et de l'arrivée de l'écrit, passionnant, prenant...
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Station Victoria

Londres, 1954. Amalia, 14 ans, débarque à la gare Victoria, seule et sans le sou. Elle fait la connaissance de Victoria Brown, une étonnante octogénaire anglaise.



Station Victoria est un ouvrage qui joue avec son lecteur. Il se présente dès la première page comme la traduction d’un texte écrit par une jeune écrivaine à partir de ses souvenirs. Mais c’est bien un roman d’apprentissage complètement fictif qui raconte l’épanouissement d’une adolescente et la belle histoire d’amitié qu’elle vit avec une vieille anglaise. L’intrigue nous plonge dans l’Angleterre des années 1950, tout en faisant des incursions à la fin du XIXe siècle, où l’une des héroïnes est née.



L’histoire n’est pas parfaite, bien sûr. Anne Cuneo s’est visiblement documentée, mais n’hésite pas à accumuler longueurs et facilités. Certains rebondissements font grincer des dents et la construction des personnages repose beaucoup sur des clichés. Des clichés très vivants cependant, auxquels l’auteure suisse parvient à donner une réelle personnalité. Mais le plus remarquable dans cet ouvrage, c’est le style d’Anne Cuneo : vif, affûté, plein d’ironie et d’intelligence, il relève l’intérêt de l’intrigue, parfois répétitive, pour donner au livre tout son intérêt.



Au final, un roman d’apprentissage bien écrit mais dont l’histoire aurait gagné à être plus travaillée.

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Le Maître de Garamond

Un beau roman historique qui nous situe à la Renaissance en France sous François 1er, le monde de l'impression, en France, à Venise, à Bâle, la période des réformateurs en religion, les livres brulés, les imprimeurs, libre-penseurs persécutés, et malgré tout la diffusion de la réforme de la religion en Europe

Bien documenté, lecture agréable, je découvre Anne Cuneo avec beaucoup de plaisir.

A consommer sans modération
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Le trajet d'une rivière

Aîné d’une fratrie de 18 enfants, Francis Tregian est resté dans la postérité pour avoir signé un recueil de musiques pour virginal et clavecin au XVIe siècle. On sait que son père, un descendant royal fut envoyé en prison pour des questions de religion, son intransigeance catholique l’ayant désigné comme victime expiatoire de la réforme anglicane de l’époque. Réunissant les maigres indices concernant la vie de cet homme, Anne Cuneo en retrace une vie imaginaire, qui pourrait être proche de celle qu’il a vécue. Né dans les Cornouailles, Francis est envoyé rapidement dans un séminaire à Reims. Il y apprendra le latin, la musique et le maniement des armes. Devenu adulte, il parcourra les routes de l’Europe de la Renaissance, l’Angleterre et les troubles religieux de la réforme anglicane, la France et la guerre de Trente ans et l’accession au pouvoir d’Henri de Navarre, l’Italie et le monde des Arts, les Pays-Bas et le monde du commerce. Et chaque fois, l’homme rencontre artistes, reines et rois, hommes du peuple ou brigands. Des pérégrinations dignes d’un roman de capes et d’épées mais qui deviendront pour l’homme un cheminement intellectuel et un enrichissement spirituel. Car Francis Tregian, fils d’une famille catholique, refuse de se convertir à l’église anglicane, ce qui ne l’empêche pas de côtoyer protestants, catholiques, juifs et de rester fidèle à son pays, même si celui-ci le rejette constamment. Tout comme il est tiraillé entre l’allégeance à sa famille et son besoin de liberté. Et l’auteure profite de ce portrait pour nous dresser l’état d’une époque pétrie de contradictions : si les arts et le commerce sont en pleine éclosion, les guerres de religion ne cessent de diviser les nations, les dynasties royales s’étripent à tour de bras, sans oublier la peste bubonique qui fait des ravages. Et de nous présenter les grands penseurs et artistes de cette époque mouvementée, Montaigne et Shakespeare notamment. Une grande saga historique menée tambour battant, qui obtint le prix des Libraires en 1995.

Ce livre m’avait été conseillé par ma libraire préférée… il y a 25 ans. Comme quoi il ne faut jamais désespérer. D’autant plus que j’ai un excellent (et lointain) souvenir d’un autre roman de cette auteure, « Le maître de Garamond ». Ce roman sait allier aventures et érudition avec talent, au grand plaisir du lecteur que je suis.

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Le trajet d'une rivière

Vivent les boîtes à livres. Elles permettent de bonnes surprises parfois, des livres que l'on n'aurait jamais achetés. Celui-ci en est un.

J'ai pris beaucoup de plaisir à suivre la vie de Francis Tregian. L'auteure la décrit de façon très vivante. Les personnages qui gravitent autour du personnage principal sont très attachants, y compris quand il s'agit de Monsieur Shakespeare.

J'ai (ré)appris beaucoup de choses sur cette époque, la vie des gens. J'ai été en particulier sidérée par la place de l'étude pour les enfants et ceci très jeunes, enfin ceux qui avaient la chance d'être gentilhommes. Le livre fourmille d'anecdotes de rencontres et surtout de musique, qui est la passion de Francis.

On ne s'ennuie pas une seconde: une très très bonne surprise.
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Le Maître de Garamond

Roman historique, ce livre retrace l'époque où l'imprimerie commence à se répandre avec dans son sillage l'humanisme, avec Erasme puis le mouvement évangélique qui deviendra la "Réforme" et le protestantisme avec en particulier Luther. Le personnage central est l'imprimeur parisien d'origine poitevine Antoine Augereau, qui est favorable aux idées nouvelles et cherche à faire accéder le plus possible de gens à la lecture, notamment en favorisant les caractères romains par rapport aux caractères gothiques plus difficiles à lire et en éditant des traductions des textes anciens en langue "vulgaire", c'est-à-dire en français. Il s'attirera les foudres des réactionnaires de la Sorbonne et sera finalement brûlé avec ses livres.

Si l'aspect historique est interessant et particulièrement fouillé, j'ai trouve que le livre manque un peu de fantaisie et de légèreté. A lire néanmoins comme le récit d'une époque où écrire et publier était parfois puni de mort. Mais ce temps obscur serait-il de retour ?
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Objets de splendeur: Mr. Shakespeare amoure..

"Objets de splendeur" (Ed. Bernard Campiche, 1996) est le deuxième livre que je découvre et dévore de l'auteure suisse, Anne CUNEO. Trempée dans l'Histoire, merveilleusement bien documentée, sa plume nous propose le récit des états amoureux de William Shakespeare pour sa Dark Lady. Ce n'est pas l'Histoire, ce n'est qu'un roman ... mais c'est un bon roman! Sans jamais écraser le lecteur de détails historiques qui font perdre le fil du récit, l'auteure nous entraîne et nous fait vivre ce Londres des querelles religieuses puritaines, des complots, des manigances pour le pouvoir, des intrigues courtisanes, mais aussi des années noires de la peste, des conditions rudes de l'existence et de la précarité des gens du peuple, artisans, apprentis, comédiens ... Et c'est là, pour moi, l'intérêt majeur de ce livre, il nous permet de rentrer dans le monde du théâtre de cette époque. Son interdiction faisait des comédiens d'infatigables clandestins, toujours prêts à s'entraîner, à répéter, à monter et démonter les théâtres pour pouvoir continuer à jouer! C'est l'époque d'un extraordinaire foisonnement de productions théâtrales, d'écritures et d'inventions techniques en plateaux de jeu, coulisses, machineries de toutes sortes. Le livre ne date pas de hier (1996) mais l'époque qu'il relate date bien plus encore... Cependant, les pièces de Master William se jouent encore, les comédiens et le théâtre restent des facteurs de divertissement, de réflexion et d'éducation pour notre monde. On y a le droit d'y rire, de se moquer du travers des puissants comme des petites gens, de réfléchir sur la destinée du monde par le biais du pouvoir que nous pouvons prendre sur nos propres vies. Nous le devons à tous ceux qui, au travers des siècles, se sont battus pour que vive le théâtre, le divertissement et la liberté d'expression. Cela aussi, Anne CUNEO nous le rappelle avec sa manière de nous raconter l'Histoire à travers un histoire. Un vrai bon moment de lecture!
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Une cuillérée de bleu

On reconnait bien l'écriture de la journaliste et écrivaine, Anne Cunéo. Belle autobiographie sur le sujet sensible et très féminin qu'est le cancer du sein. Jamais lourde, toujours sincère et pudique, avec toute la poésie et la sensibilité qui se dégage, ce livre est un bel hymne à la vie, un ouvrage intensément chargé d'amour.
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